Restitution d’un cheval : le professionnel n’a pas le droit à l’erreur - La Semaine Vétérinaire n° 1675 du 17/05/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1675 du 17/05/2016

JURISPRUDENCE

ÉCO GESTION

Auteur(s) : Céline Peccavy

En cas de litige, le juge ne pardonne rien aux professionnels, ici des éleveurs de chevaux, qu’ils soient du côté de la défense ou non.

Une jument appartenant à Mme P. fait l’objet d’une location de carrière de course. Le contrat prenant fin, la restitution de l’animal intervient tout naturellement. Plus tard, la propriétaire fait reproduire la jument à deux reprises. Deux poulains naissent ainsi.

De manière peu banale, les choses prennent alors une tournure totalement inattendue. En effet, le contrôle de filiation des poulains révèle tout simplement que la jument qui leur a donné naissance n’est nullement celle qui avait été confiée quelques années auparavant, en location de carrière de course. Incroyable… et pourtant vrai : la propriétaire du cheval ne s’est pas rendue compte à la restitution qu’il ne s’agissait pas de sa jument.

L’action judiciaire double

Mme P. intente alors une action judiciaire contre l’entraîneur : elle demande à la fois la restitution de sa jument et la condamnation du professionnel à des dommages et intérêts. Ses demandes n’aboutissent pas en première instance. Un appel est alors interjeté devant la cour d’appel de Toulouse.

L’action en restitution

Certes, l’animal a été reconnu par le Code civil comme un être vivant doué de sensibilité (article 515-14). Les chevaux demeurent toutefois soumis au régime juridique des biens meubles. Ce sont donc les principes “barbares” de l’article 2276 du Code civil qui s’appliquent à eux.

Cependant, il convient ici de se poser la question du devenir de la vraie jument de Mme P. Il existe ainsi des exceptions et des fins de non-recevoir à la revendication de son propre animal.

Dans cette affaire, il s’avère que la jument en question avait été échangée, de façon malencontreuse et sans fraude, avec une autre jument, puis vendue. Le nouveau possesseur de la jument en avait donc fait l’acquisition en toute bonne foi. Il convient d’ajouter que plusieurs années s’étaient écoulées avant que Mme P. se rende compte du fait qu’elle n’avait pas récupéré la bonne jument.

Le cumul des deux a conduit inévitablement à un rejet de la revendication : « La possession du cheval était exempte de vice et d’équivoque compte tenu de son caractère onéreux, public, paisible et continu. Le possesseur de la jument en est devenu le légitime propriétaire par prescription acquisitive puisque plus de trois ans se sont écoulés depuis l’échange des juments. M me P. ne peut donc prétendre à la restitution de la jument. »

L’action en responsabilité

Deuxième tentative d’indemnisation de la part de Mme P. : la faute du locataire de la carrière de course, M. L., en ce qu’il n’a pas rendu la bonne jument. La cour analyse ici M. L. comme un dépositaire et lui applique la règle de la présomption de faute.

En principe, donc, et par application stricte de cette règle, la jument rendue n’étant pas la bonne, Mme P. aurait dû obtenir une indemnisation intégrale. Tel n’a pourtant pas été le cas.

La cour a en effet considéré que « la responsabilité du dépositaire n’exclut pas que soit recherchée l’éventuelle participation du déposant à la réalisation de son propre préjudice. La négligence dont a fait preuve M me P., en ne reconnaissant pas sa jument, caractérise sa participation à la réalisation de son préjudice. »

Cette participation a valu à Mme P. de n’obtenir que les deux tiers de l’indemnisation à laquelle elle pouvait prétendre. Est-ce une position trop sévère de la part de la cour ? Pas si sûr. La cour relève en effet que Mme P. est éleveur de chevaux et que son concubin est un professionnel averti, en sa qualité d’éleveur de chevaux également. Ces deux professionnels, selon la cour, ne pouvaient donc pas passer à côté des différences d’aspect des deux juments, pendant plusieurs années de surcroît. Il leur en coûtera donc un tiers de leurs droits à indemnisation.

Cet arrêt1 démontre une fois de plus que rien n’est pardonné aux professionnels, quel que soit le côté de la barre où ils se situent.

1 Arrêt de la cour d’appel de Toulouse du 18 novembre 2015.

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