La curiethérapie : une méthode d’irradiation précise et rapide - Le Point Vétérinaire n° 305 du 01/05/2010
Le Point Vétérinaire n° 305 du 01/05/2010

CANCÉROLOGIE DU CHIEN ET DU CHAT

Infos

FOCUS

Auteur(s) : François Serres*, Dominique Tierny**, Antoine Hidalgo***

Fonctions :
*Clinique vétérinaire, Avenue Paul-Langevin 59650 Villeneuve-d’Ascq
**Clinique vétérinaire, Avenue Paul-Langevin 59650 Villeneuve-d’Ascq
***Clinique vétérinaire, Avenue Paul-Langevin 59650 Villeneuve-d’Ascq

La gestion thérapeutique de la plupart des affections tumorales solides implique la prise en charge simultanée de la lésion primitive et de ses éventuelles extensions à distance.

Lors de phénomène tumoral, le traitement local repose le plus souvent sur un acte chirurgical. Celui-ci est parfois insuffisant, notamment pour des lésions infiltrantes ou mal circonscrites, comme les sarcomes sur sites d’injection (SSI) et les mastocytomes, qui constituent respectivement les tumeurs cutanées les plus fréquemment rencontrées chez le chat et le chien. En dépit d’une d’exérèse chirurgicale “large”, les précautions prises en matière de marges sont souvent insuffisantes, et les récidives fréquentes et précoces. De plus, l’acte chirurgical est parfois irréalisable, en raison de la taille excessive et/ou de la localisation de la lésion. C’est notamment le cas des tumeurs prostatiques, vésicales ou urétrales, et plus généralement de toutes les affections des orifices et des cavités naturelles pour lesquelles une intervention chirurgicale carcinologique ne peut être envisagée sans risque d’altérer la qualité de vie de l’animal.

Radiothérapie externe

La radiothérapie externe (isolée dans un objectif palliatif ou en thérapie adjuvante au traitement chirurgical dans un but curatif) améliore le taux de contrôle tumoral de la plupart des affections citées (mastocytome, SSI, maladie orificielle, etc.). Elle diminue le taux de récidives et augmente les médianes de survie, jusqu’à plusieurs années.

Le principe de la radiothérapie externe consiste en l’administration d’un rayonnement (électrons ou rayons X) à partir d’une source située à l’extérieur de l’animal (figure 1a). Cette méthode permet une irradiation large en surface, et plus ou moins limitée en profondeur. Cependant, elle est très contraignante en durée totale de traitement, car la quantité de rayons délivrés aux tissus sains environnant la tumeur requiert d’espacer les séances et d’administrer des doses faibles à chaque fois, afin de préserver ces structures. Pour le traitement de lésions profondes et inopérables, le recours à la radiothérapie externe nécessite une planification complexe, normalement réalisée à l’aide d’un examen d’imagerie (tomodensitométrique [scanner] ou par résonance magnétique [IRM]), et l’emploi de nombreux champs d’irradiation se croisant au sein de la tumeur.

Curiethérapie

La curiethérapie (ou brachythérapie) présente plusieurs avantages par rapport à la radiothérapie externe. Elle consiste en la mise en place d’une source radioactive (l’iridium 192) au contact de la tumeur ou à proximité immédiate de celle-ci, “à l’intérieur” du corps de l’animal, et ce pour une durée plus ou moins longue.

Deux types de traitement, à bas ou à haut débit de dose, sont possibles (encadré).

Devant une tumeur non opérable, la curiethérapie représente un intérêt, notamment dans la prise en charge des affections concernant les orifices et s’accompagnant de signes marqués. Une lésion de la vessie, de la prostate ou de l’urètre associée à un ténesme ou à une dysurie peut bénéficier d’un traitement palliatif qui a de fortes chances de lever une obstruction urétrale, par exemple.

La définition du volume tumoral représente la principale limite de la curiethérapie. En effet, il est essentiel de circonscrire précisément la masse à traiter et la réalisation d’un examen d’imagerie préopératoire tridimensionnel (scanner ou IRM) est indispensable (photo 4). De même, il convient que la mise en place des cathéters sur le site tumoral ait lieu directement lors de l’exérèse chirurgicale.

