EMPREINTE ENVIRONNEMENTALE VIANDE ET PRODUITS CARNÉS QUELLES PROBLÉMATIQUES ? - La Semaine Vétérinaire n° 1649 du 06/11/2015
La Semaine Vétérinaire n° 1649 du 06/11/2015

Décryptage

Auteur(s) : Serge Trouillet

Quelle est la contribution de l’élevage et des produits carnés aux impacts environnementaux des activités humaines ? Quelles en sont les différentes problématiques ? Témoignages.

Des méthodes d’évaluation pas encore stabilisées

Les émissions de gaz à effet de serre (GES) induites par l’élevage représentent 14,5 % de celles liées aux activités humaines. Le méthane entérique chez les bovins et la phase de production des aliments concentrés chez toutes les espèces en sont les principaux contributeurs. Toutefois, les systèmes d’élevage extensif, pourvoyeurs de bilans d’émissions de GES élevés, ramenés au kilo de viande produite, participent au maintien des surfaces en prairie et donc potentiellement au stockage de carbone sous prairie. Mais cela n’apparaît pas dans les études de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), faute d’un cadre d’évaluation consensuel.

Les méthodologies d’évaluation de l’empreinte eau ne sont pas non plus stabilisées. Pour la phase élevage, des fourchettes de consommation d’eau vont de un à quatre par kilo de bœuf ! Mieux connues sont les principales pollutions des eaux, d’abord par les rejets en nutriments. Comme la capacité de rétention de l’azote et du phosphore par les animaux reste limitée (22 à 40 %), l’utilisation des effluents pour la fertilisation des cultures ne suffit pas : une fraction non négligeable de ces nutriments se retrouve dans les écosystèmes et en particulier dans l’eau. Les effets de l’utilisation d’antibiotiques (avec les risques d’antibiorésistance), de produits de traitements vétérinaires (notamment antiparasitaires) et le transfert des métaux lourds (cuivre, zinc, etc.) voire d’agents pathogènes transmissibles à la faune sauvage ou même à l’homme sont également considérés. Mais, là encore, le cadre des méthodes permettant de les quantifier appelle plus de stabilité.

L’empreinte environnementale de l’élevage repose donc sur un ensemble de connaissances et de méthodes d’évaluation qui restent à uniformiser. Les cadres de calcul ne font pas toujours l’objet d’un consensus. Cette empreinte est cependant de mieux en mieux cernée. L’application de l’analyse du cycle de vie (ACV) à l’évaluation environnementale des produits agricoles, et en particulier des produits carnés, a changé la perception des impacts environnementaux. En utilisant une approche multicritère, elle apporte une vision plus large des systèmes de production. Cela permet de mettre en évidence l’apparition d’éventuels transferts d’impacts, par exemple le traitement du lisier qui peut limiter l’eutrophisation mais augmenter le changement climatique. Reste que la vision des productions animales uniquement en termes d’impacts négatifs semble devoir être revisitée. La prise en compte des services rendus à l’homme par les agroécosystèmes, notamment ceux liés à l’élevage, doit pouvoir ouvrir des perspectives de développement davantage agroécologiques.

Impacts environnementaux de produits carnés

Une étude comparant sept produits carnés (poulet entier, filet de poulet, rôti de porc, échine de porc, rosbif, steak haché et saucisse de porc) permet de montrer que les produits carnés bovins ont des impacts environnementaux largement supérieurs à ceux des produits des poulets et des porcs, pour les impacts étudiés : climat, énergie cumulée consommée, acidification et eutrophisation. Elle permet également d’identifier des améliorations possibles, en agissant d’abord sur l’élevage, principal contributeur aux impacts environnementaux, mais aussi en diminuant au maximum les pertes à l’abattoir et à l’usine de découpe et conditionnement, en limitant le transport et en réduisant l’impact du packaging, à condition toutefois de considérer le conditionnement comme une étape importante, qui limite le gaspillage et assure la sécurité sanitaire.

Impacts environnementaux et résultats économiques:

Une évaluation conjointe des impacts environnementaux – émissions de GES et consommations d’énergie non renouvelable (ENR), selon la méthode de l’analyse du cycle de vie (ACV) – et des résultats économiques a été réalisée par l’Inra auprès de 59 fermes d’un réseau d’élevage bovin allaitant charolais. Il est posé que les émissions de gaz à effet de serre (GES) et les consommations d’ENR sont des indicateurs environnementaux comme les autres, que l’élevage bovin viande, en zone herbagère, rend des services environnementaux par la préservation et l’utilisation des prairies, et que les stratégies de limitation des émissions de GES ne doivent pas affecter d’autres piliers de la durabilité des systèmes d’élevage, tels que l’économie de l’exploitation. Il s’avère que les exploitations de grande taille, mettant sur le marché de la viande bovine et des céréales, semblent être moins efficaces techniquement, économiquement et environnementalement ; elles ne profitent pas des économies d’échelle liées à la taille et de gamme liées à la diversification.

Empreinte carbone du jeune bovin franco-italien

L’empreinte carbone, qui traduit l’impact potentiel d’un produit sur le changement climatique, est l’indicateur couramment utilisé pour traduire la performance environnementale des systèmes de production. Le calcul de celle du jeune bovin né en France et engraissé en Italie informe à la fois sur la contribution prépondérante de l’étape française (étape qui concourt le plus à l’empreinte carbone, notamment en raison du méthane entérique émis) et sur l’importance de la participation des postes d’utilisation d’intrants en Italie. Au regard d’études comparables menées à l’étranger, il peut être performant environnementalement de combiner une phase d’élevage extensif à l’herbe avec une phase d’engraissement plus intensive de l’animal. Cet effet est renforcé si l’on tient compte de la compensation permise par le stockage de carbone sous prairie, qui atténue dès lors une partie des émissions de méthane entérique sur la phase d’élevage.

Potentiel de réduction de l’IC de différents scénarios alimentaires

Pour minimiser l’impact carbone (IC) d’une ration alimentaire, il est nécessaire d’en réduire la part de produits animaux. La limite de l’exercice se heurte cependant à une réalité : ces aliments sont vecteurs de nutriments essentiels et leur biodisponibilité, la fraction ingérée assimilable par l’organisme, est souvent meilleure que dans les aliments d’origine végétale. Il convient donc d’incorporer à cette ration de petites quantités de produits animaux spécifiques pour couvrir les besoins de l’organisme en certains nutriments. Dans le cadre de régimes majoritairement végétaux, la couverture des besoins physiologiques impose de considérer l’influence de la biodisponibilité des nutriments.

  • Décryptage réalisé à partir d’un ensemble de conférences présentées sur ce thème lors des 15es journées sciences du muscle et technologies des viandes (JSMTV) à Clermont-Ferrand, en novembre 2014.

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