Une dermatite exfoliative liée à un thymome - La Semaine Vétérinaire n° 1686 du 07/09/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1686 du 07/09/2016

CAS CLINIQUE

PRATIQUE CANINE

Formation

Présentation du cas

Commémoratifs et anamnèse

Un chat européen, femelle stérilisée, de 10 ans est présenté en consultation pour un second avis concernant l’apparition d’une détérioration de l’état général et d’une dermatose alopéciante et squameuse. Il vit en maison avec jardin sans congénère. Il est traité tous les mois contre les parasites externes à l’aide d’un spot on à base de sélamectine. Les vaccinations sont à jour. Le problème de peau évolue lentement (depuis 3 mois environ), touche l’ensemble du corps et se présente sous forme de croûtes et de zones glabres associées à un prurit modéré (5/10) généralisé. Aucun diagnostic n’a été avancé. Une culture mycologique envoyée en laboratoire s’est avérée négative. Un traitement avec des antibiotiques oraux et injectables ainsi que des corticoïdes injectables n’a pas permis de rémission des symptômes.

Examen

Le score corporel est de 3/9. L’auscultation pulmonaire est modifiée, avec des bruits inspiratoires renforcés. La fréquence respiratoire est normale. Aucune autre anomalie n’est notée à l’examen clinique général. L’examen dermatologique révèle un mauvais état cutané généralisé, avec une atteinte plus marquée en zone dorsale. Un érythème modéré, un squamosis psoriasiforme, des croûtes ainsi qu’une alopécie, essentiellement dorsaux, sont notés. Les deux canaux auriculaires sont obstrués par de volumineuses croûtes. Les hypothèses diagnostiques incluent une démodécie, une gale notoédrique, une prolifération de Malassezia en surface, une dermatite allergique au sens large et une dermatite exfoliative liée à un thymome.

Examens complémentaires

Une série de raclages cutanés ainsi que des examens cytologiques de surface ne montrent aucun élément figuré. Un examen radiographique du thorax montre une masse radiodense en région craniale à la silhouette cardiaque compatible avec la présence d’une tumeur médiastinale. Des biopsies cutanées réalisées en zone alopécique montrent des remaniements identiques avec, en surface, une hyperkératose orthokératosique marquée et quelques foyers de parakératose ainsi que des croûtes sérocellulaires, une dermatite d’interface épidermique et folliculaire avec une dégénérescence hydropique des kératinocytes de la couche basale, quelques kératinocytes apoptotiques ainsi qu’une satellitose lymphocytaire. Enfin, l’examen du derme montre un infiltrat en bande sous-épidermique modéré avec des lymphocytes, des plasmocytes et quelques histiocytes. Cet examen histopathologique est compatible avec une dermatite exfoliative, elle-même le plus souvent secondaire à un thymome.

Autopsie

Lors de la réception du résultat des examens complémentaires, l’état dermatologique de l’animal était stable, mais son état général s’était nettement détérioré. Les propriétaires n’ont pas souhaité poursuivre la démarche diagnostique ni entreprendre un traitement. L’animal a été rapporté à la clinique 28 jours plus tard pour être euthanasié. Un second examen radiographique du thorax a montré une nette augmentation de la taille de la masse radiodense craniale à la silhouette cardiaque. Une autopsie a alors été pratiquée et a effectivement montré la présence d’une volumineuse masse médiastinale en avant du cœur. Son analyse histopathologique a confirmé la présence d’un thymome bénin.

Discussion

Symptômes de la dermatite exfoliative

La dermatite exfoliative est rare chez le chat. Comme dans le cas exposé ici, la présentation clinique décrite dans les études publiées consiste en un érythème diffus accompagné d’une exfoliation, de croûtes et d’une alopécie. Les lésions, notamment les croûtes, tendent peu à peu à se généraliser et s’accumulent au niveau des espaces interdigités, des bourrelets unguéaux et des canaux auriculaires. La dermatose est en général non prurigineuse, sauf lors de complications infectieuses et notamment de prolifération de Malassezia en surface. Une étude clinicopathologique rétrospective portant sur 550 examens histopathologiques de chats mentionne d’ailleurs que la découverte de prolifération de Malassezia en surface chez un chat présentant des lésions multifocales ou généralisées doit entraîner la recherche d’une tumeur interne.

Lésions histologiques

La description de l’examen histopathologique des biopsies cutanées concorde aussi avec les données de la bibliographie. En revanche, certains auteurs mentionnent que les observations cliniques couplées à un examen histopathologique caractéristique sont suggestives d’un thymome sous-jacent, alors que d’autres mentionnent le cas de deux chats pour lesquels l’association avec un thymome n’a pas pu être faite. Ils suggèrent ainsi que la dermatite exfoliative n’est pas une maladie exclusivement due à un thymome, mais un pattern histopathologique secondaire à un type de réaction immunologique, le plus souvent présent dans le cas d’un thymome.

Diagnostic

Le diagnostic différentiel inclut un accident cutané médicamenteux, un érythème polymorphe, une dermatite de contact, un pemphigus foliacé, un lupus érythémateux, des infections cutanées bactériennes, parasitaires ou par des levures, un hyperadrénocorticisme et même des cas dits idiopathiques. Certains auteurs conseillent donc la réalisation d’examens d’imagerie médicale thoracique (examen radiographique en première intention) afin de confirmer la présence d’une masse médiastinale, puis celle d’un examen cytologique par cytoponction à l’aiguille fine échoguidée ou encore de l’examen histopathologique de la masse directement.

Traitement et pronostic

La plupart des cas décrits ont fait l’objet d’un diagnostic post-mortem mais, si la présence d’un thymome est confirmée, le traitement de choix consiste en une exérèse chirurgicale de la masse après traitement des éventuelles complications infectieuses de surface. Le pronostic est favorable si la tumeur est facilement résécable (médiane de survie supérieure à 2 ans). En revanche, le pronostic est sombre si la masse est adhérente, avec un taux de mortalité peropératoire important. L’imagerie médicale n’aide pas forcément à prévoir la facilité de l’acte chirurgical. Les métastases sont rares. Un cas compliqué d’une myasthénie, 7 semaines après la réalisation de la thymectomie, est décrit, qui a pu être pris en charge à l’aide d’un traitement corticoïde systémique à dose immunosuppressive.

Retrouvez les références bibliographiques de cet article sur www.bit.ly/2bUXU1A.

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