Les enjeux en santé publique vétérinaire - La Semaine Vétérinaire n° 1724 du 17/06/2017
La Semaine Vétérinaire n° 1724 du 17/06/2017

SÉANCE ACADÉMIQUE

ACTU

ÉVÉNEMENT

Auteur(s) : STÉPHANIE PADIOLLEAU 

L’Académie vétérinaire de France a organisé, le 1 er juin, une séance à l’école du Val-de-Grâce sur le thème « La santé publique vétérinaire : du concept à la réalité » .

La santé publique vétérinaire a été définie en 1997 par l’Académie vétérinaire de France comme « l’ensemble des actions qui sont en rapport direct ou indirect avec les animaux, leurs produits et sous-produits, dès lors qu’elles contribuent à la protection, à la conservation et à l’amélioration de la santé de l’homme, c’est-à-dire à son bien-être physique, moral et social ». Une définition rappelée par l’ensemble des orateurs présents lors de la séance du 1er juin 2017 de cette même académie, dont le thème était « La santé publique vétérinaire : du concept à la réalité ». Une fois n’est pas coutume, c’est l’école militaire du Val-de-Grâce, à Paris, qui accueillait cette réunion, ouverte par le général Ulmer, du Service de santé des armées.

Historiquement, comme l’a rappelé Loïc Evain, directeur adjoint à la Direction générale de l’alimentation (DGAL), la crise de la vache folle a constitué un tournant, lorsque Londres a annoncé en 1996 qu’il était probable que la maladie se transmette à l’homme : le consommateur a découvert que la qualité de ce qu’il a dans l’assiette peut être liée à l’aliment que la vache a consommé, et pas seulement à son boucher. La crise de confiance des consommateurs qui a suivi a entraîné des réorganisations majeures, avec le traité d’Amsterdam en 1997, puis, en 2000, la publication du Livre blanc de la Commission européenne, qui met en place la traçabilité, pose les responsabilités, implique les opérateurs avec le “paquet hygiène”, etc. Concept défini somme toute assez récemment, « la santé publique est une préoccupation majeure dans le monde entier », souligne Roger Genet, directeur de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), qui, lui, préfère citer Tchernobyl (1986) et l’affaire du sang contaminé (qui débute dans les années 1980) comme crises de confiance du consommateur, et en particulier vis-à-vis de l’expertise scientifique.

Une seule santé, mais dominée par l’homme

C’est aussi un moyen d’insister sur l’indépendance de son agence, ou plutôt sur l’indépendance de l’expertise scientifique, qui est la marque de l’Anses. Trois objectifs ont présidé à la création de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa), devenue Anses après fusion avec l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail (Afsset) en 2010 : assurer la transparence et l’indépendance de l’expertise scientifique, séparer l’évaluation et la gestion du risque et améliorer la cohérence de la gestion gouvernementale. Une faiblesse est toutefois à souligner : en général, l’Anses se focalise sur les dangers sanitaires de 1re catégorie, mais il existe des cas où c’est impossible car certaines maladies ou dangers sanitaires de 2e et 3e catégories peuvent rendre les animaux sensibles à des affections zoonotiques ou à des dangers sanitaires de 1re catégorie. Par exemple, les porcs infectés par le syndrome dysgénésique et respiratoire porcin (SDRP) peuvent être excréteurs du virus de l’hépatite E (zoonotique) plus longtemps (plus de 60 jours) que les individus non infectés.

