Que représente pour vous l’entraide vétérinaire ?

Ne rien attendre en retour

Véronique Bianchetti, présidente de l’Association centrale d’entraide vétérinaire (ACV).

Les difficultés, voire la détresse, n’épargnent personne. Pas plus les vétérinaires que les autres. Notre association, depuis environ 120 ans, est à l’écoute de ceux qui sont dans le besoin. À l’origine, elle s’attachait à couvrir les risques liés à l’absence de protection sociale, d’assurances professionnelles. Aujourd’hui, elle supplée autant qu’elle le peut aux maigres retraites de certaines veuves âgées; elle aide des confrères en exercice et leur famille affectés par les accidents de la vie (divorce, séparation d’avec les associés, clientèle insuffisante, etc.). Depuis 5 ans, elle complète les bourses de certains étudiants vétérinaires ayant peu de moyens et qui nous sont présentés par les directeurs des écoles. Tout cela est possible grâce aux legs reçus par l’association, qui est reconnue d’utilité publique, et à ses 1 400 membres. Mais il devient difficile de mobiliser. Chacun est submergé par ses propres soucis et ne perçoit pas toujours les vertus de la solidarité. Mes activités ordinales, pendant de nombreuses années, m’ont sans doute portée à y prêter davantage attention. Aujourd’hui, en faisant entrer les présidents des cercles d’élèves des écoles vétérinaires, nous essayons de sensibiliser les étudiants. De leur faire comprendre, aussi, que ce type d’implication ne peut être que désintéressée. Pour être efficace, il ne faut rien attendre en retour.

Une question, sans doute, de morale personnelle

Philippe Mélon, membre de l’Association centrale d’entraide vétérinaire (ACV) et de l’Association confraternelle des vétérinaires de la région parisienne (ACVRP).

J’étais encore à l’école vétérinaire lorsqu’un professeur nous a sensibilisés à l’entraide dans la profession. Il nous a expliqué la raison d’être de l’ACV, évoquant la détresse de familles confrontées au malheur. C’est malheureusement encore aujourd’hui le cas quand des confrères sont insuffisamment assurés ou ne font pas le nécessaire pour couvrir leurs proches, le cas échéant, du moins pour les affranchir, dans un premier temps, de soucis financiers. Je dois reconnaître qu’au début je me suis contenté de payer ma cotisation à cette association. Mais il y a une dizaine d’années, tandis que j’exerçais des responsabilités au Syndicat des vétérinaires de la région Paris-Île-de-France (SVRP), on m’a demandé de participer à son conseil d’administration. J’ai accepté avec plaisir et en m’impliquant davantage, j’ai pu mieux percevoir la réalité de situations dont on parle peu. En lien avec la caisse de retraite et avec l’Association française de la famille vétérinaire (AFFV), nous tentons d’apporter des réponses concrètes, notamment par le biais de compléments de pension ou de bourses pour les jeunes. Aider les autres est pour moi une question, sans doute, de morale personnelle. Dans la mesure où je dispose de ce dont j’ai besoin, cela m’apparaît naturel. Un jour, peut-être, je serai heureux de bénéficier d’un soutien à mon tour.

D’abord rompre l’isolement

Édith Beaumont, présidente de l’association Vétos-Entraide

L’entraide se caractérise généralement par un soutien financier. Ce n’est pas le cas de notre association. Elle a pour objectif de prévenir le mal-être professionnel et de renforcer le lien entre les vétérinaires. Sa création, en 2002, a fait suite à plusieurs suicides survenus dans notre profession et notre volonté a tout d’abord été de rompre l’isolement, de permettre à ceux qui le souhaitent de pouvoir s’exprimer eux-mêmes dans une atmosphère bienveillante, confidentielle. Tout membre de la communauté des vétérinaires et de leurs familles peut ainsi entrer directement en contact, en permanence, avec l’un des 12 écoutants actuels, tous bénévoles et formés à cet exercice. Les coordonnées pour nous joindre figurent sur notre site (vetos-entraide.com), la vitrine de notre association. Chacun y trouvera des informations utiles, des réflexions et des témoignages sur de nombreuses causes possibles de mal-être : divorce, décès, deuil, découvert bancaire, modalités pratiques de remplacement, changement professionnel, conséquences de l’acte d’euthanasie, gestion des impayés, incivilités, etc. Avec 270 inscrits, notre liste de discussions sur Internet est un lien social fondamental de Vétos-Entraide. Son succès témoigne d’une notoriété que le bouche-à-oreille contribue à étendre. Nous avons traité une cinquantaine d’appels cette année.