Conscience animale : anthropomorphisme ou réalité scientifique ?

L’animal de compagnie évolue dans un environnement typiquement “humain”. Nous influençons son rapport avec le temps et l’espace et il est vu selon nos besoins ou nos envies. Il est souvent intégré comme un membre à part entière de la famille et sa personnification est alors de règle : nous lui accordons une conscience. Or, personne, de l’extérieur, ne peut objectivement avoir accès à ce vécu subjectif qu’est la conscience : la conscience animale garde un côté mystérieux et cette réflexion est finalement toujours d’actualité.

Si on se réfère au seul modèle de la conscience humaine, il est certainement plus simple de constater l’absence de conscience chez l’animal plutôt que sa présence. Croire en cet état est certainement déculpabilisant quand on en vient à abattre des animaux pour les manger, à les exploiter pour travailler ou à les utiliser pour la recherche et les expérimentations. Les arguments en faveur de l’inconscience des animaux ne manquent pas : ils incluent l’inaptitude à la parole (l’expression de la pensée), l’absence de création artistique, de faculté de perfectionnement, de capacité d’abstraction et d’invention, etc. Le fait que les animaux expriment de manière incontestable des émotions (peur, stress, bien-être, colère, etc.) n’est pas incompatible avec le fait de ne pas avoir de conscience. Il est ainsi possible de percevoir des stimuli, d’identifier un événement aversif, d’exprimer une émotion et d’adopter une séquence comportementale de manière totalement inconsciente. Alors ? Descartes avait-il raison ? Les animaux sont-ils vraiment des machines ?

Il était admis, jusqu’à récemment, que les fonctions cognitives dites supérieures (dont la conscience) siégeaient dans le néocortex. Or, en juillet 2012, une conférence sur le thème de la conscience humaine et animale s’est tenue à Cambridge et a fait le point sur ces connaissances¹. De manière remarquable, il a été montré que le substrat neuronal des émotions n’était finalement pas confiné aux structures corticales et n’était donc pas le privilège des animaux les plus évolués. Le réseau subcortical génère ainsi des sensations émotionnel les homologues chez tous les animaux : ces émotions sont perçues comme bonnes ou mauvaises et sont associées à un état affectif qui sera qualifié par l’homme de désirable ou indésirable. Certes, la conscience que l’on accorde aux animaux diffère de celle de l’homme, mais pas par sa nature : par son degré. En d’autres termes, il existe vraisemblablement une multitude d’états intermédiaires entre l’absence de conscience et la pleine conscience, telle qu’elle peut être définie pour l’homme. En conclusion, l’absence de néocortex n’exclut pas chez un organisme même “inférieur” la possibilité de ressentir des états émotionnels et d’exprimer un état de conscience et donc de… souffrir.

• 1 http://fcmconference.org.