Un indicateur, mais pas un présupposé systématique - La Semaine Vétérinaire n° 1660 du 05/02/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1660 du 05/02/2016

MALTRAITANCE ANIMALE ET VIOLENCE DOMESTIQUE

Actu

Auteur(s) : Chantal Béraud

Lors d’un récent colloque sur la médiation animale organisé par la Fondation Adrienne-et-Pierre-Sommer, une intervention a exploré les liens qui existent entre les maltraitances animale et humaine.

Sur l’écran défile une scène criante de vérité : celle d’une petite fille en train de sauter sur un trampoline avec deux chiots à ses côtés. Ses bonds s’accélèrent et les animaux risquent à tout moment d’être projetés dans le vide… « Cette vidéo a été filmée par des voisins, commente Marie-José Enders-Slegers, professeur en anthropozoologie à la faculté de psychologie Open University d’Heerlen, aux Pays-Bas. Une fois alertée, la police a ensuite constaté que, partout dans cette maison, traînaient des bouteilles vides, des cartons de pizza, et que les enfants de cette famille étaient négligés et maltraités. Donc oui, on peut affirmer que violences animales et humaines sont parfois corrélées, simultanées. Un animal que l’on fait souffrir peut être un indicateur menant à d’autres formes d’abus, même si ce n’est pas un présupposé systématique. »

Conduite en 2012 aux Pays-Bas, une enquête instruite auprès de femmes accueillies en maison-refuge pour cause de violences conjugales démontre que « 55 % d’entre elles disaient que leur partenaire brutalisait aussi l’animal de la maison », allant même jusqu’à le tuer dans 15 % des cas. « Lorsqu’il était en colère, il donnait des coups de pied dans le ventre du chien », témoigne l’une de ces malheureuses… Dans 33 % des cas, l’animal était même instrumentalisé pour les agresser ou les mordre ! Enfin, 41 % de ces femmes déclarent qu’elles ont différé leur fuite du domicile pour ne pas y abandonner leur animal.

Un tabou pour la profession ?

« Une autre étude a montré que si les vétérinaires remarquent ou suspectent un cas de maltraitance animale, majoritairement ils n’y donnent pas suite, poursuit Marie-José Enders-Slegers, lors du colloque sur la médiation animale organisé par la Fondation Adrienne-et-Pierre-Sommer. Pourquoi ? Soit parce qu’ils ont peur de violer un secret professionnel, soit parce qu’ils ne veulent pas perdre un client, soit parce qu’ils redoutent une vengeance à leur égard. Ou parce qu’ils ne savent tout simplement pas comment procéder, n’étant pas formés à ce propos. Ils peuvent aussi juger que c’est le rôle de la police, pas le leur. »

Pour les vétérinaires qui souhaitent agir se posent souvent des problèmes de rapidité d’action et de coordination interprofessionnelle. « C’est pourquoi les Pays-Bas ont créé, en 2011, un corps spécifique d’intervention dénommé Animal Cops. Des agents ont été formés en matière de violence domestique et de maltraitance animale. Un recueil de recommandations non obligatoire mais incitatif a aussi été édité par le ministère de la Santé à l’attention des vétérinaires. Quant à la maltraitance animale, elle fait aujourd’hui également partie du cursus des étudiants vétérinaires de notre pays. »

Les obstacles qui demeurent

Aux Pays-Bas, l’Ordre des vétérinaires a donc saisi l’importance du sujet. « Nos vétérinaires ont compris qu’il était de leur devoir d’établir de tels signalements, mais cela leur reste quand même difficile à accomplir, constate Marie-José Enders-Slegers. Ils ont, en particulier, toujours peur que cette violence puisse se retourner contre eux, même s’il leur est désormais possible d’établir un signalement anonyme auprès de leur police de proximité. Des questionnaires ont aussi été élaborés afin de les aider à mieux mesurer le degré de risque de la maltraitance. En conclusion, je dirais que des progrès ont donc déjà été réalisés, mais qu’il faut encore y travailler de façon transdisciplinaire. »

Quel rôle pour les vétérinaires français ?

« En France également, l’Ordre vétérinaire se sent aujourd’hui très concerné par cette thématique », intervient Dominique Autier-Dérian, consultante spécialisée en comportement et bien-être animal à Animal Welfare Consulting. « Mais les vétérinaires ne sont pas formés sur ces questions, ils ne savent pas quelles preuves apporter pour étayer leurs témoignages. Le problème est aussi qu’il n’existe pas non plus de médecine légale vétérinaire. Même si la France semble en retard sur cette question, je pense que notre profession est en train de progresser dans ce domaine, en se fondant notamment sur les expériences déjà conduites dans d’autres pays. Un rapprochement intéressant avec l’Ordre des médecins est également en train de voir le jour. »

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