De la santé publique découle le concept One Health, “une seule santé”, voire même « une seule planète », relève Loïc Evain. L’articulation avec le concept One Health est complexe, répond Jacques Guérin, président du Conseil national de l’Ordre des vétérinaires, pour lequel la santé humaine tend à étouffer la question vétérinaire, rappelant qu’en 2010 les vétérinaires ont été sortis des professionnels de santé, placés, en 2011, au banc des accusés vis-à-vis de la résistance aux antibiotiques, pour finir dans la rue en 2013. Des questions se posent donc : à quelle tutelle se référer ? Avec qui travailler ? Où trouver des repères ? Ces interrogations ont aussi concerné le réseau des laboratoires publics, pour lesquels la loi portant sur la nouvelle organisation territoriale de la république (Notre) a délivré une partie des réponses en fixant leur légitimité et en définissant leurs missions. Le réseau a cependant évolué : on est loin du temps où chaque département avait son laboratoire d’analyses vétérinaire ! Philippe Nicollet, président de l’Association française des directeurs et cadres de laboratoires vétérinaires publics d’analyses (Adilva), explique qu’actuellement 20 % des laboratoires publics d’analyses sont multisites. L’ensemble emploie environ 4 000 agents, qui travaillent dans des structures de statut juridique, de taille et de budget très variables : pour 81 agents par laboratoire en moyenne, l’amplitude varie de 9 à 540 ! Les budgets, dont 24 % sont assurés par le financement public, représentent entre 350 000 et 36 millions d’euros, pour une moyenne située à 5,6 millions.

Et les vétérinaires dans tout ça ?

« La santé publique est au cœur de la formation vétérinaire », rappelle Jacques Guérin. Pour notre consœur en productions animales, Jacqueline Bastien, de la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV), la santé publique vétérinaire « commence à la production animale, dont le but est d’assurer la suffisance alimentaire, se poursuit avec la protection des populations vis-à-vis des zoonoses directes, avec la qualité sanitaire des denrées produites par les animaux et finit avec la qualité des denrées transformées et distribuées ». Elle souligne que chacun a son rôle dans la chaîne alimentaire, les vétérinaires libéraux pour la santé animale, et l’Administration pour les niveaux transformation et distribution. Le développement des circuits courts offre aux vétérinaires la possibilité de montrer leurs compétences en hygiène alimentaire, en plus de celles relatives à la prévention et à la santé animale.

Du côté des animaux de compagnie, Éric Guaguère, de l’Association française des vétérinaires pour animaux de compagnie (Afvac), insiste sur le rôle de conseil des praticiens, afin de rappeler aux propriétaires les règles d’hygiène et de bon sens permettant de diminuer les risques. En milieu urbain, plus d’une centaine de zoonoses peuvent être transmises de l’animal à l’homme, d’une fréquence et d’une gravité médicale pour l’homme très variable, et la population à risque est vaste : propriétaires, enfants, vétérinaires et personnel des cliniques, éleveurs, personnel des associations de protection animale, des animaleries, etc. Sans négliger, bien sûr, les possibles transmission de bactéries résistantes et diffusion de gènes de résistances ; « un risque réel », souligne Jean-François Rousselot (Afvac), qui envisage pour le futur la « consolidation de l’expertise vétérinaire en matière d’hygiène pour les animaux suivis et leur environnement humain et matériel ».

Le futur, c’est aussi assurer une présence vétérinaire, compétente pour les productions animales et répartie sur l’ensemble du territoire, et c’est un chantier auquel se sont attelés l’Ordre et le Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL) avec le projet Vetfuturs. Les épizooties d’influenza aviaire ont montré la difficulté de trouver suffisamment de praticiens compétents dans la filière pour aider à la gestion de ces crises. Les travaux du projet VeTerrA, qui a étudié la question de l’implantation des vétérinaires en milieu rural dans le Massif central, ont débouché, en 2016, sur le colloque du 12 mai (« Le vétérinaire, la carte et le territoire ») sur la robustesse du maillage vétérinaire, avec l’établissement d’une feuille de route. Pour les laboratoires publics d’analyses, la question de la visibilité à moyen et à long terme est cruciale, et dépend de l’attribution des agréments par l’État : « On ne fait pas un investissement à plus de 300 000 quand on ne sait pas si les agréments seront conservés », souligne Philippe Nicollet (un laboratoire investit en moyenne 380 000 ). À l’heure de la régionalisation, où la responsabilité incombe aux territoires, il suggère d’organiser une gouvernance nationale pour assurer une harmonisation entre territoires avec une mise en œuvre locale qui maintienne une activité analytique de proximité et évite d’instaurer une compétitivité entre laboratoires, qui pourrait nuire au dispositif. Un dispositif qui, comme le réseau vétérinaire, dépend des politiques publiques, en matière d’agriculture et de développement des territoires.

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