Comment Oniris a harmonisé les pratiques de biosécurité - La Semaine Vétérinaire n° 1730 du 09/09/2017
La Semaine Vétérinaire n° 1730 du 09/09/2017

REPORTAGE

ACTU

Auteur(s) : TEXTE ET PHOTOS DE FRÉDÉRIC THUAL  

Stupéfaite d’avoir perdu, en 2014, son approbation délivrée par l’association AEEEV, l’école vétérinaire nantaise Oniris a engagé une profonde démarche pour mettre en œuvre et harmoniser les bonnes pratiques de biosécurité. Une action validée, en juin dernier, par l’obtention de l’accréditation européenne de l’AEEEV.

Aujourd’hui, il ne viendrait plus à l’idée de qui que ce soit d’amener son chien au bureau… », assure Anne Gogny, praticienne hospitalière et co-auteur du Guide des pratiques de biosécurité applicables au CHUV d’Oniris. Les pratiques d’hier n’ont plus cours aujourd’hui, et depuis la profonde réorganisation mise en place à l’école nantaise pour obtenir son accréditation AEEEV1, difficile, désormais, d’ignorer qu’il est interdit de pénétrer sans précaution dans une zone matérialisée par deux barres rouges au sol, qu’il faut porter telle ou telle tenue pour tel ou tel acte, isoler un chat venu en consultation au CHUV pour une toux suspecte et ne pas utiliser les extincteurs comme des porte-blouses. Un peu partout, des lave-mains, remplis et en fonctionnement, accompagnent le parcours de l’étudiant, de l’enseignant ou du visiteur. Et avec eux des fiches détaillent les techniques de lavage des mains. De 30 secondes à une minute pour un lavage classique. De deux à trois minutes avant et après une intervention chirurgicale. Avec des gestes minutieusement étudiés. « Le lavage des mains, c’est la base de l’hygiène. Indispensable pour éviter la transmission de bactéries, et la contamination, car précisément, c’est bien dans un centre hospitalier que l’on rencontre le plus d’agents infectieux », souligne Jean-Michel Cappelier, professeur en sécurité des aliments, vérificateur du guide lourd de quelque 140 pages, qui a nécessité la participation de plus d’une cinquantaine de contributeurs. Y sont référencées 148 procédures pour protéger les animaux et les personnes. « Nous nous sommes attachés à harmoniser et référencer les pratiques dans les blocs de chirurgie, de reproduction et d’urgence pour les animaux de compagnie, fréquentés et utilisés par plus d’une dizaine de services. Certains, comme le bloc chirurgie, étaient plus à jour, d’autres, comme la reproduction, plus en retard », explique Anne Gogny. Chacun essayait de faire pour le mieux. Mais les tentatives sporadiques, fondées sur les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) depuis sept à huit ans, relevaient plus d’une pratique empirique et désordonnée. « Du bricolage ! », concèdent les auteurs du guide. Et ce n’est pas l’association européenne AEEEV qui les contredit quand, en 2014, elle pointe de sérieuses déficiences de biosécurité au sein de l’établissement et lui retire son approbation. Plus qu’une vexation, ce sera le déclic.

Une œuvre collective pour avancer

« La biosécurité, c’est la mise en œuvre de mesures qui réduisent le risque d’introduction et de propagation d’agents infectieux. Elle requiert l’adoption d’un ensemble de mesures et de comportements destinés à réduire le risque infectieux dans toutes les activités impliquant des animaux domestiques ou exotiques et leurs produits », rappellent en introduction les auteurs du guide. Car, plus qu’un outil de référence, c’est une véritable démarche qualité, une approche globale permettant de décrocher la fameuse labellisation européenne qu’Anne Gogny et Jean-Michel Cappelier ont mises en œuvre, en lien avec la responsable qualité de l’établissement, Marie Caparros. « Cela devenait gênant pour les étudiants si, dans un CHUV et dans une école qui revendiquent l’excellence, les pratiques n’étaient pas harmonisées, observe la praticienne hospitalière. Or, pour progresser, cela ne pouvait passer que par une démarche collective. » Des listes ont donc été établies, les 17 services (dont animaux de compagnie, chevaux, faune sauvage, animaux de production et laboratoire d’analyses) ont été auscultés, les animaliers ont été entendus, les rendez-vous avec les administratifs, les étudiants, les enseignants et les chercheurs multipliés, afin de relever des détails, des anomalies – comme l’absence de distributeur de papier absorbant ou la présence de portes en bois –, et de les corriger. Une commission biosécurité a été créée pour réunir toutes les composantes du personnel et les étudiants.

Un audit réalisé par un hygiéniste hospitalier

Les instigateurs de la démarche ont fait appel au professeur Didier Lepelletier, spécialiste en bactériologie et hygiène hospitalière en médecine humaine, pour effectuer un audit et apporter un regard neutre à l’expertise. « Cela nous a aidés à mieux structurer notre approche car, dans les hôpitaux, tout est beaucoup plus codifié. » De leur côté, les étudiants de 4e et 5e années ont été mis à contribution pour apporter leur vision des défaillances de l’établissement. Et ils se sont pris au jeu. En faisant des selfies pour montrer les tenues réglementaires à la façon d’un défilé de mode ou encore en poussant les cliniciens à nettoyer des boxes équins selon l’exigence de procédures, pour éviter les proliférations. « Tout de suite, ils sont passés à la marche supérieure », se félicite Anne Gogny, auteure de trois quiz d’une vingtaine de questions, façon code de la route, et de quelques vidéos informatives et didactiques diffusées sur la plateforme interne pour savoir, par exemple, faire un nœud de cabestan ou poser un cathéter. Elle est allée jusqu’à créer Contaminator, un personnage récurrent et amusant destiné à faire passer des messages à un public qui peut vite être réfractaire.

Jusqu’à revoir les fiches de poste

Côté enseignement, outre l’évolution des pratiques quotidiennes, Jean-Michel Cappelier a établi un programme de formation d’une heure dédié à la biosécurité, dispensé en 1re, 2e et 3e années. Il s’intégrera dans le prochain référentiel de diplôme mis en œuvre à la rentrée 2017. Un plan de formation du personnel a également été diffusé auprès du personnel technique et des animaliers. « Certaines fonctions ont pu être revalorisées. On a pris conscience, par exemple, que les animaliers étaient souvent confrontés au port et au transport de charges lourdes, notamment pour le levage d’animaux, après euthanasie. On le savait, mais cette fois, on est allé jusqu’à modifier certaines fiches de poste, assure Anne Gogny. Si bien que maintenant, on ne peut plus engager de process sans penser biosécurité et assurance qualité. »

1 Voir La Semaine Vétérinaire n° 1725 du 23/6/2017, pages 14 et 15.

Formations e-Learning

Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

En savoir plus

Boutique

L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire

Agenda des formations

Calendrier des formations pour les vétérinaires et auxiliaires vétérinaires

Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.

En savoir plus


Inscrivez-vous gratuitement à nos Newsletters

Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.

Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire

Retrouvez-nous sur
Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr