L’étude Epic pourrait changer la donne en cardiologie

La prise en charge du stade préclinique (B2) de la maladie valvulaire dégénérative ne fait encore l’objet d’aucun consensus (encadré). Des études ont été menées sur l’utilisation des inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IECA), notamment l’énalapril dans l’étude Swedish Veterinary Enalapril Prevention (SVEP), multicentrique, randomisée, en double aveugle, menée sur 229 cavaliers king-charles¹. Dans celle-ci, le traitement n’a pas permis d’augmenter le délai d’apparition de l’insuffisance cardiaque congestive. C’est pourquoi l’étude Evaluation of Pimobendan in Cardiomegaly (Epic)² s’est penchée sur l’utilisation d’une autre molécule en stade préclinique, le pimobendane, pour étudier si celle-ci permettait d’augmenter la durée de la phase B2, donc du stade sans symptômes pour le chien. Le laboratoire Boehringer Ingelheim en est le promoteur, mais s’est engagé à donner aux investigateurs un accès complet à tous les résultats et le droit de les publier quels qu’ils soient.

La plus large étude de cardiologie de ces 15 dernières années

L’étude Epic, incluant 360 chiens, s’est déroulée dans 36 centres vétérinaires répartis dans 11 pays, d’octobre 2010 à mars 2015. C’est une étude prospective en double aveugle, randomisée contre placebo. Les critères d’inclusion sont la présence d’une cardiomégalie radiographique (indice vertébral³ > 10,5), d’une dilatation atriale (rapport atrium gauche/aorte > 1,6) et ventriculaire gauche (diamètre interne du ventricule gauche en diastole normalisé > 1,7) à l’échocardiographie. Sont exclus les chiens ayant déjà connu un épisode d’insuffisance cardiaque congestive (stade C), ceux présentant une autre affection cardiaque ou une maladie concomitante diminuant l’espérance de vie, ainsi que les chiens qui ont reçu un autre agent cardiovasculaire comme les IECA en stade préclinique. Le groupe traité reçoit du pimobendane à la dose recommandée, à l’exclusion de tout autre traitement. Le paramètre mesuré est la durée depuis l’inclusion jusqu’au développement d’une insuffisance cardiaque congestive gauche ou jusqu’à une mort d’origine cardiaque (euthanasie ou mort naturelle). Si un chien mourait sans preuve d’une cause non cardiaque, une défaillance du cœur était incriminée.

Un tiers de risque en moins d’atteindre l’insuffisance cardiaque

Les résultats, présentés en France par le laboratoire Boehringer Ingelheim a l’occasion du congrès de l’Association française des vétérinaires pour animaux de compagnie (Afvac) de novembre 2016, montrent que le groupe recevant du pimobendane a une durée médiane de stade B2 de 15 mois supérieure à celle du groupe placebo (1 228 jours contre 766). Les chiens auxquels est administré du pimobendane ont un tiers de risque en moins d’atteindre l’insuffisance cardiaque congestive. La sécurité et la tolérance de la molécule se révèlent bonnes : il n’y a pas plus d’effets secondaires dans le groupe recevant le pimobendane que le placebo. En pratique, les investigateurs rapportent aussi que les propriétaires remarquent un retour à la vitalité de leur chien à la suite de la mise sous traitement. « La détection d’un souffle systolique significatif avec des critères de dilatation est donc maintenant un motif de prise en charge thérapeutique par le pimobendane sans attendre de signes cliniques alarmants », conclut le conférencier Jean-Philippe Jaudon, praticien à Villard les Dombes (Ain), qui a participé à l’étude.
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¹ Kvart C., Häggström J., Pedersen H. D. Efficacy of enalapril for prevention of congestive heart failure in dogs with myxomatous valve disease and asymptomatic mitral regurgitation. J. Vet. Intern. Med. 2002;16(1):80-8.

² En attente de publication.

³ Ou indice de Buchanan : mesure de la longueur et de la largeur du cœur sur une radiographie en décubitus latéral droit et report sur la colonne vertébrale à partir de la 4^e vertèbre thoracique.