Reproduction en élevage allaitant : comment en améliorer les performances ? - La Semaine Vétérinaire n° 1656 du 08/01/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1656 du 08/01/2016

REPRO 2020

Pratique mixte

FORMATION

Auteur(s) : Serge Trouillet

Dans tout système et quelle que soit la race, la gestion de la reproduction a un impact direct sur l’économie de l’élevage, et donc sur le revenu de l’éleveur. Cet impact peut être d’autant plus fort que la marge de progression en élevage allaitant est importante. Les experts de Repro 20201 en ont exposé les principaux leviers lors de leur symposium au Sommet de l’élevage, le 7 octobre 2015 à Clermont-Ferrand.

Si l’on compare à la moyenne générale les performances moyennes nationales obtenues dans le quart supérieur des élevages enregistrés selon le référentiel Bovins croissance 2013 (10 537 cheptels), l’écart de productivité globale moyenne est éclairant : 14,9 veaux sevrés en plus par an pour 100 vaches présentes (107,6 % contre 92,7 %). La différence sur l’âge au premier vêlage est certes faible (0,3 mois), mais le pourcentage de naissance est plus élevé (+ 2,5 %), la mortalité avant sevrage est plus faible (3,4 %), les veaux nés de l’insémination artificielle sont plus nombreux (+ 2,8 %) et l’intervalle vêlage-vêlage (IVV) du troupeau est réduit de 9 jours. Les marges de progrès sont donc réelles. Mais si des différences de performances sont observées entre les races, la variabilité entre les élevages au sein d’une même race est encore plus grande. Les données des 500 cheptels inscrits au livre généalogique de la blonde d’Aquitaine, qui sont en contrôle de performances, en constituent un exemple probant, avec des écarts très marqués (infographie). Des variations régionales sont avérées, liées le plus souvent à la conduite du troupeau.

Réussir la reproduction des génisses

Une vaste étude menée dans les Pays de la Loire sur 231 000 génisses a mis en évidence un premier vêlage tardif, au-delà de 36 mois pour plus d’une femelle sur trois, dans les différentes races.

Nous sommes loin des 30 mois que permet notamment la double période de vêlage, avec ses retombées économiques : plus de 3 000 € (conjoncture 2010) pour un élevage type charolais avec 70 vêlages et 22 génisses élevées. Le vêlage à 2 ans requiert une technicité optimale. Par ailleurs, au regard des naissances plus difficiles sur les veaux lourds et de leurs conséquences (augmentation de la mortalité avant sevrage, IVV dégradé, croissance des veaux affectée, premiers vêlages des femelles plus difficiles, etc.), il faut contrôler l’accroissement des poids de naissance en en tenant compte dans les accouplements, élever suffisamment de génisses pour pouvoir réformer les primipares à vêlage difficile ou dont le veau est mort, et pratiquer ainsi un taux élevé de renouvellement.

Enfin, il convient d’adapter les rythmes de croissance à l’âge au premier vêlage, selon quatre règles simples : assurer un bon démarrage des veaux, choisir pour le renouvellement des femelles lourdes et développées, atteindre un poids suffisant lors de la mise à la reproduction, et avoir des croissances hivernales modérées pour jouer la croissance compensatrice et réduire les coûts de production. Les poids des génisses doivent être de 35 à 40 % du poids vif adulte au sevrage (40 % pour les vêlages à 2 ans), 60 à 75 % pour la mise à la reproduction, et 80 à 90 % selon l’âge, après le vêlage.

Grouper les vêlages

Grouper les vêlages s’avère pertinent. Pour cela, les génisses sont mises à la reproduction 3 semaines avant les vaches, le premier IVV des primipares étant plus long que les suivants. L’insémination est préférable à la monte naturelle, et effectuée soit sur chaleurs observées, soit en recourant à des traitements de maîtrise des cycles. Les détecteurs de chaleurs (implants auriculaires ou dispositifs vaginaux) permettent d’avoir entre 55 et 70 % de réussite en première insémination.

Les meilleures périodes pour observer les chaleurs sont une heure ou deux avant la distribution de la nourriture du matin et du soir, ou après celle du matin, assurant une détection pouvant atteindre 85 % des vaches en chaleur. L’insémination est réalisée dans la demi-journée qui suit la détection des chaleurs, en utilisant des taureaux dont les index répondent aux objectifs de l’élevage. Il s’agira de faciliter la naissance ou de produire des femelles de renouvellement, des broutards, des taurillons, etc. L’établissement d’index génomiques, à partir d’une simple prise de sang, et la mise à disposition de la semence sexée enrichissent dorénavant le choix du taureau d’insémination.

Bien choisir le taureau de monte naturelle

Le futur taureau reproducteur, dont le choix de la génétique a été raisonné, doit pouvoir transmettre cette génétique tout en évitant la transmission de maladies. Le vétérinaire apporte alors les conseils et les garanties nécessaires pour la réalisation des examens à effectuer lors de l’introduction du taureau dans l’élevage. À l’achat, si le passeport renseigne sur le statut du cheptel vis-à-vis de certaines maladies contagieuses, la signature d’un billet de garantie conventionnelle, avec mention des autres affections recherchées lors de la visite sanitaire d’introduction, est fortement recommandée, avec le détail du protocole des examens prévus.

