ÉTAPE 4 : Échographie normale du bas appareil urinaire chez le chien et le chat - Le Point Vétérinaire n° 323 du 01/03/2012
Le Point Vétérinaire n° 323 du 01/03/2012

EN 10 ÉTAPES

Auteur(s) : Hélène Kolb

Fonctions : Centre hospitalier vétérinaire Atlantia
22, rue René-Viviani
44200 Nantes
helenekolb@yahoo.fr

Connaître l’anatomie et les variations physiologiques du bas appareil urinaire est essentiel pour interpréter son examen échographique.

Le bas appareil urinaire regroupe les uretères, la vessie et l’urètre. Son examen échographique peut paraître simple pour le manipulateur. Pourtant, il repose sur une parfaite maîtrise de l’anatomie et de la topographie urinaire ainsi que sur la bonne connaissance des facteurs de variation d’un animal à l’autre, selon l’espèce et le format notamment. Par ailleurs, l’examen est tributaire de nombreux artefacts qui constituent de véritables pièges d’interprétation pour le manipulateur non expérimenté. Cet article détaille les outils échographiques indispensables pour reconnaître ce qui relève de la maladie chez un chien ou chez un chat.

RAPPELS ANATOMIQUES DU BAS APPAREIL URINAIRE NORMAL

1. Situation dans l’abdomen

Les uretères, en continuité avec le bassinet, prennent leur origine dans le hile rénal et s’étendent caudalement jusqu’au col vésical. Ils cheminent majoritairement dans l’espace rétropéritonéal ventralement aux muscles sous-lombaires (donc au plafond de la cavité abdominale), puis gagnent l’espace péritonéal, dans la région du trigone vésical, en traversant les muscles latéraux de la vessie, pour s’aboucher à cette dernière [3]. La vessie, située dans l’abdomen caudal, est en continuité avec les uretères et l’urètre caudalement. Elle est en contact ventralement avec la paroi abdominale et dorsalement avec le côlon descendant, chez le mâle, et avec l’utérus, chez la femelle (photo 1). Sa position, sa forme et sa taille dépendent du degré de remplissage. Lors de rétention importante, elle peut s’étendre jusqu’à l’ombilic. L’urètre, chez la femelle, se situe entre le plancher pelvien et le vagin et se jette viale méat urinaire dans le vestibule du vagin. Chez le mâle, il se divise en un urètre pelvien (en continuité avec la vessie), un urètre périnéal et un urètre pénien plus distal en continuité avec le méat urinaire et protégé en partie par l’os pénien. La prostate, en contact avec l’urètre pelvien, permet de séparer celui-ci en trois régions, préprostatique, prostatique et postprostatique.

2. Anatomie du bas appareil urinaire

La vessie se divise en trois parties. L’apex est cranial (il supporte chez le foetus le canal de l’ouraque). Le corps est aplati dorso-ventralement. Caudalement, le col est de forme rétrécie et oblongue, en continuité avec l’urètre.

Les uretères traversent la paroi musculaire vésicale dorsale, puis suivent caudalement un trajet intramural sur 2 cm, avant de s’aboucher dans le tiers caudal de la vessie via la papille urétérale.

TECHNIQUE D’EXPLORATION DU BAS APPAREIL URINAIRE

1. Préparation de l’animal

La tonte

La tonte de l’animal concerne l’ensemble de l’abdomen ventral, compte tenu du degré d’extension variable de la vessie et du trajet cranio-caudal des uretères. Pour explorer l’urètre pénien, le périnée et la région ante-scrotale doivent être également tondus.

L’état de réplétion vésicale

L’examen échographique n’est réellement pertinent que si la vessie est correctement remplie. Une vacuité vésicale, en particulier, fausse l’interprétation des résultats (majoration de l’épaisseur de la paroi). Afin de lever cet obstacle, le manipulateur peut accélérer le processus de remplissage en utilisant du furosémide par voie intraveineuse ou un soluté isotonique stérile (par exemple, NaCl 0,9 %) au travers d’un cathétérisme urétral (en veillant à ne pas injecter d’air en même temps). L’examen peut aussi être différé.

