Crédit bancaire : comment défendre son entreprise contre les abus des créanciers - La Semaine Vétérinaire n° 1704 du 27/01/2017
La Semaine Vétérinaire n° 1704 du 27/01/2017

FINANCES

ÉCO GESTION

Auteur(s) : JACQUES NADEL 

La rupture de crédit bancaire, sans notification écrite, de la part d’un établissement bancaire peut être considérée comme abusive et générer une responsabilité pécuniaire. Explications.

Les ruptures abusives de crédit bancaire se jugent souvent dans les salles feutrées d’un palais de justice. Une banque est-elle en droit de supprimer brutalement, sans préavis, un découvert ou une facilité de caisse, au risque de mettre en péril la trésorerie d’une entreprise vétérinaire ?

La rupture anticipée d’un concours bancaire (découvert, facilité de caisse, etc.) accordé à une entreprise n’est possible que dans trois cas : lorsqu’une clause du contrat prévoit une cause de rupture anticipée, en cas de situation irrémédiablement compromise de l’entreprise ou encore en cas de comportement gravement répréhensible.

La responsabilité de l’entreprise

La situation d’une structure est compromise lorsqu’elle présente des signes évidents de déclin, que les difficultés financières deviennent insurmontables et que le redressement est inenvisageable.

Les comportements considérés comme gravement répréhensibles de l’entreprise incluent les dépassements importants et répétés de son découvert autorisé, malgré les mises en garde de la banque, l’absence de fourniture des documents exigés pour assainir sa situation (par un financement mieux adapté), l’omission de remettre sur son compte une créance prévue, alors que l’annonce de cette opération avait garanti le maintien d’un important découvert.

La banque qui met fin à une ouverture de crédit n’est pas tenue de respecter un délai de préavis dans ces cas de comportement ou lorsque la situation du débiteur s’avère irrémédiablement compromise.

La responsabilité de la banque

Pour autant, la banque n’en est pas moins tenue de notifier par écrit l’interruption de son concours.

Dans deux cas, une rupture de la banque peut cependant être jugée fautive (en l’absence de comportement gravement répréhensible du bénéficiaire ou de situation irrémédiablement compromise) : d’une part, lorsque la banque a agi avec brutalité, c’est-à-dire a refusé au client les paiements qu’elle acceptait jusque-là, sans l’avoir préalablement averti de cette intention par écrit ; d’autre part, lorsque la banque a créé à son client des difficultés de financement injustifiées. Tel est le cas si le banquier prive son client de toute autre possibilité de financement ou ne peut ignorer qu’il expose ce dernier à de graves difficultés. En cas de rupture fautive, la banque est redevable de dommages et intérêts.

Des dommages et intérêts pour l’entreprise

Mal en a pris à une banque qui avait rompu une autorisation de découvert consentie à une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) pour une durée déterminée, en invoquant le caractère irrémédiablement compromis de la situation de celle-ci. Après avoir constaté que la banque ne prouvait pas que la société était dans une situation irrémédiablement compromise, une cour d’appel en avait déduit qu’elle aurait dû respecter un préavis de 60 jours. Ne l’ayant pas fait, la banque avait été condamnée par la cour d’appel à verser des dommages et intérêts à l’entreprise. La Cour de cassation (arrêt Cass. com., 24 mars 2015, n° 13-16.076) a jugé, au contraire, que l’exigence d’un délai de préavis ne concerne que les concours bancaires à durée indéterminée. Elle n’a pas cassé pour autant la décision de la cour d’appel, car aucune autre cause de rupture anticipée (à savoir un comportement gravement répréhensible) ne justifiait ici une interruption brutale du concours bancaire.

Les moyens de défense de l’entreprise

Si les parties ne parviennent pas à trouver une solution amiable à leur différend, il est possible d’entamer une action en justice devant le tribunal de commerce qui est compétent dans les litiges avec les banques. Après avoir trouvé une solution alternative de financement à court terme, l’entreprise peut se concentrer sur l’engagement de la responsabilité de la banque et solliciter des dommages et intérêts.

La démonstration d’une rupture abusive doit toutefois contenir plusieurs éléments : la durée du concours bancaire, son caractère habituel et les montants accordés (avec l’aide des relevés de compte), le respect ou non d’un préavis et ses conséquences sur la survie de l’entreprise (tableau).

En premier lieu, l’entreprise doit démontrer que la banque n’a pas respecté l’article L.313-12 du Code monétaire et financier sur le délai de préavis et que ce non-respect lui a causé un dommage. Le préjudice subi peut aller de la perte d’un marché ou de fournisseurs aux frais engagés pour établir un contrat avec un nouveau partenaire. Ceux-ci sont souvent supérieurs à ce que l’entreprise aurait versé si la banque n’avait pas rompu abusivement le crédit. La responsabilité de la banque sera engagée si l’entreprise parvient à démontrer le lien de causalité entre le préjudice et la rupture abusive du découvert bancaire.

Le comportement du dirigeant

La base de la démonstration doit reposer sur l’absence de délai accordé à l’entreprise et sur les conséquences induites. Par exemple, la structure doit prouver que du fait de cette absence de délai, elle n’a pas eu le temps de retrouver un banquier, a perdu la confiance de ses fournisseurs, qui ont refusé de la livrer, ce qui a engendré une perte de marchés ou d’activité, donc une perte de bénéfices.

En revanche, la responsabilité de la banque ne pourra être engagée si la rupture sans préavis résulte d’un comportement financier, de la part du dirigeant, jugé dangereux (dépassement permanent du découvert autorisé, situation financière grave, etc.).

LE JUDICIEUX ÉQUILIBRE ENTRE SOUTIEN FINANCIER ET RUPTURE ABUSIVE DE CRÉDIT

Le banquier doit être vigilant sur l’évolution de la trésorerie de l’entreprise cliente et sur sa situation générale. S’il constate que sa situation est irrémédiablement compromise, il est tenu de ne plus lui accorder de crédit, sans quoi sa responsabilité est susceptible d’être engagée pour avoir créé chez les autres créanciers de l’entreprise une fausse impression de solvabilité les ayant conduits, eux aussi, à lui accorder des crédits qu’ils ne pourront pas se faire rembourser. On parle ici de soutien abusif du banquier.
Le banquier ne doit pas non plus tomber dans l’excès inverse, en retirant sa confiance trop rapidement à l’entreprise, ce qui entraînerait la fin des concours bancaires à court terme. En rompant ce soutien financier, la banque priverait alors les fournisseurs créanciers de l’entreprise des paiements dus. On parle alors de rupture abusive de crédit. Un équilibre est donc à trouver.
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