Vers une moindre exposition aux rayonnements ionisants - La Semaine Vétérinaire n° 1495 du 11/05/2012
La Semaine Vétérinaire n° 1495 du 11/05/2012

Radioprotection

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Auteur(s) : CLARISSE BURGER

Si les progrès en radioprotection sont quantifiables, l’implication des structures vétérinaires en la matière et dans la gestion de la sécurité demeure insuffisante.

Dans l’ambiance feutrée de l’Académie vétérinaire de France, la commission de radioprotection a fait le point, le 3 mai dernier, sur les pratiques vétérinaires et sur la réglementation. Elle a commencé par rappeler la définition de la radioprotection, qui figure sur le site de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) : «  C’est l’ensemble des règles, des procédures, des moyens de prévention et de surveillance visant à empêcher ou à réduire les effets nocifs des rayonnements ionisants sur les personnes et l’environnement. »

En France, cette notion est consacrée par la loi, puisqu’elle est inscrite dans les Codes du travail et de la santé publique et, aujourd’hui, dans le Code de l’environnement. En pratique vétérinaire, plusieurs types de personnes sont concernés par la radioprotection : cela va des personnels d’entretien aux travailleurs salariés ou non en clinique et en cabinet, aux travailleurs ou au public des haras, en passant par les étudiants, les propriétaires d’animaux, etc. Mais les règles de sécurité sont-elles toujours correctement appliquées ?

Des pratiques vétérinaires modifiées

En matière de radioprotection, la commission décèle 2 types d’effets – déterministes et aléatoires – qui concernent potentiellement les personnes exposées aux rayonnements ionisants. Les premiers surviennent à court terme et leur gravité est proportionnelle à la dose reçue, tandis que les seconds interviennent à long terme avec une fréquence d’apparition relative à la dose reçue.

L’an dernier, la Commission internationale de la protection radiologique (CIPR) a communiqué sur des « effets déterministes » qui surgissent à long terme, a posteriori et non à court terme, avec des « réactions tissulaires » induites. Des effets sur le cristallin et sur les tissus cardiaques et vasculaires sont ainsi signalés. Cela a fait évoluer de façon significative les normes de protection : la limite équivalente de dose de rayonnements ionisants recommandée pour l’œil est abaissée et passe de 150 mSv à 20 mSv par an. Les vétérinaires canins, lorsqu’ils maintiennent de petits animaux en étant proches du faisceau, ou les praticiens équins, lorsqu’ils réalisent des bilans pénalisants, sont concernés par ces risques. Ils devront ainsi songer, selon Catherine Roy, vétérinaire et experte auprès de l’ASN, soit à porter des lunettes de protection, soit à s’éloigner de la source de rayonnements, à sédater l’animal, à s’équiper d’une potence et de porte-cassettes, etc. En termes de radiobiologie, la pratique vétérinaire est surtout confrontée aux effets des doses faibles, donc aléatoires. Toutefois, la nouvelle limite relative au cristallin modifiera sans doute les pratiques et influera sur les équipements.

Une exposition aux rayons non optimisée

Des études ont été menées pendant 3 mois en équine sur 5 types d’activités (pratique ambulatoire, activité clinique classique et référée, ventes de chevaux de selle et de galop). Résultats : aucune dose poitrine n’est mise en évidence si les acteurs qui opèrent au générateur, à la tête et à la cassette sont équipés de tabliers plombés.

En activité ambulatoire classique, lorsque l’opérateur porte des gants et qu’il utilise systématiquement des porte-cassettes ou des pinces pour prendre surtout des clichés d’extrémités distales avec un générateur mobile, la dose d’exposition aux rayonnements est inférieure au seuil d’enregistrement (soit 0,1 mSv) pour les dosimètres poignets et bagues. En revanche, lors des bilans pénalisants avec des clichés d’extrémités proximales (grasset) ou de dos (donc des clichés avec une diffusion importante des rayons), les doses sont de l’ordre du millisievert sur les mains du praticien qui tient le générateur. Si celles de la personne qui tient la cassette se trouvent dans le faisceau primaire, même équipées de gants, elles sont exposées également.

