Le point sur la fièvre de West Nile - La Semaine Vétérinaire n° 1642 du 18/09/2015
La Semaine Vétérinaire n° 1642 du 18/09/2015

ÉPIDÉMIOSURVEILLANCE

PRATIQUE MIXTE

FORMATION

Auteur(s) : Anne Couroucé-Malblanc

Deux chevaux ayant présenté des signes neurologiques ont été confirmés, le 31 août dernier, comme étant des cas de fièvre de West Nile (WN). L’un de ces chevaux était stationné dans le département du Gard, l’autre dans les Bouches-du-Rhône1. Depuis 2007, aucune circulation du virus n’avait été détectée en France métropolitaine, malgré la recrudescence de cas humains et équins dans plusieurs pays d’Europe du Sud et de l’Est.

Le virus

Le virus West Nile (VWN) est l’un des 70 virus de la famille des Flaviridae du genre Flavivirus. Plusieurs lignées de ce virus existent : le lignage 1 avec les clades 1a, 1b et 1c qui circulent en Europe, le lignage 2, qui sévit en Afrique mais a été responsable d’épidémies récentes en Europe (Roumanie, Grèce, Italie), et les lignages 3 et 4.

Le cycle

La fièvre de WN est une maladie virale non contagieuse. Elle se transmet d’un animal à l’autre par l’intermédiaire d’insectes piqueurs (vecteurs), en particulier les moustiques du genre Culex. Elle infecte les oiseaux qui sont les hôtes réservoirs et amplificateurs, mais peut aussi toucher l’homme et l’équidé. L’un comme l’autre sont des “culs-de-sac épidémiologiques”, la virémie n’étant pas assez importante chez eux pour infecter les vecteurs (schéma). Néanmoins, le cheval est généralement le révélateur du risque d’infection pour l’homme et est considéré comme sentinelle pour le risque d’infection humaine.

Les signes cliniques

Lors de passage viral, la plupart des chevaux séroconvertissent sans présenter de signes cliniques. Toutefois, dans environ 5 à 8 % des cas, les chevaux présentent des signes neurologiques où prédomine une encéphalomyélite avec de l’ataxie. Les chevaux montrent également des signes de faiblesse, sont souvent couchés, et des fasciculations musculaires sont observées. D’autres signes cliniques peuvent être notés : la dépression, l’anorexie, une anomalie de comportement avec hyperesthésie, anxiété et parfois agressivité, des signes de coliques ou de boiterie et, plus rarement, une photophobie, voire une cécité. Une excellente illustration de ces observations est présentée dans une vidéo visible sur Internet2. Il est important de noter que si la fièvre est une manifestation constante de la maladie, elle survient avant l’apparition des signes cliniques.

Lorsqu’un cheval présente des signes cliniques, le taux de mortalité est compris entre 22 et 44 % selon les études, sachant que 20 % des chevaux survivants garderont des séquelles comme une perte de poids, de la léthargie, de l’ataxie ou des dysfonctionnements des nerfs crâniens.

Le diagnostic

Il n’existe pas de signes pathognomoniques de WN et, en fonction de la région du monde et de la saison, le diagnostic différentiel doit se faire entre divers pathogènes comme, en Europe par exemple, la rage, la maladie de Borna, mais aussi la forme neurologique de la rhinopneumonie due à EHV1. Un diagnostic par polymerase chain reaction est possible, mais la difficulté réside dans la courte durée de la virémie. Le diagnostic est majoritairement effectué par sérologie (Elisa).

La prophylaxie

La prophylaxie sanitaire consiste à minimiser l’exposition des équidés aux piqûres de moustiques. Néanmoins, du fait du mode de vie des chevaux dans les régions concernées, cela peut se révéler difficile. Depuis 2002, il existe des vaccins qui permettent de lutter efficacement contre cette maladie. Néanmoins, pour être optimale, la prophylaxie médicale doit être faite 1 à 2 mois avant la période d’exposition aux moustiques. En France, deux vaccins sont commercialisés : Equip® WNV, un vaccin inactivé (Zoetis), et Proteq® West Nile, un vaccin virus canarypox recombiné West Nile (Merial).

