L’hyperparathyroïdie primaire chez le chien - La Semaine Vétérinaire n° 1542 du 31/05/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1542 du 31/05/2013

Formation

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : BÉRÉNICE CONVERSY*, CATHERINE LAPOINTE**

Fonctions :
*résidente en médecine interne
**diplomate Acvim, université de Montréal, faculté de médecine vétérinaire, Saint-Hyacinthe

POINTS FORTS

– Une hypercalcémie persistante, associée à une concentration de PTH normale à augmentée, est caractéristique.

– Les symptômes, s’ils sont présents, sont à relier à l’hypercalcémie.

– Trois modalités thérapeutiques existent : la résection chirurgicale, et la nécrose par l’éthanol ou par la chaleur (méthode recommandée).

L’hyperparathyroïdie primaire correspond à une hypersécrétion autonome de l’hormone parathyroïdienne (PTH) par les glandes parathyroïdes (le chien en possède deux paires). La PTH régule la calcémie1 en agissant à plusieurs niveaux (voir schéma). L’hypocalcémie est le principal stimulus de la sécrétion de PTH : une diminution de 2 à 3 % du calcium ionisé (iCa) peut augmenter de 400 % sa sécrétion. L’action de cette parathormone est courte (de l’ordre d’une minute). Une concentration élevée en calcium ou en calcitriol provoque un rétrocontrôle négatif sur la production de PTH.

PATHOGÉNIE

Lors d’hyperparathyroïdie, la glande affectée ne répond pas à cette inhibition. Une hypercalcémie (calcium ionisé) persistante, associée à une concentration de PTH normale à augmentée, est caractéristique de cette dysendocrinie. Il est alors important de s’assurer de l’absence de la PTH-rp (PTH-related protein), qui est exprimée dans certains lymphomes ou adénocarcinomes des glandes apocrines des sacs anaux. La phosphorémie se situe en dessous (65 % des cas) ou dans les valeurs normales basses. Il existe d’autres causes d’hypercalcémie (voir tableau 1).

L’hyperparathyroïdie primaire peut être due à un adénome parathyroïdien solitaire (80 à 85 % des cas), une hyperplasie de la glande, un carcinome ou des adénomes parathyroïdiens multiples (10 %).

SYMPTÔMES

Les principaux signes cliniques manifestés lors d’hyperparathyroïdie sont à relier à l’hypercalcémie (voir tableau 2). Des minéralisations organiques sont également présentes (voir photos). Bien que des urolithiases et des infections urinaires soient parfois observées, les maladies rénales associées sont peu fréquentes.

ÉPIDÉMIOLOGIE

Les chiens affectés sont généralement âgés (moyenne de 11,2 ans). Il n’y a pas de prédisposition sexuelle. Les races les plus représentées sont le keeshond (transmission héréditaire autosomale dominante2), le teckel, le siberian husky et le golden retriever.

LOCALISATION DE LA LÉSION

Le diagnostic de l’hyperparathyroïdie passe par la mise en évidence d’une hypercalcémie (iCa), d’une phosphatémie normale ou basse, d’une concentration en PTH normale ou augmentée, et d’une masse en région cervicale. Si la scintigraphie est la méthode de référence en médecine humaine, l’échographie cervicale par un manipulateur expérimenté permet l’identification de la glande impliquée dans 90 à 95 % des cas. La plupart des adénomes mesurent entre 4 et 6 mm de diamètre. Dans 58 % des cas, une seule glande est touchée.

TRAITEMENT CHIRURGICAL

→ La résection comprend l’exploration cervicale bilatérale des glandes parathyroïdiennes (surfaces ventrale et dorsale). Les glandes affectées, généralement de plus grande taille et de couleur sombre, sont retirées. L’exérèse est recommandée pour les nodules supérieurs à 15 mm, ou s’ils sont bilatéraux. Un test chimio-luminescent de dosage rapide de la PTH permet de vérifier l’efficacité du traitement (diminution supérieure à 50 % de la valeur de base 20 minutes après l’exérèse).

