Jacques Guérin : « Anticiper pour ne pas subir ! » - La Semaine Vétérinaire n° 1707 du 16/02/2017
La Semaine Vétérinaire n° 1707 du 16/02/2017

CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE

ACTU

ÉVÉNEMENT

Auteur(s) : PROPOS RECUEILLIS PAR MARINE NEVEUX 

Le nouveau président de l’Ordre expose sa réflexion sur les actions à mener pour l’avenir de la profession et les problématiques qui animent l’actualité vétérinaire.

Quels sont les trois principaux chantiers que vous souhaitez engager à l’occasion de ce mandat ?

Le premier chantier est celui qui fonde les décennies à venir de notre profession : VetFuturs France. L’objectif est d’interroger les vétérinaires praticiens et les jeunes générations afin de comprendre leur vision du métier et de savoir comment ils veulent exercer en 2030. Cette perspective doit être dessinée dès à présent, c’est la responsabilité des élus professionnels en place aujourd’hui. Il n’est plus temps de se contenter de dresser des constats (comme la difficulté à trouver des remplaçants, la désertification des territoires ruraux, etc.), il devient nécessaire de connaître ce que les praticiens attendent de l’avenir de leur profession et de travailler sur des modèles qui leur conviennent, dont la e-santé est une des composantes.

En outre, il nous revient le devoir de réfléchir à la question de la nature et du périmètre de la commande publique auprès de la profession vétérinaire, des attentes de l’État et de la société civile. Si ces réflexions montrent un décalage entre ce qui est souhaité par l’un et ce qui est répondu par l’autre, alors la profession verra évoluer ses prérogatives. Il faut en être conscient ! Le projet VetFuturs France permet de s’interroger sur tous ces sujets, sur le sens que les vétérinaires donnent au titre de docteur vétérinaire et au fait d’exercer une profession réglementée. Où plaçons-nous le point d’équilibre et qu’en sera-t-il demain ?

VetFuturs France a pour objet de donner la parole aux praticiens en exercice. Les groupes de travail sont constitués et œuvrent déjà. Au second trimestre, des rencontres auront lieu dans les régions. Le projet intègre les quatre écoles vétérinaires, car le principe de réalisme quant à l’avenir de l’exercice vétérinaire s’impose de la même manière dans chacune d’elles.

Le deuxième chantier s’attache à évaluer les facteurs qui influencent la présence des vétérinaires dans les territoires. La feuille de route du ministre de l’Agriculture a pour vocation de cadencer un plan d’actions organisé en huit axes de travail, que les organisations professionnelles vétérinaires et agricoles doivent coordonner pour maintenir un maillage territorial efficient. La question n’est plus posée ici à l’horizon 2030, mais à trois ou cinq ans : comment positionner la profession vétérinaire dans les territoires dans un univers économique difficile et dans un contexte de crises agricoles qui fragilisent les clients des vétérinaires ?

La santé publique et la santé animale ont construit et porté notre profession jusqu’ici. Il convient sans doute de réfléchir différemment et de trouver les conditions d’une moindre dépendance aux événements : anticiper pour ne pas subir ! Les stages tutorés sont un exemple. Ils créent une émulation pour l’exercice rural au sein des écoles, s’agissant d’un exercice de la médecine et de la chirurgie des animaux où chacun peut s’épanouir professionnellement et humainement. Les praticiens coopèrent, il y a là un vrai enjeu de transmission de son savoir et de sa passion.

Une question centrale est soulevée, celui de l’accès aux données d’élevage dont le vétérinaire praticien a besoin pour mener à bien ses missions et intervenir à bon escient en amont de la pathologie. Il est question de pilotage du suivi sanitaire et médical des élevages par l’interprétation précoce des signaux biologiques et zootechniques et la surveillance des critères d’alerte. Le vétérinaire qui s’engage dans un contrat de soins doit pouvoir demander en confiance à l’éleveur l’accès aux données utiles, comme les taux cellulaires du tank, par exemple. Libérons les conditions qui permettront aux vétérinaires d’intervenir au bon moment de la chaîne de soins plutôt que de le cantonner tel le pompier à la gestion de crise et aux situations d’urgence. C’est une des clés du succès des plans ÉcoAntibio 1 et 2 ! C’est un facteur de dynamique vertueuse entre la profession d’éleveur et celle de vétérinaire.

