Tableau clinique et lésionnel de la paratuberculose chez la chèvre - La Semaine Vétérinaire n° 1487 du 16/03/2012
La Semaine Vétérinaire n° 1487 du 16/03/2012

FORMATION

PRODUCTIONS ANIMALES/CAPRINS

Auteur(s) : KARIM ADJOU*, ÉMILIE BRIOT**

SIGNES CLINIQUES

La maladie clinique apparaît rarement avant l’âge de 1 an. Elle se rencontre couramment chez des animaux de 2 à 3 ans. Son expression est provoquée par un stress : la mise bas ou l’introduction au sein d’un nouveau troupeau suffisent.

Les bêtes atteintes de paratuberculose perdent progressivement du poids. Ce phénomène est susceptible de durer plusieurs semaines, voire plusieurs mois, et d’évoluer vers une émaciation dramatique.

L’appétit persiste au début de l’évolution clinique, puis décroît. Les animaux deviennent abattus et léthargiques. Une toison sèche et hirsute et une peau écailleuse sont communes.

Contrairement aux bovins, les caprins présentent rarement une diarrhée aqueuse persistante, sauf exceptionnellement en phase terminale de la maladie. Dans ce cas, la diarrhée peut être liée à un parasitisme intercurrent et, parfois, à une conséquence directe de la paratuberculose. Des fèces pâteuses (comme celles des chiens) peuvent être observées de manière intermittente chez certains animaux. Cependant, des matières fécales normales sont, en général, notées.

La nature non spécifique de ces signes rend le diagnostic impossible par la seule observation clinique. Le diagnostic définitif de paratuberculose requiert des tests sérologiques ou bactériologiques, ainsi qu’un examen histologique des tissus.

MODIFICATIONS BIOLOGIQUES

Au cours de l’évolution de la maladie, une anémie modérée est susceptible de se développer. Des manifestations cliniques d’hypoprotéinémie, comme un œdème intermandibulaire, peuvent être notées. Toutefois, elles ne sont pas spécifiques de la paratuberculose.

L’hypoprotéinémie observée se caractérise surtout par une hypoalbuminémie. Une neutrophilie est possible, indicatrice d’un phénomène inflammatoire ou infectieux chez les animaux atteints.

TABLEAU LÉSIONNEL

Les lésions macroscopiques et microscopiques de la para­tuberculose caprine sont bien décrites.

Sur le plan histologique, la maladie provoque des lésions granulomateuses caractéristiques au niveau du tractus intestinal, des nœuds lymphatiques et, parfois, du foie. Les tissus prélevés pour l’examen histologique doivent contenir au moins une portion de la jonction iléocæcale et un nœud lymphatique adjacent, l’iléon, le côlon spiralé et un autre nœud lymphatique.

Les lésions se classent en 4 groupes :

→ des lésions focales, qui consistent en une granulomatose au niveau des plaques de Peyer iléocæcales ou de la lamina propria adjacente ;

→ es lésions diffuses multibacillaires, qui consistent en une entérite granulomateuse à différents niveaux de l’intestin. De nombreux macrophages contenant des mycobactéries sont retrouvés. Ces lésions sont le plus souvent localisées en regard de l’apex des villosités ;

→ des lésions diffuses lymphocytaires où sont identifiées comme cellules majoritaires des lymphocytes. Les quelques macrophages présents contiennent peu de mycobactéries ;

→ des lésions diffuses mixtes où l’infiltrat est composé de lymphocytes et de macrophages, mais avec fort peu de mycobactéries.

Les 3 sortes de lésions diffuses sont souvent associées à une nécrose des vaisseaux lymphatiques de la muqueuse, du mésentère et des nœuds lymphatiques. L’épaississement est plus marqué au niveau du jéjunum qu’à celui de l’iléon. À la suite d’une culture bactérienne, Mycobacterium avium subsp. paratuberculosis est présent dans 69 % des cas de lésions diffuses et dans 44,4 % des cas de lésions focales.

TRAITEMENT

Il n’existe pas de traitement curatif spécifique efficace de la paratuberculose. Il est toujours préférable d’éliminer les animaux atteints afin de limiter la propagation de la maladie. Le traitement est peu efficient et extrêmement coûteux. Des antibiotiques variés, ciblés contre les mycobactéries, ont été utilisés avec peu d’efficacité chez les caprins. Les thérapies infructueuses incluaient l’usage de l’isoniazide seul, en association avec la rifampicine, en association avec l’éthambutol, ou encore la conjugaison des 3 antibiotiques.

Le recours aux vaccins est rare pour plusieurs raisons.

→ Les animaux vaccinés contre cette bactérie sont susceptibles de développer une réaction croisée vis-à-vis des tests classiques de la tuberculose, ce qui complique l’interprétation de ces derniers, donc les procédures d’éradication de cette maladie. La vaccination contre la paratuberculose est par conséquent restreinte dans les pays où la tuberculose est toujours endémique ; elle est interdite aux États-Unis. En France, seules des situations particulières donnent lieu à une autorisation d’importer des doses vaccinales (Corse).

