Le monépantel : chef de file d’une nouvelle classe de nématocides - Le Point Vétérinaire n° 307 du 01/07/2010
Le Point Vétérinaire n° 307 du 01/07/2010

ANTIPARASITAIRE OVIN

Infos

FOCUS

Auteur(s) : Éric Vandaële

Fonctions : Le Fougerais
44850 Saint-Mars-du-Désert

Le monépantel est le chef de file des dérivés d’amino-acétonitrile. Son emploi est recommandé une fois par an chez les ovins pour lutter contre la résistance aux autres antiparasitaires.

Novartis commence la commercialisation de sa nouvelle molécule nématocide : le monépantel (Zolvix®). Pour le moment, les indications de cet anthelminthique sont restreintes aux moutons avec pour principal objectif la lutte ou la prévention de l’émergence des résistances aux autres classes antiparasitaires.

Dans le domaine des anthelminthiques, ce lancement mondial est un événement. Car, depuis le lancement du premier endectocide, l’ivermectine, il y a près de 30 ans, aucune nouvelle classe d’antiparasitaires n’avait été découverte et développée dans les productions animales. En effet, les autres lactones macrocycliques (endectocides) comme la doramectine et la moxidectine partagent le même mode d’action.

La résistance antiparasitaire justifie-t-elle la recherche de nouveaux composés ?

Moins bien surveillée et médiatisée que l’antibiorésistance, la résistance aux antiparasitaires se développe chez certains nématodes, principalement chez les petits ruminants (Hæmonchus contortus, Ostertagia circumcincta, Trichostrongylus colubriformis, Cooperia curticei) et les chevaux (cyathostomes ou petits strongles). Des résistances sont notées beaucoup plus rarement chez les bovins.

Dans certains pays, comme en Australie, les taux de résistance rapportés sont très élevés chez les ovins : jusqu’à 90 % avec les benzimidazoles, 70 % avec les endectocides, 80 % avec le lévamisole, etc. En France, les prévalences sont estimées à 83 % avec les benzimidazoles et à 50 % avec le lévamisole (tableau 1).

L’émergence de la résistance chez les ovins représente une difficulté suffisamment sérieuse pour avoir engendré la recherche de nouvelles classes de nématocides présentant des modes d’action différents des précédents et leur développement mondial.

Le monépantel fait partie d’une nouvelle classe d’antiparasitaires : les dérivés d’amino-acétonitrile (AAD) découverte en l’an 2000. Plus de 700 composés de cette classe ont été testés avant de sélectionner le monépantel (figure 1 complémentaire sur www.WK-Vet.fr). Dix ans de recherche et de développement ont donc été nécessaires entre la découverte du nouveau mécanisme d’action et le lancement commercial de Zolvix®. Les essais montrent aussi une bonne efficacité chez les bovins. Mais les résistances antiparasitaires chez les bovins ne justifient pas, pour le moment, ce développement.

De plus, dans le même objectif de lutte contre les résistances, Pfizer annonce aussi un développement en cours chez les ovins d’un nouveau composé, le derquantel, issu d’une nouvelle famille : les spiro-indoles (SI). Les limites maximales de résidus (LMR) de ce nématocide viennent d’être évaluées par l’Agence européenne du médicament. Pfizer annonce son intention de le développer dans une formulation l’associant avec une lactone macrocyclique.

Quel est le nouveau mode d’action du monépantel ?

Le développement de cette molécule est d’abord associé à la découverte d’un nouveau récepteur postsynaptique à acétylcholine appelé MPTL1 (pour monépantel 1). Le monépantel bloque ce récepteur en position ouverte, et provoque la paralysie des nématodes et leur mort. Ce type de mode d’action, par stimulation excessive ou inhibition d’un récepteur et blocage de la transmission nerveuse, est assez courant chez les antiparasitaires. Cependant, dans le cas du monépantel, ce mode d’action agit sur un nouveau récepteur, qui n’était pas la cible de tous les autres antiparasitaires utilisés.

De ce fait, cette molécule est « efficace contre les souches de parasites résistantes aux lactones macrocycliques, aux benzimidazoles, au lévamisole… », souligne l’Agence européenne du médicament, qui a évalué ce nouveau médicament (tableau 2).

Comment lutter contre les résistances avec le monépantel ?

Même s’il a été développé afin de lutter contre les résistances antiparasitaires, le monépantel n’est pas à l’abri de l’apparition de résistances, surtout si son usage devient systématique en remplacement de tous les autres nématocides existants (encadré et figure 2 complémentaire sur www.WK-Vet.fr).

Le monépantel est une arme pour lutter contre les résistances vis-à-vis des autres antiparasitaires, destiné à être employé en complément et en rotation avec ces molécules.

