Le point sur la dermatite atopique féline - La Semaine Vétérinaire n° 1647 du 23/10/2015
La Semaine Vétérinaire n° 1647 du 23/10/2015

DERMATOLOGIE

Pratique canine

L’ACTU

Auteur(s) : Gwenaël Outters

L’existence ou non d’une dermatite atopique chez le chat est un sujet polémique. Notre consœur Catherine Laffort-Dassot a livré son point de vue lors de sa présentation au dernier congrès de l’Association française des vétérinaires pour animaux de compagnie (Afvac).

Peut-on parler de dermatite atopique chez le chat ?

Catherine Laffort-Dassot : La dermatite atopique se définit chez l’homme ou le chien comme une maladie de peau inflammatoire et prurigineuse avec prédisposition génétique, possédant des caractéristiques cliniques spécifiques, et associée le plus souvent à la présence d’immunoglobulines E (IgE) spécifiques d’allergènes de l’environnement. Chez le chat, face à ce que l’on serait tenté de qualifier de dermatite atopique, les deux premiers critères de la définition sont effectivement présents (maladie de peau inflammatoire et prurigineuse), mais il ne semble pas y avoir de prédisposition génétique. De plus, les signes cliniques sont peu spécifiques et variables (prurit cervico-facial, dermite milliaire, complexe granulome éosinophile, alopécie auto-induite, otite cérumineuse, etc.). Chez le chat, la présence de cinq critères parmi les huit suivants est en faveur d’une dermatite par hypersensibilité non liée aux puces, avec une sensibilité de 75 % et une spécificité de 76 % : au moins deux sites atteints, au moins deux patrons lésionnels, une alopécie symétrique, des lésions labiales, des érosions et des ulcères, une absence de lésion dorso-lombaire, une absence d’alopécie non symétrique en région dorso-lombaire ou caudale, une absence de nodules ou de tumeurs.

Parmi les données immunologiques, certaines sont en faveur d’une dermatite allergique : positivité des tests d’anaphylaxie cutanée passive, caractérisation des IgE félines, nature du profil cytokinique et infiltrat inflammatoire cutané compatible en peau saine comme en peau lésée chez les chats suspects de dermatite atopique. D’autres sont en défaveur : l’implication pathogénique des IgE n’est pas formellement validée et la voie de pénétration de l’allergène est inconnue.

Qu’attendre des IDR chez le chat ?

C. L.-D. : Les tests d’intradermoréactions (IDR) évaluent la présence d’IgE spécifiques d’allergènes fixés sur les mastocytes cutanés sensibilisés à ces allergènes. Ils sont plus délicats à réaliser que dans l’espèce canine, car la peau du chat est plus fine, plus ferme et davantage élastique et ils sont plus difficiles à lire car la réaction est moins érythémateuse et plus fugace. Par ailleurs, il existe des réactions positives chez le chat sain et des réactions négatives chez le chat allergique. Aucune donnée n’est validée quant à la nature et à la concentration des allergènes à utiliser ou quant à l’existence de réactions croisées et à l’interaction du stress. Enfin, les IDR n’ont pas une excellente répétabilité chez le chat.

Les tests allergologiques, qu’il s’agisse d’IDR ou de tests sérologiques, n’ont aucun intérêt dans le diagnostic des dermatites par hypersensibilité chez cette espèce. Ils ne sont mis en œuvre, en théorie, qu’en dernier lieu après avoir exclu la dermatite par allergie aux piqûres de puces (Dapp) et l’hypersensibilité alimentaire, pour orienter la stratégie thérapeutique entre éviction, désensibilisation et prescription de molécules antiallergiques. La difficulté de réalisation et d’interprétation de ces tests constitue cependant une barrière importante en allergologie féline.

Que penser du dosage des IgE spécifiques ?

C. L.-D. : Ces dosages ne sont pas validés chez le chat. Il est établi qu’il existe des IgE spécifiques d’allergènes chez les sujets sains et allergiques et que les taux ne permettent pas de différencier ces deux populations. De nombreux facteurs influent sur le taux d’IgE sériques (âge, mode de vie, traitements antiparasitaires, etc.).

La désensibilisation est-elle réalisable chez le chat ?

C. L.-D. : Certains vétérinaires utilisent la désensibilisation dans la gestion thérapeutique du chat allergique en s’appuyant sur quelques études ouvertes ou de petites séries de cas, ou encore en se fiant à leur propre expérience.

En pratique, aucun standard n’est établi chez le chat et la mise en œuvre d’une désensibilisation suit les mêmes principes que chez l’espèce canine : choix de la composition de la solution de désensibilisation fondé sur l’interprétation par le clinicien des résultats des tests allergologiques, protocoles extrapolés de ce qui se pratique pour les chiens. Les résultats attendus sont similaires à ceux observés chez ces derniers : environ 70 % d’efficacité avec un début d’amélioration clinique entre 3 et 6 mois. Les effets secondaires sont rares.

Pour ma part, je n’envisage une désensibilisation chez un chat allergique, pour lequel une Dapp et une hypersensibilité alimentaire ont été éliminées, qu’en dernier recours, en raison de l’absence de définition clinique de la population féline à laquelle proposer cette intervention thérapeutique, de l’absence de test allergologique de référence et du risque potentiel de fibrosarcome induit par des injections sous-cutanées répétées, alors que le bénéfice attendu est non démontré.

Bibliographie

  • – Diesel A.B. Allergen-specific immunotherapy. In Noli C., Foster A., Rosenkrantz W. Veterinary Allergy, Wiley Blackwell, 2014.
  • – Ravens P.A, Xu B.J., Vogelnest L.J. Feline atopic dermatitis : a retrospective study of 45 cases (2001-2012). Vet. Dermatol. 2014;25(2):95-102.
  • – Loewenstein C., Mueller R.S.A review of allergen-specific immunotherapy in human and veterinary medicine. Vet. Dermatol. 2009;20(2):84-98.
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