Le bilan d’extension est également primordial. La curiethérapie, tout comme la radiothérapie externe et l’exérèse chirurgicale, reste une technique de traitement local du cancer. Le risque métastatique, même lorsqu’il est réputé faible, ne doit pas être négligé.

Les effets secondaires de la curiethérapie sont ceux de tout traitement par irradiation. Il s’agit essentiellement d’une irritation cutanée locale après le retrait des cathéters et d’une repousse retardée du poil, associée à une décoloration dans les mois qui suivent. L’irradiation ralentissant le processus cicatriciel physiologique, il est recommandé de respecter un délai qui permette la cicatrisation des tissus lors de pose de cathéters peropératoires.

L’efficacité de la curiethérapie à haut débit de dose (HDR) n’a pas encore été chiffrée en raison de la relative nouveauté de la technique. L’intérêt de la curiethérapie HDR avec une dosimétrie préalable reste donc à prouver. Des études prospectives sont à mettre en œuvre afin de mieux définir le bénéfice relatif de la curiethérapie HDR par rapport à la radiothérapie externe et les meilleures indications.

La curiethérapie interstitielle requiert une prise en charge précoce et multidisciplinaire, et une collaboration entre les vétérinaires référents, les imageurs, les chirurgiens et les oncologistes (figure 2 complémentaire sur www.WK-Vet.fr). En contrepartie, cette technique permet d’améliorer à la fois les résultats thérapeutiques et le confort de l’animal et de ses propriétaires.

Encadré : Principes de curiethérapie

• Lors de curiethérapie à bas débit de dose, les fils d’iridium sont placés dans le tissu sous-cutané (directement ou au sein de vecteurs creux inactifs) et restent en place en moyenne 4 jours pour délivrer environ 60 Gy. Ces vecteurs sont équidistants (avec un espace de 1 à 2 cm entre chacun) et parallèles. Pour des contraintes de radioprotection, cette technique impose une hospitalisation dans une structure adaptée durant ce délai. Actuellement, elle n’est plus pratiquée en France en médecine vétérinaire.

• Lors de curiethérapie à haut débit de dose (curiethérapie HDR), la source d’iridium 192 circule, pour une durée de quelques secondes à quelques minutes, dans des cathéters mis en place préalablement (idéalement en phase peropératoire) sur ou à proximité du site tumoral (photo 1). La zone irradiée est déterminée par un logiciel, à partir d’un examen d’imagerie (le plus souvent un scanner) réalisé après la pose des cathéters. Les zones “à traiter” et celles “à protéger” sont ainsi déterminées (photo 2). L’irradiation est locale et épargne au maximum les tissus sains environnants, ce qui permet de délivrer la dose totale en quatre à sept fractions (photo 3) selon la nature histologique de la tumeur, avec des intervalles de 12 à 24 heures entre deux doses consécutives. Le traitement complet s’étend sur moins de 2 semaines, à l’issue desquelles les cathéters sont retirés. De plus, la source n’étant pas laissée en place en permanence, il n’existe pas de contrainte de radioprotection pour l’hospitalisation de l’animal.

En plus des cathéters implantés au sein des tissus, d’autres applicateurs ont été développés et permettent de délivrer une irradiation dans différentes cavités. La plupart de ces dispositifs peuvent relever d’applications vétérinaires. Par exemple, des sondes urinaires permettent de réaliser l’irradiation curative de lésions vésicales de carcinomes transitionnels opérés pour lesquels un risque élevé de récidive est présent, en épargnant au maximum les tissus environnants (notamment le côlon).

EN SAVOIR PLUS

Northrup NC, Roberts RE, Harrell TW et coll. Iridium-192 interstitial brachytherapy as an adjunctive treatment for canine cutaneous mast cell tumors. J. Am. Anim. Hosp. Assoc. 2004 ; 40(4): 309-315.

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