ONCOLOGIE COMPARÉE
Fiche
Auteur(s) : François Serres
Fonctions : Oncovet
Clinique vétérinaire des référés
Avenue Paul-Langevin
59650 Villeneuve-d’Ascq
Si le coût et la durée du traitement restent un frein pour améliorer le pronostic des lymphomes non hodgkiniens de type B chez le chien, le développement de protocoles d’immunothérapie est très prometteur.
L’étiologie, la présentation clinique et les aspects cyto- et histologiques des formes les plus fréquentes de lymphomes canin et humain sont très proches (avec une prédominance de lymphome de haut grade de type B). Les profils d’expression génomique et protéomique du lymphome canin ont également fait l’objet d’études ayant montré de très nombreuses similarités avec leurs équivalents humains. Enfin, si les bases du traitement (chimiothérapie de type CHOP : association cyclophosphamide/vincristine/adriamycine et prednisolone) sont similaires, le pronostic chez l’homme reste meilleur que celui observé chez le chien. Ce dernier pourra probablement être amélioré à l’avenir.
Le lymphome non hodgkinien (LNH) est le cancer hématopoïétique le plus fréquent chez le chien (avec une incidence d’au moins 25 cas/100 000 chiens chaque année) [2]. Environ 80 % des lymphomes canins sont d’immunotype B, avec un comportement agressif, se traduisant par une polyadénomégalie d’apparition suraiguë, fréquemment associée à un envahissement extranodal (pouvant atteindre le foie, la rate, la moelle osseuse, le tube digestif, le système nerveux central, etc.) (photo 1). Des prédispositions raciales majeures ont été mises en évidence, indiquant un support génétique pour le développement de la maladie [5]. Enfin, un lien entre la prévalence de la maladie et l’exposition à divers toxiques (polluants industriels, décharges, pesticides) est fortement suspecté, voire démontré [3].
Chez l’homme, les lymphomes non hodgkiniens représentent la cinquième affection cancéreuse la plus fréquente (près de 10 000 nouveaux cas par an en France), et cette incidence n’a cessé de croître ces dernières décennies. Parmi ces lymphomes, les formes les plus fréquentes sont les lymphomes B diffus à grandes cellules (représentant la moitié des lymphomes de l’adulte). Ces lymphomes ont également un comportement agressif et une répartition similaire. Plusieurs études épidémiologiques ont clairement établi un lien entre cette maladie et l’exposition aux pesticides, et elle est désormais considérée comme une maladie professionnelle des agriculteurs [1].
Chez l’homme, le diagnostic de certitude repose sur l’examen histologique d’une biopsie ganglionnaire.
Chez le chien, la cytoponction reste l’examen le plus souvent employé. Il permet de préciser le pronostic et de distinguer les lymphomes de type centroblastique polymorphe (forme la plus fréquente parmi les immunotypes B) d’autres formes dont le pronostic est différent (photo 2) [7]. L’examen morphologique doit être complété d’une caractérisation immunologique.
Le bilan d’extension fait appel à l’examen tomodensitométrique du corps entier chez l’homme, afin de permettre la mesure de l’ensemble des nœuds lymphatiques. Il est parfois complété d’une ponction médullaire, voire de liquide céphalo-rachidien (LCR).
Chez le chien, en l’absence de consensus, l’association d’un examen échographique abdominal à un examen radiographique du thorax, et éventuellement complétée d’une ponction médullaire est indiquée (photo 3). La recherche de complications hématologiques, hémostatiques et d’une hypercalcémie paranéoplasique doit être proposée.
Le pronostic lors de lymphome dépend de nombreux paramètres, mais il reste globalement homogène et l’évolution est prévisible pour les lymphomes de type B diffus, quelle que soit l’espèce. L’influence de plusieurs facteurs pronostiques est discutée.
Chez l’homme, l’âge, le stade clinique, la “tolérance” clinique de la maladie, la présence d’une localisation autre que les nœuds lymphatiques et le taux de lactate déshydrogénase (LDH) sont des facteurs pronostiques majeurs.
Chez le chien, ces éléments pronostiques sont retrouvés (à l’exception de l’âge et du taux de LDH).
Dans les deux espèces, la chimiothérapie constitue la pierre angulaire du traitement, et une réponse complète est en général obtenue avec des protocoles de type CHOP. Les rémissions sont dans la plupart des cas de durée limitée.
Chez le chien, la plupart des protocoles sont associés à des médianes de rémission d’environ un an, une “guérison” n’étant observée que chez 15 % des animaux (photo 4). Les protocoles comprennent le plus souvent une phase d’induction intensive durant 1 à 2 mois suivie d’une période d’entretien, et permettent d’observer une réponse complète chez 80 % des animaux [8].
Chez l’homme, les protocoles de chimiothérapie font appel à des doses largement supérieures de molécules (allant de 1,5 à 3 fois la dose administrée chez le chien), à des protocoles plus longs (avec des phases d’induction durant près de 6 mois, sans entretien par la suite). Ce traitement est complété par l’emploi de traitements ciblés de radiothérapie ou de chirurgie, pour les formes localisées, et de traitement d’immunothérapie (notamment d’anticorps anti-CD20, marqueur spécifique des populations lymphoïdes de type B). Près de la moitié des patients traités sont guéris avec les protocoles actuels.
La réalisation d’un traitement de chimiothérapie d’induction plus lourd chez le chien est limitée par des questions de coût, de contraintes liées au traitement et de tolérance. Si près de 90 % des propriétaires sont satisfaits des traitements actuels, une majorité refuse des traitements à l’origine d’effets secondaires trop importants [4]. Le développement de traitements d’immunothérapie (notamment de vaccins antitumoraux) afin de consolider l’effet de la chimiothérapie est très prometteur [6]. L’intérêt du modèle canin de lymphome non hodgkinien en pathologie comparée a d’ores et déjà été confirmé par la réalisation de plusieurs études. Celles-ci visent à démontrer l’intérêt de nouveaux candidats thérapeutiques pour lesquels des essais d’efficacité théorique chez un modèle murin et de toxicité chez le chien sain ont été préalablement réalisés. Ces études ont permis d’établir la pharmacocinétique, les éventuelles effets secondaires et l’efficacité de ces molécules, et optimisé l’initiation de travaux de phase 1 chez des patients.
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