Le troisième chantier relève de l’organisation interne de l’institution. Il s’agit de mettre en application la réforme législative et réglementaire de l’Ordre des vétérinaires, entre autres, le redimensionnement en 12 régions ordinales et une plus grande séparation des pouvoirs administratif et disciplinaire. Mes prédécesseurs ont construit de solides bases dont la robustesse permet d’assumer aujourd’hui une organisation différente autour de huit commissions, pilotées par un conseil national responsable et ouvertes à une présence plus importante de conseillers régionaux. Ma volonté est d’associer les conseils régionaux au plus près de la décision, au cœur du “réacteur”.

L’année 2017 sera consacrée à la mise en place de la gouvernance du conseil national, à la déclinaison pratique de la réforme de l’Ordre et au congrès ordinal de Nancy qui se tiendra du 9 au 11 novembre.

Lors de vos vœux, en janvier dernier, vous avez évoqué le dossier brûlant de la biologie vétérinaire. Quelle sera votre position sur ce sujet d’actualité ?

Je me positionne sur la biologie vétérinaire avec une extrême prudence. Avant de trouver une issue à ce dossier, encore faut-il en comprendre tous les tenants et aboutissants. Une approche cloisonnée ne serait pas pertinente. L’ensemble des questions qui se posent doivent être, dans un premier temps, identifiées avant d’envisager d’agir dans le respect des missions de l’Ordre, donc certainement pas au titre d’une régulation du marché. Cette approche n’est pas seulement la plus mauvaise, mais elle est totalement impossible pour l’Ordre des vétérinaires.

Le débat est, à ce stade, mal posé puisqu’il l’est sous l’angle du contentieux. Cette situation de conflit ne permet pas une réflexion sereine et constructive. Je perçois que la gestion de ce dossier mobilisera l’Ordre au cours des trois à cinq ans à venir.

Dans mon esprit, il ne souffre aucun doute que l’acte de biologie vétérinaire est un acte vétérinaire. Par voie de conséquence les vétérinaires qui effectuent des actes de biologie vétérinaire relèvent de l’inscription au tableau de l’Ordre, ainsi que les sociétés dont l’objet social mentionne une telle activité. Partant de ce principe, tout est à construire et à décliner pour disposer à terme d’un cadre réglementaire de nature à asseoir positivement la biologie vétérinaire.

L’Ordre a pris position ces dernières années sur des sujets relatifs au bien-être animal, comme l’abattage sans étourdissement, la corrida, etc. Quelles seront vos prochaines orientations sur le bien-être animal ?

Un important travail a été effectué sous la présidence de Michel Baussier. L’Ordre dispose d’une commission dédiée sous la responsabilité de Ghislaine Jançon. Je compte bien faire en sorte que l’Ordre des vétérinaires continue à se positionner en tant qu’interlocuteur de référence écouté en matière de bientraitance animal. L’Ordre n’a pas à agir sur le terrain du militantisme et des causes extrémistes. Je veillerai à ce que les positions exprimées ne fassent pas l’objet de tentatives d’instrumentalisation par tel ou tel acteur de la cause animale. Les sujets qui méritent d’être portés à la réflexion seront systématiquement traités par une approche scientifique et objective.

Les confrères doivent faire face à des contraintes administratives croissantes cette année : kétamine classée en stupéfiant, transmission des données sur les antibiotiques, etc. Ils se sentent asphyxiés. Que leur répondez-vous ?

Clairement, certaines mesures mises en place actuellement le sont en application de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt. Elles étaient donc prévues.

Concernant la kétamine, le risque était d’aboutir à une interdiction de ce médicament vétérinaire utile à l’exercice de la médecine et de la chirurgie des animaux, donc aux praticiens quotidiennement. La solution retenue est raisonnable, d’autant que de telles contraintes visant des médicaments sensibles existent déjà.

Quant à la “remontée des antibiotiques”, au début des discussions, une quarantaine de données étaient souhaitées et non les seuls six ou sept paramètres identifiés dans la loi. Les contraintes ont donc été amorties et dimensionnées au strict nécessaire. La profession doit être motrice et responsable sur ce sujet. Si les organisations professionnelles vétérinaires ne sont pas en capacité d’organiser la remontée des données d’antibiotiques, d’autres acteurs pourraient le faire à notre place. S’agissant de données sensibles, structurelles pour la profession vétérinaire, les instances vétérinaires jouent leur rôle. L’immobilisme n’est pas une solution.

Enfin, concernant les conventions d’hospitalité et de recherche, l’Ordre a eu pour ambition de rechercher, en coopération avec le Syndicat de l’industrie du médicament et réactif vétérinaires (SIMV), une solution la plus fluide possible et la plus simple pour une entrée en vigueur au 1er juillet 2017.

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