L’énergie dans le faisceau primaire est 1 000 fois supérieure à celle située hors du faisceau. Si l’opérateur est protégé dans ce cas de figure, l’unité d’exposition est divisée par 2. Se trouver hors du faisceau avec une protection permet de diviser le risque par 40 ! Autrement dit, la protection dans le faisceau n’est pas suffisante. «  Il faudrait surtout ne pas y mettre les mains et porter des lunettes plombées au poste cassette, voire au générateur, lorsque les clichés génèrent du diffusé !  », a insisté Catherine Roy.

Parallèlement, des études expérimentales de dosimétrie sur des sites de scintigraphie (au Cirale1, à Chantilly) et sur d’autres utilisant des arceaux d’interventionnel (ENV d’Alfort et de Lyon, Grosbois) sont en cours. Les résultats définitifs seront dévoilés à la fin de l’année.

Un bilan mitigé des structures

Force est de constater que les inspections de radiothérapie menées en 2010 auprès de 900 structures vétérinaires affichent un bilan mitigé, avec des points positifs et négatifs. Ainsi, Catherine Roy relève un bon retour de la campagne d’inspection du travail en 2010, puisque 80 % des cabinets et des cliniques visités sont équipés d’un dosimètre (appareil qui donne le niveau d’exposition aux rayonnements ionisants). Les professionnels sont majoritairement formés à cette pratique : 63 % des structures inspectées ont bénéficié d’une vraie formation sur la radioprotection avec une personne certifiée (PCR) désignée, alors que les visites étaient annoncées dans 78 % des cas… En revanche, l’implication des structures en matière de radioprotection et dans la gestion de la sécurité reste insuffisante. Ainsi, des points négatifs ont été décelés lors de cette campagne : si 52 % des structures inspectées n’ont pas effectué le contrôle technique du générateur, nul doute que l’allégement de la périodicité à un mode triennal en activité de déclaration fera évoluer positivement ce score. En revanche, 51 % n’ont pas déposé leurs dossiers de déclaration/autorisation : si la gestion administrative semble chronophage pour le praticien, les modèles de documents types mis à sa disposition ne peuvent que faciliter leur mise en œuvre. Par ailleurs, peu de plans de prévention sont mis en place pour faire face aux risques de coactivité. Une campagne de sondage 2012, qui cible la pratique équine, est en cours au niveau national. En Picardie, un groupe de travail qui réunit l’Avef2, l’ASN et la DGT3 étudie un projet de bonnes pratiques en radioprotection.

Vers des évolutions réglementaires

Par ailleurs, les retours de terrain sur les contrôles internes de générateurs mobiles low cost en pratique équine révèlent des risques non négligeables, avec des fuites de rayonnements qui, si elles semblent respecter des normes de fabrication, ne répondent pas au principe Alara4 de moindre exposition possible… Un cahier des charges pour les fabricants est en cours d’élaboration à l’ASN. Il permettra de ne proposer sur le marché que des appareils parfaitement adaptés à l’activité équine, où le générateur est souvent tenu à la main, voire sur l’épaule… À l’échelle européenne, une nouvelle directive cadre Euratom est en préparation. Elle impliquera une refonte des 5 directives actuelles en une seule, prévue en 2016. 2 notions innovantes ciblent les compétences des travailleurs qualifiés en charge de la radioprotection : le radioprotection officer (RPO) et le radioprotection expert (RPE). En France, seule une personne compétente en radioprotection est définie dans les textes réglementaires. L’ASN et la DGT ont entamé une démarche de révision des textes relatifs à la formation des PCR et au zonage. D’ici à la fin de l’année, un nouvel arrêté de formation PCR devrait voir le jour et le groupe de travail des experts permanents missionnés par l’ASN rendra son rapport sur les études menées en France et au niveau international sur la méthodologie du zonage. Affaire à suivre.

L’impact de la réglementation nationale

→ 17 122 porteurs de dosimètres passifs en 2010 versus 4 098 en 2002.

→ 341 autorisations et 1 616 déclarations déposées auprès de l’Autorité de sûreté nucléaire en avril 2012 versus 100 autorisations en 2006.

→ 4 132 praticiens ayant suivi une formation PCR (soit 80 % des 5 214 structures vétérinaires avec une PCR interne).

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