→ Les vaccins, à germes vivants ou tués, réduisent la mortalité, l’incidence clinique et l’excrétion, mais partiellement. Les protocoles de contrôle de la maladie autorisant le recours au vaccin ont vu leurs résultats amoindris dans les années qui ont suivi l’arrêt de la vaccination, notamment en Australie.

→ Un nodule granulomateux postvaccinal au site d’injection chez l’animal est courant. Il est essentiellement lié à la nature de l’adjuvant. En cas d’injection accidentelle chez l’homme, un granulome important et persistant se développe.

Bibliographie

  • Casamitjana P., 2002 : « Diagnostic d’un foyer de paratuberculose au sein d’un élevage caprin », Bull. GTV hors série “Paratuberculose des ruminants”, 85-87.
  • Siguroardottir OG., Bakke McKellep AM., Djonne B., Evensen O., 2005 : « Mycobacterium avium subsp. paratuberculosis enters the small intestinal mucosa of goat kids in areas with Peyer’s patches as demonstrated with the everted sleeve method », Comp. Imm. Microbiol. Inf. Dis. 28, 223-230.
  • Goudswaard J., 1971 : « Studies on the incidence of Mycobacterium johnei in the organs of experimentally infected goats », J. Vet. Sci. 4, 65-75.
  • Stewart DJ., Vaughan JA, Stiles PL., Tizard MLV., Prowse SJ., Michalski WP., Butler KL., Jones SL., 2006: « A long-term study in Angora goats experimentally infected with Mycobacterium avium subsp. paratuberculosis : clinical disease, faecal culture and immunological studies », Vet. Microbiol . 113, 13-24.
  • GW. Thomas, 1983 : « Paratuberculosis in a large goat herd », Vet. Rec. 113, 464-466.
  • Corpa JM., Garrido J., Garcia Marin JF., Perez V., 2000 : « Classification of lesions observed in natural cases of paratuberculosis in goats », J. Comp. Path. 122, 255-265.

L’ESSENTIEL DE LA PARATUBERCULOSE CAPRINE

→ Étiologie

Mycobacterium avium subsp. paratuberculosis

→ Répartition géographique

Mondiale

→ Signes cliniques

– amaigrissement chronique chez des animaux de plus de 2 ans consécutif à un stress ;

– cas juvéniles : faiblesse et diarrhée ;

– diarrhée très rare.

→ Lésions

– Peu de lésions macroscopiques : émaciation du cadavre, possible épaississement au niveau des intestins ;

– histologie : lésions granulomateuses au niveau des intestins, des nœuds lymphatiques mésentériques et du foie.

→ Diagnostic

– tests sérologiques (Agid, PCR, Elisa) ;

– tests bactériologiques (coproculture) ;

– tests sur le lait (culture bactériologique, Elisa, polymerase chain reaction) ;

– examen histologique (prélèvement devant contenir la jonction iléocæcale, un nœud lymphatique adjacent, l’iléon, le côlon spiralé et un autre nœud lymphatique).

Il est nécessaire d’associer 2 tests car aucun n’est assez sensible ni spécifique.

→ Traitement

Il n’existe pas de traitements applicables en raison de leurs coûts.

→ Prévention

Mesures hygiéniques :

– identification (coproculture, Agid) et élimination des individus infectés ;

– réduction du taux d’infection chez les jeunes animaux (séparation précoce des jeunes de leur mère, contrôle des aliments lactoremplaceurs et fourrages) ;

– la vaccination (vaccin vivant atténué adjuvé) est rare, car elle interfère avec le dépistage de la tuberculose (elle s’effectue sous réserve d’une autorisation d’importation en France).

LÉSIONS MACROSCOPIQUES CHEZ LES CAPRINS

→ Une émaciation importante du cadavre est toujours retrouvée, mais la persistance de graisse mésentérique est observée chez la chèvre, même si l’état général de l’animal est très mauvais. Une calcification de l’aorte est possible chez les animaux en phase clinique depuis un temps assez long, bien que la pathogénie de cette lésion ne soit pas connue.

→ Quand des lésions macroscopiques intestinales sont visibles chez les caprins, il s’agit le plus souvent d’un épaississement focal ou diffus ou d’un œdème de l’iléon, du cæcum ou du côlon spiralé. Chez les bovins, la muqueuse intestinale est épaissie et plissée (comme un accordéon).

→ Les nœuds lymphatiques adjacents peuvent être hypertrophiés et œdémateux, mais des nœuds lymphatiques caséeux avec une calcification focale (voir photo ci-dessous) sont moins souvent observés chez les caprins que chez les bovins.

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