« Sans micro-organismes, pas de cheval ! » - La Semaine Vétérinaire n° 1656 du 08/01/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1656 du 08/01/2016

COMMUNICATION

Pratique mixte

L’ACTU

Auteur(s) : Marine Neveux

En décembre dernier, et pour la septième année d’affilée, les équirencontres Merial-Avef se sont tenues au Salon du cheval de Paris.

Ces rencontres organisées par le laboratoire Merial et l’Association vétérinaire équine française (Avef), sous l’impulsion de notre confrère Michel Pechayre, sont l’occasion pour la profession de communiquer directement auprès des propriétaires, des cavaliers, des éleveurs, etc. L’édition 2015 des équirencontres, au Salon du cheval de Paris, avait pour thème l’alimentation.

La planète microbienne

« Sans micro-organismes, pas de cheval ! » Telle est la démonstration de notre consœur et professeur Véronique Julliand, chercheur à AgroSup Dijon. Le foin et les micro-organismes digestifs sont, en effet, des facteurs clés de la santé de l’équidé. « La planète microbienne qui vit dans le tube digestif du cheval est variée », ajoute-t-elle.

Les micro-organismes du tractus du cheval sont identifiés depuis longtemps. Cent millions de champignons, 10 milliards de protozoaires arqués et 1 million de milliards de bactériophages et de bactéries sont ainsi retrouvés dans le gros intestin. « Notre cheval de 500 kg possède environ 3 à 4 kg de ces micro-organismes qui vont travailler pour lui et l’aider à survivre », martèle Véronique Julliand. Ces derniers participent à la fonction de digestion de l’équidé.

La digestion microbienne consiste en la transformation des fibres des végétaux en oligosaccharides, lesquels sont convertis en acides gras à courte chaîne (AGCC) par d’autres micro-organismes. L’amidon des céréales est aussi transformé en oligosaccharides, plutôt sous la forme de lactate, ce qui peut jouer des tours à l’animal en créant une acidose. Ces AGCC vont être à l’origine de l’énergie de l’équidé. « Le cheval va pouvoir tirer profit des fourrages pour 50 à 80 % de ses besoins énergétiques », explique notre consœur. Et leur rôle est également important dans l’absorption d’eau.

Alimentation et comportement du cheval

Une autre fonction des micro-organismes réside dans la modulation du comportement de l’équidé. « Il ne s’agit encore que de bribes de connaissances à ce sujet. » Une expérience a ainsi été menée. Du foin a été distribué à des chevaux et de l’orge ajoutée à leur ration. Ce passage d’une alimentation à base de foin à une nutrition à base de foin et d’orge induit des modifications comportementales chez l’animal. Pour objectiver ces changements, plusieurs examens ont été réalisés : tout d’abord, un test de néophobie (peur d’un objet nouveau) pour lequel le cheval est mis en face d’un objet qu’il n’a jamais vu, afin d’examiner sa réaction ; ensuite, un test de sociabilité où il est confronté à un congénère qu’il ne connaît pas ; enfin, une mesure du budget temps (ce que le cheval fait dans sa journée). Le changement de régime alimentaire a une influence sur les micro-organismes intestinaux. Ces modifications vont dans le sens d’une l’acidose et induisent potentiellement des coliques du gros intestin. « Les chevaux qui consomment foin et orge présentent une hausse de la vigilance que l’on considère comme un comportement qui augmente le stress dans l’espèce équine. » Cette élévation de la vigilance a été évaluée lors des tests de comportement à l’objet nouveau et de sociabilité. Une corrélation entre la modification des micro-organismes présents dans le tube digestif du cheval et son comportement a ainsi été démontrée. Ce phénomène était déjà connu pour d’autres espèces animales.

Les micro-organismes jouent donc un rôle important dans l’état d’esprit du cheval. Distribuer du foin à un équidé, c’est pour son bien-être et son confort intestinal.

Des recommandations

L’équidé a besoin de foin, bien sûr, mais, surtout, il convient de prendre soin de sa planète microbienne. « Vous nourrissez le cheval, mais, à travers lui, vous nourrissez sa planète microbienne. Il va falloir que vous connaissiez chaque fourrage que vous lui distribuez », renchérit Véronique Julliand. En effet, tous les produits n’ont pas la même valeur nutritive ni la même valeur santé. Notre confrère Charles Barré, vétérinaire conseil en nutrition équine et responsable de la commission alimentation de l’Avef, ajoute : « Il y a une énorme variabilité de la qualité du foin et, si vous n’effectuez pas d’analyse, vous n’avez aucune idée des propriétés du vôtre. »

Selon Véronique Julliand, « au niveau européen, la distribution de 1,5 % du poids vif en matière sèche de foin est actuellement conseillée ». À partir des essais réalisés sur les relations entre le fourrage, les micro-organismes et le comportement du cheval, « un apport jusqu’à 2 % du poids vif est recommandé par des chercheurs britanniques. De telles valeurs sont encore difficiles à atteindre aujourd’hui, mais ce serait l’idéal ». Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas distribuer de concentrés. Il existe des situations où la demande énergétique est très élevée et presque impossible à couvrir seulement avec du foin.

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