Camelot

Après des films exemplaires au Chili, dont le récent Neruda, la première incursion du réalisateur Pablo Larraín dans le cinéma américain est un coup de maître. À l’opposé des conventions d’Hollywood, le portrait intimiste mais jamais sentimental, de la jeune veuve Kennedy nous immisce, avec intelligence et bien au-delà du biopic, dans les coulisses d'un moment clé de l’histoire des États-Unis. Parfaite orchestration de talents – de la musique au montage, du scénario à la subtile interprétation –Jackie met en scène l’épouse de JFK les jours qui suivent l’assassinat de ce dernier à Dallas (Texas), en novembre 1963. L’interview qu’elle accorde à un journaliste ravive les tragiques moments que vient de traverser l’ex-première dame ou ceux, plus chatoyants, d’avant le drame. L’habile fragmentation narrative du film dessine alors une icône complexe, meurtrie mais résolue, difficile à cerner. Alors que la machine du pouvoir cherche à tourner la page, Jackie, toute en rage étouffée, perçoit dans sa solitude qu’il en va de sa survie de sauver l'héritage de son mari et sa propre image. Petite femme et grande dame à la fois, elle révèle une capacité à conjurer l'effroi du néant en écrivant la version publique d’elle-même. La mise en cérémonie de son deuil devant les caméras contribuera à édifier la légende Kennedy et infléchira la médiatisation de la vie politique. Réflexion sur une figure publique, somptueux drame du veuvage, le film est sublimé par la prestation de Natalie Portman.
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Jackie de Pablo Larraín, avec Natalie Portman, Peter Sarsgaard, Greta Gerwig, Billy Crudup, John Hurt, États-Unis, 1 h 40, sortie le 1^er février.