CONVENTION MÉDICRIME : LES POINTS ESSENTIELS À COMPRENDRE - La Semaine Vétérinaire n° 1670 du 15/04/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1670 du 15/04/2016

Décryptage

Auteur(s) : Michaella Igoho

Née à l’initiative du Conseil de l’Europe, la convention Médicrime constitue le premier texte international criminalisant le commerce de médicaments contrefaits, y compris les produits vétérinaires, mais aussi leur fabrication et leur distribution. Décryptage.

Qu’est-ce que le Conseil de l’Europe ?

Le Conseil de l’Europe est une organisation intergouvernementale qui ne dépend pas de l’Union européenne (UE), et qu’il convient de ne pas confondre avec le Conseil européen ou le Conseil de l’UE. Aujourd’hui, il regroupe 47 États membres, dont les 28 issus de UE. Le Conseil de l’Europe s’intéresse aux questions visant à :

– défendre les droits de l’homme et la prééminence du droit ;

– rechercher des solutions aux problèmes de société ;

– développer la stabilité démocratique en Europe ;

– favoriser la prise de conscience et la mise en valeur de l’identité culturelle de l’Europe et de sa diversité.

Ses problématiques touchent également à la qualité des médicaments et des soins de santé. Le Conseil de l’Europe « a réussi à mettre en place une Europe commune du médicament, en harmonisant les normes de qualité des substances entrant dans la composition des produits pharmaceutiques. Grâce à la convention Médicrime, ouverte aux pays non européens, il est désormais possible de sanctionner pénalement, sur la base d’une atteinte à la santé publique, la distribution et la vente de produits médicaux contrefaits (y compris sur Internet)1 ».

Historique des travaux d’élaboration

En 2004, le Groupe ad hoc, au sein du Conseil de l’Europe, qui travaille alors sur la contrefaçon des médicaments, effectue la première étude systématique relative à la législation, aux structures administratives et aux procédures applicables en matière de contrefaçon des médicaments. En 2005, il organise un séminaire sur le thème “Contrer les contrefacteurs, limiter les risques que représentent les médicaments de contrefaçon pour la santé publique en Europe par des mesures et mécanismes appropriés”, appelant à élaborer, en coopération avec d’autres organisations internationales concernées, un solide instrument juridique international qui permettrait de lutter contre la criminalité pharmaceutique, notamment, dans le cadre d’une approche européenne globale visant à contrer les contrefacteurs par la mise en réseau des structures et des procédures existantes. En 2006, la conférence internationale “L’Europe contre les médicaments de contrefaçon”, organisée à Moscou par la Russie, permet aux États participant de lancer des travaux afin d’élaborer une convention visant à combattre la criminalité pharmaceutique. En 2010, la convention Médicrime est présentée lors d’une conférence internationale du Conseil de l’Europe2.

Contenu de la convention Médicrime

La convention Médicrime3 prévoit la mise en place d’une réponse pénale à la contrefaçon et à la falsification de documents relatifs à des médicaments, y compris vétérinaires, des dispositifs médicaux, des substances actives, des excipients et des matériaux utilisés pour la fabrication de ces produits, ainsi qu’aux infractions similaires menaçant la santé publique. Parmi ces infractions similaires, la convention fait expressément figurer les trafics de produits sans autorisation ne remplissant pas les exigences de conformité. Le texte distingue deux notions : la contrefaçon et la falsification. En effet, la seconde notion doit être différenciée de la première en ce que la contrefaçon désigne l’atteinte portée à un droit de propriété intellectuelle, alors que la falsification a vocation à couvrir un panel d’infractions plus large. Toutefois, on peut légitimement considérer que la contrefaçon de marque par reproduction ou imitation, de dessins et de modèles, ainsi que, dans certains cas, la contrefaçon de brevets, sont implicitement visées par cette définition large de la falsification, ces attein tes étant de “fausses représentations” de l’identité d’un produit de santé.

