Proposition d’une démarche harmonisée lors d’avortements répétés chez les petits ruminants - La Semaine Vétérinaire n° 1521 du 21/12/2012
La Semaine Vétérinaire n° 1521 du 21/12/2012

Formation

PRODUCTIONS ANIMALES/OVINS/CAPRINS

Auteur(s) : Renée de Crémoux*, Lorenza Richard**

Fonctions :
*Institut de l’élevage. Article tiré de la conférence présentée lors de la 27e journée technique du GTV Bourgogne à Autun (Saône-et-Loire) le 25 octobre 2012.

Le critère d’alerte retenu pour mettre en œuvre un diagnostic différentiel chez les petits ruminants est de trois avortements au minimum en sept jours ou moins. La recherche de la brucellose demeure toutefois obligatoire dès la survenue du premier avortement. Une évolution de la définition de ce terme est envisagée : est considérée comme un avortement possiblement infectieux l’expulsion d’un fœtus, d’un animal mort-né ou qui succombe dans les 12 heures suivant la naissance, à l’exclusion des avortements d’origine manifestement accidentelle.

Vers une démarche de diagnostic différentiel

La conduite diagnostique à tenir pour identifier les agents pathogènes responsables et les examens de laboratoire à mettre en œuvre restent à préciser pour les praticiens. « Un ensemble d’analyses menées chez plusieurs animaux permet l’interprétation d’une combinaison de résultats. Il s’agit d’un diagnostic de groupe pour lequel un protocole commun sera proposé aux praticiens », indique Renée de Crémoux, de l’Institut de l’élevage.

Ainsi, un groupe de travail1 se penche actuellement sur l’élaboration d’une démarche de diagnostic différentiel des avortements répétés chez les petits ruminants, afin de proposer aux vétérinaires une approche opérationnelle, cohé­rente et harmonisée. Ce protocole s’inscrit dans le prolongement du projet d’évolution de la définition de l’avortement infectieux en fin de gestation, qui « intègre les petits ruminants, écarte les mortalités au-delà de 12 heures et les avortements accidentels, et par conséquent améliore la spécificité de la surveillance et la mobilisation des éleveurs », précise la confé­rencière.

Un diagnostic de groupe par exclusion

La démarche diagnostique envisagée propose de rechercher en priorité les agents avec un rôle abortif avéré les plus fréquemment incriminés et dont l’impact zoonotique et/ou économique est important. Ainsi, en première intention, sont recherchées la fièvre Q, la chlamydiose et la toxoplasmose, communes aux ovins et aux caprins. Éventuellement, selon la région et le contexte épidémiologique, la salmonellose et la border disease peuvent également l’être chez les ovins. Des résultats négatifs sont valorisables auprès des éleveurs pour l’élaboration de plans de maîtrise pertinents. L’exclusion des maladies de première intention laisse la place à une recherche de seconde intention, qui varie suivant le contexte épidémiologique et clinique (origine bactérienne, mycosique, virale, parasitaire, toxique, accidentelle, médicamenteuse, etc.).

Pour l’ensemble de la démarche diagnostique, l’idée est de disposer d’emblée d’un panel d’échantillons, qui seront conservés par le laboratoire et analysés au fur et à mesure de l’exclusion des agents recherchés. Écouvillon vaginal, placenta (houppes cotylédonaires) et organes d’avorton permettent d’établir un diagnostic direct, qu’il s’agisse d’analyses bactériologiques ou de polymerase chain reaction (PCR). Cette dernière peut, le cas échéant, être quantitative (dans le cas de la fièvre Q). En effet, l’interprétation des analyses sérologiques est parfois délicate en raison du délai de mise en place de la réponse humorale, de la difficulté à évaluer l’ancienneté d’une infection, et de l’existence de formes asymptomatiques d’infections. « Le diagnostic de groupe trouve ici tout son intérêt : seule une analyse sérologique pratiquée chez plusieurs animaux est interprétable », précise Renée de Crémoux. Le diagnostic indirect intervient donc essentiellement en complément du diagnostic direct. L’accent est mis sur la mise en évidence d’une circulation récente des agents infectieux, d’où le recours, selon les cas, à l’analyse des séroconversions (ou augmentations significatives des titres sérologiques), à des techniques de séro-agglutination ou à des analyses chez des animaux sentinelles. Une éva­luation de la séroprévalence du cheptel permet parfois de mieux cibler les mesures de maîtrise envisageables.