2. Positionnement de l’animal

L’animal est en général placé en décubitus dorsal maintenu par un coussin en mousse. Ce positionnement permet une exploration de la totalité de la paroi vésicale, en particulier de sa partie ventrale qui se trouve alors bien individualisée de la paroi musculaire.

3. Le choix des sondes

Des sondes électroniques microconvexes de fréquence ultrasonore d’au minimum 5 à 7,5 MHz sont utilisées. Chez les chats ou les petits chiens, des sondes linéaires de plus haute fréquence (jusqu’à 15 à 18 MHz) permettent une exploration plus détaillée de la paroi vésicale, du trigone vésical et des orifices urétéraux.

4. L’examen échographique

L’examen consiste à visualiser la totalité du bas appareil urinaire. Le manipulateur balaye les organes cranio-caudalement et médio-latéralement selon des plans de coupes sagittale et transversale. Selon un plan de coupe sagittal, le manipulateur peut visualiser l’apex en même temps que le trigone vésical. Selon un plan de coupe transversal, la vessie apparaît comme une structure de forme ovoïde délimitée par une paroi fine et possédant un contenu anéchogène.

IMAGES ÉCHOGRAPHIQUES DU BAS APPAREIL URINAIRE NORMAL

1. La paroi vésicale

Les couches échographiques

Histologiquement, la paroi vésicale est constituée de quatre couches. Il s’agit de la muqueuse (couche la plus interne, au contact des urines), la sous-muqueuse, la musculeuse et la séreuse. À l’échographie, la muqueuse, hypoéchogène, est le plus souvent invisible. Le manipulateur distingue alors trois couches échographiques réparties de manière régulière et parallèles (photo 2). Il peut ainsi observer la sous-muqueuse sous la forme d’une fine ligne hyperéchogène, la musculeuse, couche plus épaisse et hypoéchogène, et la séreuse, fine ligne hyperéchogène.

L’épaisseur normale de la paroi vésicale

L’épaisseur pariétale varie selon le poids de l’animal et le degré de réplétion vésicale. Plus l’animal est lourd, plus sa paroi est épaisse, et inversement. Plus la vessie est distendue, plus sa paroi est fine, et vice-versa (photos 3 et 4). Une étude a montré une épaisseur moyenne de 2,3 mm sur une vessie faiblement remplie et jusqu’à 1,4 mm sur une vessie moyennement remplie, ainsi qu’un écart de 1 mm entre le chien le plus lourd et le plus léger [4]. Chez le chat, l’épaisseur moyenne est de 1,5 mm. La paroi doit donc être mesurée sur une vessie modérément distendue.

2. Le contenu vésical

Les urines normales sont anéchogènes. Le renforcement postérieur facilite l’examen des organes dorsaux (utérus, côlon, noeuds lymphatiques iliaques médiaux). Certains artefacts (en particulier celui de lobe accessoire créant des “pseudosédiments”) peuvent fausser l’aspect échographique normal et prêter à confusion.

3. Les uretères et leur abouchement

Les uretères ne sont généralement pas visualisables chez un animal normal, sauf s’ils sont distendus. Les papilles urétérales (et l’extrémité distale des uretères), situées sur la paroi dorsale au tiers distal de la vessie, peuvent parfois être visualisées à l’aide de sondes de haute fréquence sous la forme de deux petits reliefs convexes (photo 5) [5].

Le jet urétéral (qui correspond au flux d’urine provenant des uretères viala papille urétérale dans la vessie) se repère par de fins échos hyperéchogènes en mode bidimensionnel ou, plus facilement, au mode Doppler couleur sous la forme d’un flux codé en rouge (en direction de la sonde d’échographie) (photo 6) [2].