→ La nécrose par la chaleur ou par l’éthanol, échoguidée, chez un animal anesthésié, peut être réalisée par un radiologiste expérimenté (proximité de la carotide et du tronc vago-sympathique). Lors de nécrose par la chaleur, un cathéter monté de 20G, préalablement préparé (retrait d’une partie du plastique de la base du cathéter), est inséré dans le nodule. Une nécrose thermique (10 à 20 W durant 30 à 90 secondes) est observée (tissu hyperéchogène) après avoir mis en contact la base de l’aiguille avec la radiofréquence (générateur électrochirurgical). Le cathéter en plastique joue le rôle de gaine protectrice pour les tissus environnants. Pour la nécrose à l’éthanol (coagulation), une aiguille 27G est insérée dans le tissu anormal. Une réaction locale peut être observée (gonflement de la région laryngée). Le succès, lors de traitement chirurgical, de nécrose par la chaleur ou par l’éthanol, est respectivement de 96 %, 92 % et 87 %. Les effets secondaires, autres que l’hypocalcémie (toux, changement de voix, syndrome de Horner), sont peu fréquents. La nécrose par la chaleur représente une solution alternative à la chirurgie, car il n’y a pas de différence significative au niveau du pronostic chez les chiens traités par ces deux modalités. La réussite des traitements échoguidés est corrélée à l’expérience du praticien. Pour la plupart des chiens, la calcémie se normalise en 48 heures lors d’exérèse, et jusqu’à six jours en cas de traitement par la chaleur. Vu les effets secondaires liés à l’injection d’éthanol, la nécrose thermique est préférée. Quelle que soit la nature de la masse parathyroïdienne, le taux de rechute est d’environ 10 %. Supplémenter l’animal en calcium ou en calcitriol avant l’intervention chirurgicale n’est pas recommandé.

TRAITEMENT MÉDICAL

Un traitement médical peut être mis en place avant l’option chirurgicale, thermique ou chimique lorsque le produit Ca x P est supérieur à 70, ou lorsque des signes cliniques d’hypercalcémie sont présents (inappétence, léthargie, bradycardie, symptômes neurologiques).

La fluidothérapie (NaCl à 0,9 %) diminue la calcémie en favorisant l’excrétion calcique, et maintient la perfusion rénale. Une perfusion continue de furosémide favorise la calciurie. Les glucocorticoïdes aident la calciurie, diminuent l’absorption intestinale de calcium et inhibent la résorption osseuse de calcium. Ils peuvent être administrés si le traitement chirurgical, thermique ou chimique n’est pas envisageable pour les propriétaires, afin de limiter les effets délétères de l’hypercalcémie.

Les bisphosphonates inhibent l’activité ostéoclastique et la résorption osseuse, mais leur utilisation est plutôt recommandée lors d’hypercalcémie secondaire à un néoplasme ou en cas d’hypercalcémie sévère occasionnant des signes cliniques. La calcitonine est préconisée lors d’intoxication à la vitamine D (diminue l’activité ostéoclastique). Le calcitriol n’a pas d’effet sur le tissu responsable de l’hyperparathyroïdie primaire. Le cinacalcet, un calcimimétique qui se lie aux récepteurs calciques sur le tissu parathyroïdien anormal, peut réduire la libération de PTH. Ce produit n’a toutefois pas été évalué chez le chien. Des effets gastro-intestinaux sont rapportés en médecine humaine.

SUIVI

Après le traitement chirurgical, une hypocalcémie est parfois notée (au cours des sept jours qui suivent le traitement), le temps que les autres glandes regagnent leur fonction. Il est alors recommandé de doser l’iCa quotidiennement durant les sept jours suivant la procédure, puis deux semaines, trois mois et six mois plus tard. Des manifestations cliniques sont présentes dans 11 % des cas d’hypocalcémie (fasciculations, crises épileptiformes, changement de comportement, anorexie, tachycardie, etc.) et s’estompent dès la mise en place de traitements appropriés.

Le traitement consiste en l’administration à effet de gluconate de calcium 10 % (0,5 à 1,5 ml/kg pendant 10 à 20 minutes, par voie intraveineuse, sous contrôle électrocardiographique) ou de carbonate de calcium (25 à 50 mg/kg/j, per os). Un traitement à base de calcitriol (2 à 10 ng/kg deux fois par jour) peut également convenir. Le sevrage de ces traitements s’effectue graduellement, sur une période de deux à quatre mois.

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