Immunothérapie lors de dermatite atopique - La Semaine Vétérinaire n° 1668 du 01/04/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1668 du 01/04/2016

CONFÉRENCE

Pratique canine

FORMATION

Auteur(s) : Pascal Prélaud*, Thomas Brément**

Fonctions :
*Diplomate ECVD, praticien
à la clinique Advetia (Paris).
Article rédigé d’après une présentation
faite lors du congrès du Gedac à Paris,
en mars 2015.

Malgré son utilisation depuis 70?ans en médecine vétérinaire et la reconnaissance de son efficacité, la désensibilisation n’est utilisée que dans 6 % des cas de dermatite atopique canine. Cela s’explique par le recours plus facile aux traitements immunomodulateurs et aux antiprurigineux topiques, de plus en plus sophistiqués. Pourtant, la mise en place de ce traitement a été simplifiée et permet d’assurer un suivi régulier.

Résultats

Peu d’études sont disponibles sur l’efficacité de l’immunothérapie. Cependant, une étude franco-belge1 multicentrique en double aveugle montre une amélioration significative des scores de prurit et lésionnels. La thérapeutique est toutefois longue et coûteuse et l’amélioration observée est souvent partielle. Ces données doivent être expliquées au propriétaire.

Choix des allergènes

Le choix des allergènes se fait selon les résultats des intradermoréactions (IDR) ou de tests sérologiques dosant les immunoglobulines E (IgE) spécifiques. L’interprétation doit tenir compte de l’anamnèse, surtout en cas de désaccord entre les deux techniques. Les laboratoires fournissant des extraits thérapeutiques à usage vétérinaire (allergènes préparés pour un seul animal, APSA), à privilégier, sont peu nombreux2. Le choix du mélange tient compte de l’anamnèse, des interactions entre les différents allergènes, de la qualité de l’extrait d’allergène (éviter les extraits totaux) et des données de la littérature (résultats meilleurs avec les extraits de pollens et d’acariens des poussières).

Les acariens des poussières, avec en tête Dermatophagoides farinae, sont souvent réactifs. Une étude3 montre cependant qu’une désensibilisation seule à D. farinae lors de polysensibilisation ne peut être justifiée. De plus, des acariens dits de stockage sont également incriminés, bien que leur action allergisante soit discutée. Ainsi, les recommandations actuelles sont de désensibiliser à ces acariens uniquement en cas d’allergie isolée sans sensibilisation aux Dermatophagoides sp. Concernant les pollens, il n’est pas utile d’envisager une désensibilisation s’il y a discordance entre les données anamnestiques (prurit saisonnier, calendrier pollinique) et les résultats des tests allergologiques. Cette remarque ne vaut pas pour les pollens de graminées qui se retrouvent toute l’année. Leur incorporation dans les extraits thérapeutiques d’allergènes peut donc être conseillée dans le traitement d’une dermatite atopique non saisonnière. Les mélanges doivent privilégier un nombre limité d’allergènes et associer de préférence acariens et pollens.

Protocole

Différentes modalités sont décrites et varient selon le type d’extraits utilisés, la réponse thérapeutique et l’expérience du clinicien. Les protocoles classiques débutent à une dose très faible, progressivement augmentée en doublant la posologie à chaque injection jusqu’à une dose maximale. Il existe une alternative avec des protocoles simplifiés monodoses consistant à injecter par voie sous-cutanée d’emblée la dose d’entretien (0,8 ml). Afin de répondre à la demande des propriétaires et d’assurer le confort de l’animal, tout traitement symptomatique peut être prescrit. Si aucune donnée n’est disponible concernant la ciclosporine ou l’oclacitinib, l’utili?sation d’une corticothérapie est associée à une moindre efficacité de l’immunothérapie. De façon générale, l’immunothérapie doit être suivie à vie, un arrêt brutal (même après plusieurs années de traitement) pouvant aboutir à une rechute.

Effets secondaires

Quelques effets secondaires sont rapportés : des réactions aux sites d’injection peu fréquentes spontanément réversibles en quelques jours ou des réactions syndromiques d’aggravation dans 5 à 20 % des cas avec des extraits adjuvés. Ces réactions bénignes se traduisent par un prurit généralisé apparaissant le lendemain de l’injection et, plus rarement, par de l’urticaire ou un angiœdème. De tels épisodes peuvent être gérés à l’aide d’antihistaminiques ou en effectuant une progression plus lente des doses.

  • 1 Biovac.

  • 2 Leur liste figure sur le site de l’Agence nationale de sécurité sanitaire.

  • 3 Willemse et coll. Dermatophagoides farinae-specific immunotherapy in atopic dogs with hypersensitivity to multiple allergens : a randomised, double blind, placebo-controlled study. Vet. J. 2009;180:337-342.

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