4. L’urètre

Le manipulateur peut examiner la portion d’urètre comprise entre le col vésical et l’entrée du bassin (ce qui correspond chez le mâle aux portions préprostatique, prostatique et postprostatique de l’urètre pelvien), ainsi que certaines portions accessibles de l’urètre périnéal et pénien à l’aide d’une sonde linéaire de haute fréquence.

L’urètre prostatique est repéré dans le plan sagittal de la prostate, légèrement excentré dorsalement, et peut apparaître plus large dans sa partie proximale lorsque la vessie est très distendue. Il est visible sous la forme d’une zone circulaire (en coupe transversale), ou tubulaire (en coupe longitudinale) hypoéchogène, voire anéchogène, entourée d’une zone périphérique hyperéchogène (hilaire) correspondant à la convergence des canalicules prostatiques et du muscle urétral (photos 7 et 8). Le plus souvent le manipulateur ne visualise pas la lumière urétrale, mais les structures adjacentes (muscles, os pénien).

5. Les artefacts

L’échographiste doit être vigilant lors de l’examen échographique vésical, car les artefacts sont fréquents et peuvent le conduire à de fausses interprétations.

L’examen de la paroi vésicale ventrale (la paroi la plus proche de la sonde) peut être perturbé par les artefacts de “réverbération du champ proche”, lorsque la peau est épaisse ou le tissu sous-cutané graisseux [1]. Pour lever cet obstacle, le manipulateur peut appliquer une couche de gel ultrasonore plus épaisse, utiliser une sonde linéaire ou diminuer le gain proximal.

Des images de “pseudo-sédiments” peuvent être observées dans la vessie quand une importante quantité de gaz coliques est présente. Le manipulateur peut distinguer cet artefact de la présence de vrais sédiments en replaçant l’animal debout ou en agitant légèrement la sonde sur la vessie. Ainsi, s’il s’agit de vrais sédiments, ceux-ci retombent par gravité sur la paroi ventrale de la vessie. Selon le même principe, le manipulateur peut différencier un calcul vésical et l’artefact créé par des selles et des gaz contenus dans le côlon, qui peuvent aussi apparaître sous la forme d’éléments hyperéchogènes associés à un cône d’ombre sous-jacent (photo 9).

Conclusion

Cet article détaille la topographie et l’aspect échographique normal du bas appareil urinaire. Il s’agit de prérequis que le manipulateur doit maîtriser afin de pouvoir interpréter les images pathologiques.

Références

  • 1. Chetboul V, Bureau-amaglio S, Tessier-Vetzel D et coll. examen échographique de l’appareil urinaire et de la prostate. Dans : échographie et doppler du chien et du chat, atlas en couleur. Masson, paris. 2005:347-374.
  • 2. D’anjou Ma. Bladder and Urethra. Dans : penninck D, D’anjou M-a. atlas of small animal ultrasonography. ed. Blackwell publishing, ames, iowa. 2008:365-383.
  • 3. Fletcher TF. applied anatomy and physiology of the feline lower urinary tract. Vet. clin. north am. 1996;26(2):181-196.
  • 4. Geisse aL, Lowry Je, Schaeffer DJ et coll. Sonographic evaluation of urinary bladder wall thickness in normal dogs. Vet. radiol. Ultrasound. 1997;38:132-137
  • 5. Widmer Wr, Biller DS, adams Lg. Ultrasonography of the urinary tract in small animals. J. am. Vet. Med. assoc. 2004;225(1):46-54.

Points forts

→ L’examen échographique doit être réalisé sur une vessie modérément remplie.

→ L’épaisseur de la paroi vésicale est proportionnelle au poids de l’animal et inversement proportionnelle à l’état de réplétion vésicale.

→ Chez le chien, l’épaisseur est comprise entre 1,5 et 2,5 mm. Chez le chat, elle est de 1,5 mm en moyenne.

→ Les uretères normaux ne sont généralement pas visualisables à l’échographie.

→ Une partie de l’urètre pelvien et pénien peut être examinée à l’aide de sonde linéaire de haute fréquence.

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