Avec la convention Médicrime, le Conseil de l’Europe permet de constituer en infraction pénale, au niveau international :

– la fabrication intentionnelle de produits vétérinaires contrefaits, de leurs substances actives, excipients, éléments, matériaux et accessoires contrefaits, et leur adultération (ajout ou substitution préjudiciable non déclarée réduisant la qualité du produit) ;

– la fourniture intentionnelle, l’offre de fourniture, le trafic, y compris le sto ckage, l’importation et l’exportation de produits vétérinaires contrefaits. La fourniture désigne les actes qui consistent à procurer, à vendre, à donner, à proposer gratuitement les contrefaçons ou encore à assurer la promotion de ces produits ;

– la fabrication et la falsification intentionnelle de documents, notamment les emballages, les étiquetages et les contenus internet accompagnant le produit ;

– la fabrication ou la fourniture non autorisée de produits vétérinaires ;

– la complicité et la tentative de perpétration de contrefaçon.

La convention établit, par ailleurs, le cadre d’une coopération nationale et internationale intersectorielle entre les administrations publiques concernées, ainsi que celui de la mise en place de mesures de coordination à l’échelle nationale, de prévention s’adressant aux secteurs publics et privés et de protection des victimes et des témoins. Elle prévoit également la création d’un organe de supervision de la mise en œuvre de la convention par les États signataires. Des sanctions dissuasives et for tes sont également prévues contre les personnes physiques et morales, telles que l’emprisonnement ou encore l’interdiction temporaire ou définitive d’exercer une activité commerciale.

Entrée en vigueur

Le Conseil de l’Europe a adopté la convention Médicrime le 12 mai 2010. Le 28 octobre 2011, celle-ci a été ouverte à la signature et à la ratification à l’occasion d’une conférence internationale. À l’instar d’autres accords récents, cette convention est ouverte aux États membres et non membres du Conseil de l’Europe. Aujourd’hui, 26 États, dont la France, en sont signataires. Entrée en vigueur le 1er janvier 2016 après la ratification par cinq États, dont trois membres du Conseil de l’Europe, la convention devrait être ratifiée par la France d’ici l’été. Mais sa législation appréhende la contrefaçon de produits de santé, y compris vétérinaires, dans plusieurs codes (pénal, de la santé publi que, de la consommation, etc.). À titre d’exemple, la loi d’avenir agricole d’octobre 2014, pilotée par le ministère de l’Agriculture, a prévu des modifications relatives aux infractions pénales portant sur les médicaments vétérinaires, afin d’incriminer leur falsification et leur tentative de falsification et d’harmoniser les sanctions encourues s’agissant des infractions relatives à la mise en circulation de produits vétérinaires ne bénéficiant pas d’autorisation de mise sur le marché.

L’importance de la sensibilisation

Face au développement du trafic des médicaments falsifiés dans le monde, les académies et les Ordres des professionnels de santé, y compris des vétérinaires, ont signé, le 5 avril 2016, un manifeste4 appelant notamment la France à ratifier la convention Médicrime et à mettre en œuvre sa politique de répression des trafics touchant aux produits de santé. Les signataires ont aussi rappelé que, dans le cadre de l’approche “une seule santé”, il est important de disposer de médicaments vétérinaires de bonne qualité pour leur impact direct sur la santé animale et humaine. Ils précisent par ailleurs que la lutte contre les médicaments falsifiés doit en conséquence s’étendre au médicament vétérinaire, en supplément du médicament humain. Ils recommandent notamment de sensibiliser l’ensemble des professionnels de santé, dont les vétérinaires, aux conséquences dramatiques du trafic des médicaments falsifiés dans les pays pauvres, mais également dans les pays économiquement développés, en imposant une formation initiale et continue adaptée à ce fléau.

Formations e-Learning

Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

En savoir plus

Boutique

L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire

Agenda des formations

Calendrier des formations pour les vétérinaires et auxiliaires vétérinaires

Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.

En savoir plus


Inscrivez-vous gratuitement à nos Newsletters

Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.

Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire

Retrouvez-nous sur
Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr