DÉCLARER DES EFFETS INDÉSIRABLES DUS AUX MÉDICAMENTS VÉTÉRINAIRES : MODE D’EMPLOI - La Semaine Vétérinaire n° 1657 du 15/01/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1657 du 15/01/2016

Décryptage

Auteur(s) : Stéphanie Padiolleau

La pharmacovigilance aide à garantir l’efficacité et l’innocuité des médicaments après l’obtention de l’autorisation de mise sur le marché (AMM). Elle repose, d’une part, sur un contrôle réalisé par les fabricants, et, d’autre part, sur les remontées d’information et de signalements effectués à 90 % par les vétérinaires, pour lesquels il s’agit d’une obligation déontologique et réglementaire.

Chiffres marquants en 2014

En 2014, 3 593 signalements de pharmacovigilance chez les animaux ont été enregistrés par l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), concernant 4 682 médicaments, dont 44,9 % pour des cas graves. 83,8 % d’entre eux concernent des carnivores domestiques, 8,1 % des bovins et moins de 3 % chacune des autres espèces. Les effets indésirables, un manque d’efficacité et un problème de résidus ont fait l’objet de, respectivement, 3 283, 302 et 8 signalements. Les déclarations de suspicion d’un manque d’efficacité ont presque doublé en 2014, par rapport à 2013 ; la majorité sont relatives à des vaccins.

Une utilisation de médicament en dehors du résumé des caractéristiques du produit (RCP) est mentionnée dans 33 % des déclarations, dont 51 % chez des chats et 36 % chez des chiens. Dans l’espèce féline, deux tiers des signalements d’effets indésirables après une administration hors AMM concernent des antiparasitaires, avec notamment 240 déclarations liées à l’emploi de perméthrine. Les antiparasitaires sont d’ailleurs la classe thérapeutique qui occasionne le plus de déclarations. Pour les vaccins, 71 % des déclarations les impliquant font référence à des cas graves. Les AMM de 26 médicaments ont été modifiées à la suite de signalements en 2014, essentiellement dans les rubriques “effets indésirables”, “mises en garde particulières” (Suprelorin®), ou pour des informations lors de surdosage (Histacalmine®).

Persistance d’une sous-déclaration

Malgré une augmentation progressive ces dernières années (+ 40 % entre 2010 et 2014), le nombre de signalements de pharmacovigilance est sous-évalué. Une enquête prospective a été effectuée en 2014 auprès de 30 vétérinaires volontaires qui devaient noter tous les cas relevant de la pharmacovigilance dont ils ont eu connaissance. Les résultats font état d’une moyenne de 4,96 effets indésirables par vétérinaire en pratique canine et de 2,06 chez les animaux de rente, soit 9 fois plus que ce qui est actuellement constaté. Pour Sylviane Laurentie, chef du département de pharmacovigilance à l’Agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV), « cela peut s’expliquer en partie par une frustration des praticiens ». En effet, après un signalement, les déclarants reçoivent un courrier, lequel n’est pas toujours concluant. Aucune conclusion n’est possible dans environ la moitié des cas, soit par manque de précision de la déclaration, soit parce que les effets sont inattendus ou inconnus, et, de ce fait, pas assez documentés. « Plus il y a de déclarations, plus cela permet d’affiner l’analyse statistique et de conclure. Il convient aussi de distinguer l’individuel du collectif : une déclaration seule n’a pas forcément un effet, mais un nombre croissant de signalements va alors entraîner une modification des RCP ou des actions d’information. » Ainsi, un retour sur les effets indésirables liés aux antiparasitaires a été présenté durant les journées de la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV), en mai 2015. Ceux liés aux anesthésiques et aux analgésiques ont été discutés en novembre 2015, lors du congrès de l’Association française des vétérinaires pour animaux de compagnie (Afvac). Une lettre mensuelle informe des mises à jour des RCP, avec les nouveaux effets décrits et les changements de fréquence, et un rapport annuel regroupe tous les éléments observés et les actions entreprises. Le formulaire actuellement proposé convient essentiellement aux cas individuels, mais une déclinaison adaptée aux lots d’animaux, développée avec le concours des filières, sera proposée dans le courant de l’année 2016. Une modification du site de télédéclaration de l’Anses est également à l’étude, afin de permettre aux déclarants de gagner du temps en créant notamment un compte, pour qu’ils n’aient pas à saisir leurs coordonnées à chaque fois, et en l’adossant à la base de données des médicaments vétérinaires.

Que faut-il déclarer ?

– les effets indésirables “graves” observés chez l’animal : mortalité, symptômes marqués, prolongés ou permanents, même lors d’une utilisation hors AMM ;

– les effets inattendus, c’est-à-dire ceux qui ne sont pas mentionnés dans la notice du médicament ;

– les effets connus, mais dont la gravité ou la fréquence a augmenté ;

– les suspicions de résidus en dehors des délais d’attente prévus ;

– les effets constatés chez l’homme ;

– les suspicions d’inefficacité ;

– les conséquences constatées dans l’environnement : pollution, effets sur la faune sauvage.

Comment déclarer ?

Le signalement d’un effet indésirable peut se faire soit par une télédéclaration sur le site de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (https://pro.anses.fr/notificationMV), soit en utilisant le formulaire papier et en le retournant à l’Anses-ANMV ou au Centre de pharmacovigilance vétérinaire de Lyon (CPVL). Un conseil téléphonique préalable peut également être obtenu auprès du CPVL. Ce dernier est nécessaire dès lors que plus de trois médicaments sont concernés. Un formulaire spécifique concerne les effets constatés chez l’homme.

Éléments indispensables

– le nom du ou des médicaments incriminés ;

– la description détaillée des signes constatés ;

– les données permettant d’établir une chronologie ;

– les coordonnées du déclarant ;

– une identification de l’animal.

Les détails à ne pas oublier

Les responsables de l’analyse des signalements d’effets indésirables ne font pas d’extrapolation. Il est donc important d’indiquer tous les éléments permettant d’exclure d’autres causes, comme les diagnostics différentiels ou les examens complémentaires. Par exemple, en cas d’avortement, il convient de préciser si des maladies infectieuses abortives ont été explorées et écartées, et, dans l’affirmative, lesquelles. Sinon, aucune conclusion n’est possible.

En l’absence d’indication contraire, les déclarations sont analysées en prenant l’hypothèse que le médicament a été utilisé selon les recommandations de l’AMM (dosage, voie d’administration, etc.). Les conditions d’utilisation sont donc à stipuler quand ce n’est pas le cas. Les données sont traitées anonymement, et les effets indésirables peuvent ainsi être signalés, même lors d’un emploi pas tout à fait “dans les clous”.

Nom du médicament

Dans le questionnaire, de nombreuses questions se recoupent afin d’identifier précisément de quelle spécialité il s’agit. Par exemple, Metacam®, Cydectine® et Baytril® existent sous plusieurs formes pharmaceutiques, avec différents dosages et voies d’administration, soit huit ou neuf spécialités, et il convient alors d’indiquer le nom complet de celle qui est en cause, même s’il est très long, ou bien le numéro d’AMM. Le numéro de lot, s’il n’est pas indispensable, prend en revanche toute son importance lors de défaut de qualité ou d’étiquetage d’un lot particulier, dans le cas, par exemple, où celui-ci est étiqueté par erreur avec un dosage à 20 mg/kg alors que le produit est dosé à 100 mg/kg, entraînant un surdosage.

Chronologie

Les questions portant sur la date d’administration, celle de début des effets indésirables, etc., interviennent dans le processus d’imputation des signes observés au médicament incriminé. L’analyse tient compte des propriétés pharmacologiques des produits afin de déterminer leur implication, même en cas d’effet non immédiat. Il est aussi conseillé d’indiquer les spécialités et substances employées en même temps que le médicament suspecté.

Description des signes observés

Cela peut sembler évident, mais se contenter d’inscrire « signes habituels de l’intoxication par tel produit » ne suffit pas. La description des symptômes observés, en des termes les plus précis possible, permet, à l’aide d’une analyse statistique, de déterminer l’augmentation de fréquence ou de gravité des effets indésirables connus, et de repérer des manifestations inhabituelles.

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