L’examen fonctionnel débutera par un examen clinique général classique, en insistant plus particulièrement sur le comportement, l’état corporel, l’appareil locomoteur et l’appareil oculaire, qui conditionnent la libido et la fonction sexuelle du taureau. Il se poursuivra par un examen spécifique de son appareil génital externe et interne. Afin d’évaluer sa capacité reproductrice, l’examen de son comportement en présence d’une vache en chaleur permet d’apprécier sa libido, la qualité du saut, de l’intromission du pénis et du coup de rein. La récolte du sperme, soit par électroéjaculation, soit au vagin artificiel, permet d’en apprécier la qualité. Quant à l’examen sanitaire, il ne devra avoir lieu qu’après une période d’isolement du taureau d’au moins 28 jours.

Limiter le nombre de jours improductifs

L’utilisation de moniteurs de surveillance réduit la présence humaine au strict nécessaire. L’occurrence du vêlage peut ainsi être assez bien prédite par le suivi de la température rectale, et mieux encore par celui de la température vaginale. Une chute de température de plus de 0,4 °C sur les dernières 24 heures annonce un vêlage dans les 36 heures qui suivent, dans 85 % des cas. De même, le nombre et la durée, plus importants, de relevés de queue quelques heures avant le vêlage présumé, sont autant de signes annonciateurs d’une dystocie. À la différence de l’observation de la réduction du temps passé à manger, ou de la diminution de la consommation de matière ingérée, ces critères sont plus facilement mesurables : il suffit d’équiper les vaches d’inclinomètres adaptés.

La façon dont se déroule le vêlage a un impact sur l’incidence des inflammations utérines, les endométrites, dont la présence perturbe l’ensemble de la physiologie de la reproduction de la vache : moindre expression des chaleurs, taux de réussite de l’insémination inférieur, mortalité embryonnaire. L’endométrite est un phénomène complexe dont les formes subcliniques, chez les vaches laitières, sont deux fois plus nombreuses que les formes cliniques. Reste à déterminer la prévalence de cette maladie sur le cheptel allaitant afin d’agir sur elle et d’améliorer les performances du troupeau en limitant le nombre de jours improductifs.

Viser des objectifs d’état corporel

L’état des réserves corporelles à un instant donné et ses variations sont des indicateurs pris en compte par l’organisme avant de s’engager dans un nouveau processus de reproduction. L’intervalle entre le vêlage et le premier cycle, qui constitue la première étape de ce processus, est plus long de 15 à 20 jours pour la primipare. Il est de 19 jours en moins quand la note d’état corporel passe de 1,5 à 3. D’autres facteurs peuvent intervenir, liés à la conduite du troupeau : niveau alimentaire, présence précoce du taureau, saison, allaitement. Cependant, au-delà d’une note d’état au vêlage de 2 à 2,5, sur des primipares charolaises, la note n’a plus d’effet sur cet intervalle.

L’intervalle vêlage-vêlage diminue de 25 à 30 jours quand la note d’état des primipares passe de 1 à 3 en fin d’hiver. Cette interaction se manifeste également chez les multipares, d’autant plus que le vêlage est précoce, mais avec un IVV diminuant de 10 jours au plus. Plus la variation de cette note au cours de l’hiver est positive, plus l’IVV diminue, mais l’écart ne dépasse pas 10 jours, tant chez les primipares que chez les multipares. L’Institut national de la recherche agronomique (Inra) se sert de ces résultats pour bâtir des recommandations alimentaires, avec des objectifs de notes d’état, notamment en fin d’hiver.

Optimiser le suivi de reproduction

Par le diagnostic échographique de gestation, précocement, dès 28 jours, il est possible d’apprécier la viabilité du fœtus et de déterminer son âge, de détecter la présence de jumeaux et donc de surveiller davantage les vaches au vêlage. L’examen postnatal, vaginal et rectal, manuel et échographique, est réalisé à partir de 21 jours post-partum. Il permet de repérer les conséquences pathologiques le plus tôt possible, de dépister et de traiter immédiatement les endométrites cliniques, ainsi que d’observer la reprise de la cyclicité.

Le suivi de reproduction est ainsi un vecteur déterminant de réduction de l’IVV et d’augmentation du taux de gestation : il favorise la réforme plus précoce des vaches infertiles, la remise en reproduction immédiate des vaches vides, la détection rapide des problèmes d’anœstrus et donc leur traitement, ainsi que la mise en évidence, en monte naturelle, des problèmes d’infécondité du taureau. Il facilite aussi la gestion des animaux gravides (surveillance des vêlages ; suivi du calendrier des vaccinations) et celle du sevrage.

De nombreux outils sont aujourd’hui mis à la disposition des éleveurs, par le biais de la génétique, de la technologie, de l’innovation, pour qu’ils deviennent plus compétitifs et se préparent à s’ouvrir davantage sur l’Europe. Tous ces leviers d’amélioration des performances de reproduction, en élevage allaitant, leur permettent d’accroître leur productivité sans dégrader leur qualité de vie, deux facteurs essentiels pour la pérennité de leur exploitation.

  • 1 Voir La Semaine Vétérinaire n° 1649 du 6/11/2015, pages 36 et 37.

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