Ainsi, les modélisations mathématiques font apparaître qu’il est possible de retarder de plusieurs années l’émergence des résistances par une rotation des familles d’antiparasitaires. L’introduction d’un seul traitement annuel par le monépantel dans une rotation chez les brebis ou les agneaux permettrait de diminuer le nombre de souches résistantes à tous les antiparasitaires.

La longévité de l’ensemble des antiparasitaires pourrait ainsi en être doublée avant que les (multi)résistances ne posent un réel souci.

Car, pour le moment, peu de multirésistances sont encore observées, sauf en Australie ou au Brésil (60 à 75 % de multirésistances aux benzimidazoles et au lévamisole). Le principe de la rotation des différentes classes d’antiparasitaires avec des modes d’action différents est donc, par exemple, d’éliminer ou de réduire les rares nématodes résistants aux benzimidazoles en employant le monépantel. La rotation des classes augmente ainsi globalement la longévité de tous les antiparasitaires.

Quelles sont les caractéristiques essentielles du monépantel ?

Avec une demi-vie d’environ 5 jours, le monépantel n’est pas rémanent comme les lactones macrocycliques, ce qui évite la longue persistance de concentrations sélectionnantes lors de son élimination. Il n’est pas actif contre les trématodes.

Son temps d’attente est de 7 jours dans la viande, avec une contre-indication d’emploi chez les brebis laitières par absence de LMR dans le lait. En revanche, il n’est pas contre-indiqué chez les brebis en gestation ou en lactation si le lait n’est pas destiné à la consommation humaine.

Dans les études préliminaires d’efficacité, le monépantel s’est révélé aussi efficace par voie orale que par voie parentérale (voie sous-cutanée). À 84 %, les éleveurs de moutons préfèrent les formes buvables (contre 10 % pour la voie injectable). La dose d’emploi par voie orale est de 2,5 mg/kg, soit 1 ml/10 kg.

La forme buvable bénéficie d’une galénique assez originale : il s’agit d’une émulsion buvable stable à 2,5 mg/ml dans un excipient à base d’alpha-tocophérol. Elle ne nécessite pas d’agitation avant emploi, contrairement aux suspensions buvables. Optiline®, le pistolet doseur associé, est aussi inédit ; il s’agit d’un pistolet “en ligne” plus facile d’utilisation.

Zolvix® est présenté en bidons de 1 l à 180 € HT (prix centrale) et de 2,5 l à 440 € (prix HT centrale).

Encadré : Comment lutter contre les résistances antiparasitaires ?

En l’absence de solution alternative, les nématocides sont les seules armes contre ces helminthes. Il convient donc d’en préserver l’efficacité le plus longtemps possible.

La lutte contre les résistances comprend plusieurs actions dont celles ci-dessous.

• Éviter le sous-dosage. Le sous-dosage est l’un des facteurs les plus importants qui contribuent à l’apparition de résistances. Les doses d’emploi devraient donc être alignées sur l’animal le plus lourd. Chez les chèvres, les doses de benzimidazoles et de lévamisole devraient être respectivement 1,5 à 2 fois plus élevées que celles chez les moutons.

• La rotation des anthelminthiques. L’usage fréquent du même anthelminthique (ou d’anthelminthiques de la même classe) augmente la pression de sélection des résistances vis-à-vis de cette famille d’antiparasitaires. L’usage alterné de différents groupes ralentit le développement des résistances (tant que les multirésistances aux différents groupes sont rares).

• Préserver des populations “refuges” sensibles aux antiparasitaires. Seule une partie des parasites, celle présente dans les animaux traités, est exposée aux antiparasitaires et à une pression de sélection des résistances. La population dite “refuge”, celle non exposée aux antiparasitaires comme les œufs et les larves présents dans les pâtures, ne supporte pas de pression de sélection. Les œufs et les larves excrétés des vers résistants seront dilués dans une population refuge sensible si celle-ci est importante. À l’inverse, leur impact sera plus important si cette population est réduite, comme en hiver pour les parasites qui ne supportent pas le froid ou en début de printemps selon la période de pâturage. Les traitements d’été ou d’automne, à des périodes où la population refuge est importante, sont donc moins sélectionnant que ceux de printemps. Il peut ainsi être proposé de ne traiter qu’une partie des animaux lorsque la population refuge est restreinte.

• Éviter la “surprotection”. La pression de sélections est d’autant plus importante que les traitements sont fréquents. L’utilisation de formulations rémanentes peut être associée à une gestion du pâturage. Elles sont plutôt recommandées lors de longues saisons de pâture sur une même parcelle.

• Le traitement préventif à l’introduction des animaux dans un cheptel est conseillé, surtout s’ils proviennent d’une région où la résistance est connue.

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