QUELLE FORMATION ET QUELLES OPPORTUNITÉS POUR EXERCER EN FILIÈRE APICOLE ? - La Semaine Vétérinaire n° 1640 du 04/09/2015
La Semaine Vétérinaire n° 1640 du 04/09/2015

Décryptage

Auteur(s) : Serge Trouillet

Le diplôme interécoles (DIE) en apiculture et pathologie apicole confère aux vétérinaires une crédibilité qui est renforcée par les évolutions réglementaires récentes concernant la filière apicole. Deux confrères témoignent.

Comment se former

Porteuse du projet, Monique L’Hostis (A 76), enseignant-chercheur à Oniris, a obstinément bâti, avec l’aide de quelques confrères et en association avec l’École nationale vétérinaire d’Alfort, le DIE en apiculture et pathologie apicole, qui a aujourd’hui dix ans.

Quelle formation de base est dispensée dans les écoles vétérinaires ?

Quand un élève sort d’une école vétérinaire, il connaît la pathologie des vertébrés, mais pas celle des invertébrés. L’abeille, en outre, est un insecte social. On ne considère donc pas l’individu, mais la colonie, qui est un superorganisme. Une entité dans laquelle figurent des classes d’âge différentes. On y trouve aussi bien des œufs, des larves et des nymphes que des ouvrières de tous âges, des mâles et une reine. Appréhender cette colonie ne va pas de soi. Depuis quelques années, les écoles remettent l’apiculture au goût du jour et à leur programme d’enseignement.

Certes, l’objectif n’est pas de rendre tous les vétérinaires compétents en apiculture. Il convient de proposer une sensibilisation propre à élargir l’horizon professionnel de chacun, voire à susciter quelques vocations. L’enseignement de l’apiculture et de la pathologie apicole ne dépasse pas la dizaine d’heures dans le cursus de base. Cela convient.

Dans quel contexte avez-vous créé le DIE en apiculture et pathologie apicole ?

La santé de l’abeille était gérée par les agents sanitaires qui avaient été mis en place en 1980 dans les ex-directions des services vétérinaires, compte tenu de l’absence de vétérinaires impliqués en apiculture. Elle s’est dégradée à l’arrivée de Varroa destructor en 1982, et à partir de 1994, avec l’arrivée de semences enrobées aux néonicotinoïdes. Le cheptel était fragilisé par une vague de mortalités inhabituelles. En 1999, les apiculteurs ont fait appel à des vétérinaires comme experts, contre l’insecticide Gaucho®. Mais nous n’étions pas nombreux, et nous n’avions rien à mettre dans les expertises. Nous nous sommes en effet retrouvés sans constats sanitaires signés par un cadre sur le terrain ! Il manquait alors des cliniciens, des cadres sanitaires formés à la pathologie apicole, comme maillons indispensables de la chaîne dans l’organisation sanitaire. Il fallait en former, d’où l’idée de créer ce DIE.

Comment se décline cet enseignement ?

Il se déroule sur cinq semaines de 40 heures, dont 160 en salle et 40 sur le terrain, où chacun réalise un audit sanitaire chez un apiculteur professionnel agréé par nos soins. L’ensemble est réparti sur un an. Les trois premières semaines sont, en général, effectuées entre décembre et mars : la première est consacrée à la découverte de l’abeille, du superorganisme, de l’apiculture, de l’environnement ; la deuxième aux dangers sanitaires biologiques et aux maladies apicoles ; la troisième à la toxicologie, à la réglementation, à la mise en place et à l’explication de l’audit sanitaire.

L’été, les stagiaires partent sur le terrain, au plus près de chez eux, afin d’effectuer l’audit. À la fin de la belle saison, ils rendent un rapport de cet audit ainsi que des travaux de bibliographie, deux mois avant la session d’évaluation, qui se déroule en novembre. C’est la cinquième semaine, celle où sont restitués les travaux dans une ambiance interactive de corrections, d’échanges et de discussions.

Quel est le poids de ce diplôme dans l’implication des vétérinaires dans la filière apicole ?

Notre ténacité nous a conduits jusqu’au bout de notre démarche consistant à soigner l’abeille comme les autres animaux de production, avec un travail sur les cas cliniques et sur le conseil. Cela nous a valu une crédibilité chez nos confrères, mais aussi auprès de l’État. La Direction générale de l’alimentation (DGAL) a ainsi permis la mise en place de la nouvelle gouvernance sanitaire, avec une reconnaissance pour les vétérinaires ayant reçu la formation et une incitation pour les autres à le faire.

En novembre prochain, nous aurons formé 145 vétérinaires depuis 2005. Cependant, depuis la note de service de mars 2015 instaurant le mandatement des vétérinaires en apiculture, les demandes d’inscription à ce DIE explosent ! Sans attendre les fonds européens, nous allons, sur des fonds propres d’Oniris, mettre en place une formation pour 50 participants dès janvier 2016. D’autres que moi travailleront à élaborer un diplôme européen. La réussite de ce DIE me satisfait déjà pleinement.

Pourquoi s’impliquer

Quels enjeux pour la filière apicole et pour les vétérinaires ? Christophe Roy (T 97), praticien mixte à Riom-ès-Montagnes (Cantal) et vétérinaire conseil en apiculture, fait part de son optimismepour la profession dans ce secteur.

En quoi les évolutions réglementaires récentes sont-elles favorables au vétérinaire dans la filière apicole ?

Elles sont issues des états généraux du sanitaire qui ont encouragé le rapprochement de l’animal et du végétal, en rationalisant et en régionalisant les ressources humaines. Avec la loi d’avenir agricole du 13 octobre 2014, les nouveaux techniciens sanitaires apicoles interviendront sous l’autorité et la responsabilité d’un vétérinaire. Les actes de médecine qu’ils pourront effectuer sont précisés par l’arrêté ministériel du 16 janvier 2015. La note de service de la DGAL du 13 février 2015 stipule que le titre et le diplôme de docteur vétérinaire sont suffisants pour encadrer un ou plusieurs techniciens. Enfin, la note de service de la DGAL du 5 mars 2015 met en place le mandatement de vétérinaires en apiculture pour des missions de police sanitaire.

Quel est l’objectif des organisations professionnelles vétérinaires ?

Aujourd’hui, les missions auxquelles peuvent répondre les vétérinaires dans la filière apicole ne sont pas assez nombreuses pour qu’ils y voient un débouché stable. Le retour sur investissement du temps passé à la formation n’est pas encore possible. Pourtant, nous devons anticiper et donner confiance aux acteurs de cette filière. L’objectif des organisations professionnelles vétérinaires est de proposer un réseau dense de l’ordre de 400 à 500 vétérinaires sur le territoire, c’est-à-dire trois à cinq par département. C’est une activité saisonnière qui peut très bien, par exemple, compléter celle des praticiens ruraux en allaitant : été pour la première, hiver pour la seconde.

Quel est l’enjeu pour les praticiens ?

Le rôle des vétérinaires dans la filière apicole a été mis en avant par notre confrère François Gerster (A 80), du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) : une structure indépendante sous la tutelle du ministère de l’Agriculture. Dans le plan de développement durable de l’apiculture (PDDA), présenté en février 2013 et destiné à « relever le défi d’une filière apicole française durable et compétitive à l’international », des thèmes ont été listés, qui encouragent à l’investissement et à la formation des vétérinaires en apiculture. Il nous pousse à avancer dans cette voie. Une sorte de soutien officiel. Les vétérinaires, peu à peu, reprennent pied dans cette filière. Nous devons nous y engager pleinement.

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