Liens entre la stérilisation et l’apparition de troubles immunitaires - La Semaine Vétérinaire n° 1701 du 06/01/2017
La Semaine Vétérinaire n° 1701 du 06/01/2017

ÉTUDE RÉTROSPECTIVE

PRATIQUE CANINE

L'ACTU

Auteur(s) : ALEXIS LECOINDRE 

Six maladies auto-immunes évaluées dans une étude américaine surviennent plus fréquemment chez les chiens stérilisés. Cette observation soutient le constat selon lequel la stérilisation peut avoir un impact néfaste sur la santé, justifiant une discussion entre le vétérinaire et les propriétaires d’animaux.

La stérilisation chirurgicale par ablation des gonades (ovaires et testicules) est couramment employée pour contrôler la population animale, avec à la clé des avantages sur les plans de la santé et du comportement. Aux États-Unis, près des 64 % des chiens sont stérilisés après l’âge de 6 mois. Certains pays comme la Suède, où 98,9 % des chiens sont intacts, considèrent cette procédure comme inutile, voire indésirable. Une prévalence accrue de l’obésité et de certaines affections néoplasiques (carcinome des cellules transitionnelles de la vessie, hémangiosarcome, ostéosarcome et lymphome), notamment, est corrélée avec la stérilisation. Une étude1 apporte de nouveaux arguments en défaveur de cette intervention chirurgicale, suggérant un possible lien avec une augmentation de l’incidence des maladies dysimmunitaires.

Hormones sexuelles et affections dysimmunitaires

Les systèmes reproducteur (via les stéroïdes sexuels) et immunitaire sont fortement interdépendants. Dans l’espèce canine, la femelle présente des réponses immunitaires cellulaires et humorales plus fortes, avec une production d’immunoglobulines plus élevée. Les effets anti-inflammatoires de l’œstradiol reposent sur une diminution de la transcription de protéines pro-inflammatoires telles que les cytokines et les chimiokines. Cette hormone possède également une action antioxydante et les femelles stérilisées présentent un risque accru de stress oxydatif. La testostérone, quant à elle, a une activité inhibitrice sur la production d’immunoglobulines.

L’étude

L’objectif de cette étude était de déterminer si la prévalence et le risque de survenue des affections dysimmunitaires sont influencés par la stérilisation. Les dossiers des animaux (90 090) pris en charge à l’hôpital universitaire de Davis (Californie) ont été analysés (sur la période 1995-2010). Les chiens stérilisés moins de 150 jours avant le diagnostic de la maladie dysimmunitaire sont considérés comme intacts. Les conditions immunologiques choisies sont celles dont la prévalence est supérieure à 0,1 % dans la population de chiens étudiée, reconnues pour avoir une causalité immunitaire sous-jacente : dermatite atopique, anémie hémolytique auto-immune, hypoadrénocorticisme, hypothyroïdie, polyarthrite et thrombocytopénie immunitaires, maladie inflammatoire chronique de l’intestin, lupus érythémateux et affections du groupe des pemphigus. Les résultats révèlent que les chiens stérilisés présentent un risque significativement augmenté (entre 1,5 et 3 fois plus) pour la dermatite atopique, l’anémie hémolytique auto-immune, l’hypocorticisme, l’hypothyroïdie, la thrombopénie à médiation immune et les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin, par rapport aux chiens intacts. De plus, les femelles stérilisées sont plus à risque que les mâles castrés pour l’ensemble des affections, hormis l’anémie hémolytique auto-immune et l’hypocorticisme. Elles présentent aussi un risque significativement plus élevé de lupus érythémateux systémique que les femelles intactes. Les données sont insuffisantes pour connaître l’impact d’une stérilisation précoce ou tardive sur l’expression des maladies.

Limites de l’étude

Ces résultats soulignent l’impact des stéroïdes sexuels sur la fonction immunitaire et suggèrent un rôle de ces hormones dans la reconnaissance de soi. Toutefois, cette étude rétrospective s’est limitée aux chiens vus dans un hôpital vétérinaire spécialisé. Elle est donc susceptible de ne pas refléter la prévalence de l’ensemble de la population canine, et d’être biaisée par la présentation plus fréquente de cas plus complexes ou plus graves. Cet essai indique une corrélation entre la stérilisation et la maladie, sans pour autant prouver une causalité en raison de sa nature rétrospective. Cela est particulièrement vrai en raison de la contribution génétique connue pour certains troubles auto-immuns canins. D’autres études prospectives sont donc requises pour confirmer ces premières conclusions. Quoi qu’il en soit, ces données soulignent l’importance d’une conversation réfléchie entre le vétérinaire et le propriétaire de l’animal sur les avantages et les risques potentiels liés à la stérilisation.

1 Sundburg C. R., Belanger J. M., Bannasch D. L. et coll. Gonadectomy effects on the risk of immune disorders in the dog: a retrospective study. BMC Vet. Res. 2016;12:278.

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