Proposition d’une boîte de prélèvements standard

Le principe d’une boîte standardisée de prélèvements est proposé aux praticiens pour faciliter leur réalisation. En l’état actuel des réflexions du groupe de travail, elle comprendrait neuf écouvillons stériles en coton, des sachets étanches pour les houppes placentaires et le(s) organe(s) d’avorton, des tubes secs pour le prélèvement de liquide stomacal de(s) avorton(s) et une quinzaine de tubes destinés aux analyses sérologiques. Cette boîte devra répondre à la norme de transport du matériel biologique en respectant les conditions d’acheminement sous couvert du froid dans les 48 heures.

Un recueil complet des commémoratifs doit accompagner les prélèvements. L’épisode abortif est à décrire de façon précise (début, nombre d’avortements en relation avec le nombre de femelles ayant mis bas, population affectée, autres problèmes observés au sein du cheptel). Sur le plan épidémiologique, il est également intéressant de retracer les contacts avec d’autres cheptels et les mouvements d’animaux au cours des six mois précédant l’épisode abortif. Les vaccinations pratiquées doivent être notées, en précisant si le protocole vaccinal a été respecté, ainsi que les éventuels traitements administrés. De plus, les épisodes abortifs et de mortinatalité antérieurs, ainsi que le statut du cheptel vis-à-vis des maladies infectieuses, sont à détailler. Enfin, les aspects cliniques complémentaires sont essentiels pour orienter le diagnostic et envisager les recherches de première ou de seconde intention.

La conférencière rappelle toutefois que, quels que soient les résultats des tests, les conclusions sont toujours subordonnées à la qualité des échantillons et à leur nature, ainsi qu’au nombre d’animaux positifs. De plus, si plusieurs agents infectieux circulent dans l’exploitation, il est difficile de hiérarchiser leur implication dans l’épisode abortif observé.

Des arbres décisionnels concernant les maladies de première intention sont en cours d’élaboration et seront prochainement proposés aux praticiens. Ils devraient permettre de déterminer si une circulation récente de chlamydiose, de fièvre Q, de toxoplasmose ou encore de border disease ou de salmonellose peut être mise en évidence, si ces agents sont impliqués dans tout ou partie des avortements observés, ou encore si leur implication, sans être exclue, est toutefois peu probable.

  • 1 Le groupe de travail chargé d’apporter ce service aux praticiens est piloté par l’Institut de l’élevage dans le cadre de l’unité mixte technologique “santé des petits ruminants” (UMT SPR), en collaboration avec l’ENV de Toulouse, avec un partenariat national, régional et départemental (GDS France, SNGTV, laboratoires d’analyses, Races de France, etc.) et l’appui scientifique et technique de l’Anses.

  • 2 Note de service du 11/9/2012 (DGAL/SDSPA/N2012-8188).

PRÉLÈVEMENTS DANS LE CADRE DE LA SURVEILLANCE DE LA FIÈVRE Q

La Direction générale de l’alimentation décrit2 un protocole de surveillance événementielle de la fièvre Q encadré par l’État et mené dans dix départements pilotes (Aveyron, Deux-Sèvres, Finistère, Hautes-Alpes, Indre-et-Loire, Loire, Mayenne, Nièvre, Pyrénées-Atlantiques et Saône-et-Loire).

Une sérologie et des écouvillons vaginaux sont réalisés chez toute chèvre ou brebis ayant avorté dans les huit jours pour le dépistage de la brucellose sur l’ensemble du territoire. Dans les dix départements, en cas d’avortement répété (seuil de trois au minimum en sept jours ou moins) et une fois la brucellose écartée, des analyses PCR individuelles ou de mélange sont en outre menées pour la quantification de Coxiella burnetii. Dix prises de sang doivent également être effectuées chez des femelles primipares et plus âgées ayant présenté des troubles de la reproduction.

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