Une maladie à déclaration obligatoire et réglementée

Bien que le VWN ne constitue pas actuellement un problème majeur de santé publique vétérinaire en France métropolitaine, l’exemple des épisodes récents, américains et européens, et la nécessité de mettre en œuvre des mesures de santé publique en cas de foyers de VWN imposent de surveiller ce virus. Il s’agit d’une maladie à déclaration obligatoire, réglementée et gérée par l’État.

L’objectif de la surveillance du VWN est d’assurer la détection précoce de sa circulation en vue de mettre en œuvre des mesures de protection et de prévention des personnes. La surveillance renforcée de ce virus a été initiée en 2000 avec un volet équin et aviaire. Les modalités de ces dispositifs (départements concernés, surveillance active versus événementielle) ont évolué jusqu’en 2008. Depuis cette année-là, la surveillance du VWN repose sur un double dispositif réglementaire, piloté par les services vétérinaires départementaux et centraux :

- un dispositif pérenne national de surveillance des équidés fondé sur la surveillance événementielle des cas cliniques équins via l’obligation de déclarer toute suspicion ou confirmation de WN nerveux central. Ce système implique majoritairement les vétérinaires praticiens et des laboratoires d’analyses (laboratoires vétérinaires départementaux agréés et le laboratoire national de référence de l’Anses-Maisons-Alfort) et son efficacité repose sur la vigilance clinique des vétérinaires praticiens ;

- un dispositif ciblé dans les zones et périodes à risque de circulation du VWN, fondé sur la surveillance événementielle des surmortalités aviaires de juin à novembre dans les départements du pourtour méditerranéen. Il consiste à rechercher le VWN sur les encéphales des cadavres d’oiseaux sauvages collectés lors des épisodes de surmortalité. Il implique l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), les fédérations départementales de chasseurs et les laboratoires (départementaux et de référence), par l’intermédiaire du réseau Sagir3.

Ce double dispositif est complété par la surveillance du Réseau d’épidémiosurveillance en pathologie équine (Respe), qui recense les déclarations de syndromes nerveux des équidés. Dans le cadre de ce réseau, une recherche systématique du VWN est effectuée sur les syndromes nerveux détectés. Enfin, une surveillance spécifiquement humaine est mise en œuvre par les hôpitaux. Elle consiste en une recherche systématique du VWN sur les patients hospitalisés pour signes neurologiques dans les départements du pourtour méditerranéen, pendant la période à risque.

Pour en savoir plus :

Lecollinet S. et coll. Le virus West Nile : bilan de la situation en Europe et point sur la surveillance en France. Bulletin épidémiologique santé animale et alimentation (2012) 49, 32-34.

1 Lire aussi La Semaine Vétérinaire du 11/9/2015 page 34.

2 http://bit.ly/1Klua8R. Lien cité dans l’article d’Angenvoort J. et coll. (2013).

3 Surveiller les maladies de la faune sauvage pour agir.

L’EPISODE ACTUEL

Dans le cadre de l’épisode actuel, tout équidé présentant des symptômes neurologiques dans la zone à risque, ou y ayant séjourné pendant l’été, doit être présenté à un vétérinaire, faire l’objet de prélèvements et être déclaré le plus rapidement possible, notamment dans les situations particulièrement évocatrices de West Nile (signes cliniques ou zone dans laquelle la contamination est confirmée). Il en va de la responsabilité des détenteurs et des vétérinaires de déclarer toute suspicion aux directions départementales de la protection des populations (DDPP), et ce le plus rapidement possible. Cependant, en accord avec l’Administration, vétérinaires et détenteurs peuvent solliciter le Respe1, qui se chargera d’effectuer sans délai et en toute confidentialité la notification officielle à la DDPP.

1 6, avenue du Maréchal-Montgomery, 14000 Caen, tél. : 02 31 57 24 88, e-mail : contact@respe.net.

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