Idées reçues sur le syndrome de dilatation-torsion de l’estomac - La Semaine Vétérinaire n° 1697 du 23/11/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1697 du 23/11/2016

CONFÉRENCE

PRATIQUE CANINE

Formation

Auteur(s) : SÉGOLÈNE MINSTER 

L’intervention en urgence lors d’un syndrome de dilatation-torsion de l’estomac nécessite du matériel et des moyens humains. Son schéma physiopathogénique et ses moyens de prévention sont désormais connus. Cette présentation confronte les idées reçues sur cette affection aux données de la médecine factuelle.

1   La dilatation précède la torsion.

Vrai. En gonflant, l’estomac occupe plus de place, qu’il gagne en pivotant. Dans un cercle vicieux, le pylore peut alors remonter et pivoter vers le flanc gauche de l’abdomen, et l’estomac continuer à gonfler.

2  Le contenu gazeux de l’estomac est issu de fermentations gastriques.

Faux. Une étude récente remet cependant en cause le phénomène. Le chien avale de l’air et boit beaucoup d’eau pour essayer de se soulager. Le hiatus œsophagien étant fermé, par effet clapet, le volume de l’estomac augmente considérablement.

3  Si le sondage est impossible, cela signifie que l’estomac est tordu.

Faux. Le sondage orogastrique est normalement toujours possible, même si la dilatation maintient le cardia fermé. Le sondage limite le choc, et parfois, en moins d’une minute, le chien est debout. Il convient d’appliquer un gel anesthésiant (Tronothane©1) à l’extrémité de la sonde, et de la tourner si une résistance est rencontrée au niveau du cardia. Le côté du décubitus peut aussi être changé, ou les postérieurs positionnés dans le vide pour libérer la pression des organes. Le sondage se réalise sur animal endormi ou vigile. Si le sondage est malgré tout difficile, il peut être nécessaire de réaliser une gastrocentèse, afin de libérer l’ischémie des tissus, de lever la pression intragastrique et de faciliter le sondage. Elle est réalisée avec une aiguille rose en arrière de la dernière côte, à droite ou à gauche. L’estomac est si volumineux que le risque de passer à côté est faible, et les ponctions accidentelles de rate sont sans conséquence. Si l’aiguille s’obstrue, le geste est réitéré avec une autre aiguille, et cela jusqu’à trois ou quatre aiguilles.

4  Il est nécessaire d’opérer le plus rapidement possible.

Faux. Le syndrome de dilatation-torsion de l’estomac constitue une urgence médicale, mais pas chirurgicale. L’animal est en état de choc multifactoriel, hypovolémique, avec compression des poumons. Les priorités sont donc de décompresser l’estomac et d’apporter de l’oxygène. Une étude récente menée au CHV Frégis a montré que la mortalité était de 28 % chez les chiens opérés dans les 6 heures suivant l’admission, contre 8 % pour ceux opérés plus de 6 heures après. Il convient d’opérer uniquement les animaux stabilisés.

5  La technique de gastropexie influence le devenir de l’animal.

Faux. Toutes les techniques sont efficaces pour prévenir une récidive. Le pylore doit être fixé en position physiologique. Une étude récente sur 203 cas2 n’a pas révélé de complications liées à la technique par la ligne blanche. La technique incisionnelle consiste à réaliser deux petites incisions de 5 cm, dans la séreuse et dans la musculeuse du pylore, et en regard sur la paroi dans le péritoine et le muscle transverse, à l’endroit où, physiologiquement, le chien étant debout, reposerait le pylore. Deux surjets simples sont réalisés, liant les abouts libres, avec un monofil résorbable lent (polyglyconate).

6  La gastropexie ne prévient pas la dilatation d’estomac.

Faux. Le risque de récidive de dilatation avec une gastropexie est de moins de 5 %, contre 85 % sans gastropexie. Pour cette raison, le chien doit être opéré quand il est stabilisé, même s’il semble être en forme. La gastropexie prévient la dilatation et la torsion.

7  Les arythmies cardiaques ne nécessitent aucun traitement.

Faux. L’ischémie de l’estomac, le traumatisme splénique, la libération de radicaux libres, les troubles acido-basiques et électrolytiques, la douleur, etc. ont un impact délétère sur le cœur. Un suivi électrocardiographique pendant les 48 heures suivant l’intervention est nécessaire. Le traitement comprend des antidouleurs, une perfusion, l’apport d’oxygène et un anti-arythmique (lidocaïne) si toutes ces mesures ne suffisent pas.

8   La torsion à 360° est rarissime.

Vrai. En général, l’estomac est tordu de 180 à 270°.

9  La radiographie est le premier examen complémentaire indispensable.

Faux. La radiographie permet uniquement d’expliquer aux propriétaires ce que l’on sait déjà ! Si le contenu n’est pasaérique, cela peut correspondre à un excès alimentaire. Le praticien peut alors tenter de faire vomir l’animal. L’image dite en gant de boxe ou en bonnet phrygien confirme la présence d’une torsion.

10  La prise en charge de la dilatation et de la dilatation- torsion est différente.

Faux. Il convient de toujours proposer une gastropexie, même si la dilatation est réduite et que l’animal semble bien cliniquement.

11  L’alimentation joue un rôle majeur dans sa survenue.

Faux.Toutefois, il est conseillé de donner des croquettes de grosse taille (éviter les particules inférieures à 30 mm), la ration étant distribuée en au moins deux repas par jour. Le stress au moment du repas et la prise de nourriture rapide sont évités. Malgré les précédentes recommandations, l’exercice modéré après le repas semble conseillé, et il convient d’éviter l’alimentation en hauteur.

12  La gastropexie préventive est recommandée.

Vrai. Un dogue allemand a plus de 36 % de risque de présenter un syndrome de dilatation-torsion de l’estomac dans sa vie. Les chiens de grande taille, issus de lignées à risque, sont particulièrement concernés. La gastropexie préventive est réalisable pendant l’ovariectomie, l’intervention sous cœlioscopie est très facile et confère une protection à vie. Il convient donc de proposer la prévention, dont les propriétaires sont demandeurs, car c’est une maladie souvent fatale.

1 Pharmacopée humaine.

2Ullmann B. et coll. Gastric dilatation volvulus: a retrospective study of 203 dogs with ventral midline gastropexy. J. Small Anim. Pract. 2015.

Cyrill Poncet Spécialiste en chirurgie, dip. ECVS, CHV Frégis, Arcueil (Val-de-Marne). Article rédigé d’après une présentation faite lors du congrès France Vet à Paris, en juin 2016.

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