Ces jeunes qui obligent les chefs d’entreprise à revoir leur encadrement

L’approche générationnelle va permettre à chacun d’entre nous de mieux comprendre les différentes générations, explique Olivier Revol, pédo-psychiatre. Mieux comprendre les spécificités permet de s’y adapter pour développer les relations les plus fructueuses possible au sein de l’entreprise vétérinaire. »

L’approche générationnelle

L’approche générationnelle s’intéresse aux groupes sociaux ayant connu des expériences similaires. Bien entendu, elle ne suffit pas à prédire ni à expliquer tous les comportements des individus. Au cours des générations, les codes ont changé. « Les baby-boomers ont grandi avec des codes de devoirs (absence de guerre, importance de la famille, du travail, du statut social. La créativité était mal vue », explique Olivier Revol.

La génération X, la suivante, qui s’étire jusqu’en 1979, a connu «  la crise économique, l’inflation, le chômage, l’esprit orienté vers la nécessité d’avoir des biens et de les conserver ».

La génération Y est celle des individus nés de 1980 à 1995. « Vivre et avoir un bon équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, voilà leurs codes », poursuit Olivier Revol.

La génération suivante (née après 1995) est celle des Z, « dont l’esprit est de partager. Ils reprennent les valeurs des baby-boomers ».

Les origines de la mutation

La génération Y peut donc dérouter plus d’un chef d’entreprise. Quelle en a été la genèse ?

Tout d’abord, l’éducation. « Des enfants-rois, surprotégés et surinvestis par les adultes. Ces enfants Y, très désirés par leurs parents baby-boomers, presque choisis, ont été encensés, peu critiqués. Ils ont eu accès à un grand choix d’activités, ont été protégés du sentiment d’échec, sont devenus narcissiques. En tant que jeunes adultes, il est plus difficile pour eux d’accepter les remarques, les critiques », explique le pédo-psychiatre. Les parents ont par ailleurs été très impliqués, prêts à intervenir à tout moment dans tous les aspects de leur vie, ce qui leur vaut l’appellation de “parents hélicoptères”. Ces jeunes, surinvestis, ont appris à être considérés d’égal à égal.

La conséquence est que ces enfants n’ont pas développé une grande confiance en eux, éprouvent des difficultés à prendre des décisions et demeurent dépendants plus longtemps, notamment de l’appréciation de l’autre. Ils tendent en effet à interpréter l’absence de retour positif sur leurs actes comme un jugement négatif.

La société a également évolué, passant du passé simple au futur incertain. « Ils nous envient notre passé simple. Leur enfance a été marquée par une série d’événements préoccupants, tels que le sida, la fusillade à la Colombine High School, le 11 septembre, le tsunami de 2004, la guerre en Irak et, plus récemment, le 13 novembre. Dans une société où tout est accéléré, ces Y sont des Yolo (“You only live once”, on n’a qu’une vie). Leur approche est alors la suivante : “Si c’est ça, la vie, je commence par le dessert ! Mon épanouissement personnel n’est pas négociable” ». En outre, Internet a donné l’habitude d’avoir tout, et tout de suite. Les nouvelles technologies ont participé à cette évolution. « Internet est une extension de leur cerveau. Ils ne travaillent pas comme nous : pourquoi apprendre par cœur alors qu’Internet donne toutes les solutions ? Ils procèdent par essai-erreur, comme dans les jeux. » Lorsqu’un jeune est confronté à un problème, son premier réflexe est de se connecter. Il appartient aux autres générations d’accepter cette inversion de la hiérarchie. « Pour la première fois, les enfants apprennent des choses à leurs parents. La légitimité de l’adulte, du patron, du chef de service, n’est donc plus acceptée », commente Olivier Revol.

Travailler avec de jeunes adultes du XXI^e siècle

« Pour travailler avec eux, il convient de comprendre leurs attentes. Je fais du management participatif. Il importe pour ces jeunes adultes que l’on prenne soin de leur vie privée. Ils demandent à être écoutés et impliqués dans des projets ambitieux, il leur faut un mentor. »

Plus de paternalisme ni de flatterie, il faut leur “parler vrai”. « Il convient de leur faire part de notre expérience, pas de leur dispenser un cours. » Pour ces jeunes, le rythme doit être soutenu. Excès d’autorité et cadres trop stricts sont à éviter. Les jeunes adultes de la génération Y ont un style différent du nôtre, qui est le reflet de notre culture. Leur impact sur la société sera intéressant.

Olivier Revol conclut sur la génération Z : « Les plus jeunes sont beaucoup plus authentiques et en ont assez de leurs aînés. Ils sont plus proches des baby-boomers, plus optimistes, davantage dans le partage, sensibles, ce sont des “émo-boomers” ». Ils aspirent à retrouver stabilité, sécurité et sens du devoir. Plus tolérants et moins individualistes que les Y, ils sont idéalistes, lucides, optimistes et matures.