Prise en charge des diarrhées chez le lapin - La Semaine Vétérinaire n° 1639 du 28/09/2015
La Semaine Vétérinaire n° 1639 du 28/09/2015

CONFÉRENCE

Pratique canine

FORMATION

Auteur(s) : Émilie Tessier*, Laurent Masson**

Fonctions :
*Praticienne à Caduvet,
à Loos (Nord).
Article rédigé d’après une présentation
faite au congrès du Gemi-Genac
à Avignon, en avril 2015.

Les troubles digestifs font partie des motifs de consultation les plus fréquents chez le lapin de compagnie. La diarrhée est une urgence dans cette espèce, mais ne doit pas être confondue avec l’émission de cæcotrophes.

Diagnostic

Avant même l’examen clinique, il convient de recueillir un maximum d’éléments sur les conditions de vie du lapin, son alimentation, sa provenance, ainsi que sur l’anamnèse. Un examen général est indispensable, en recherchant particulièrement une déshydratation, une hypothermie, des signes de colique (anorexie, prostration, bruxisme), et surtout d’entérotoxémie (hypovigilance, tête portée basse entre les antérieurs, hypothermie, lapin qui ne déglutit pas, puis décubitus latéral et décès). La palpation abdominale met en évidence une douleur, une dilatation de l’estomac, des borborygmes ou encore une sensation liquidienne. L’aspect des selles et de l’arrière-train sont à prendre en compte. La radiographie abdominale apporte des renseignements rapides pour écarter l’atteinte d’autres organes (anomalie urinaire, stase gastrique contre-indiquant le gavage, etc.) et a une valeur pronostique (quantité de gaz digestif). Une biochimie sanguine et un hématocrite sont préconisés sur les lapins de plus de 4 ans. Une coprologie est également entreprise.

Traitement

• Spécifique

À la vue des résultats de la coprologie, un traitement spécifique peut être prescrit :

– Nématodes : fenbendazole, 20 mg/kg/j pendant 5 jours ;

– Coccidies : toltrazuril, 10 mg/kg pendant 2 jours, à refaire 5 jours après, ou triméthoprime-sulfamides, 30 mg/kg toutes les 12 heures pendant 10 jours ;

– E. coli : triméthoprime-sulfamides, 30 mg/kg toutes les 12 heures, ou enrofloxacine, 10 mg/kg toutes les 12 heures ;

– Clostridium perfringens : tiamuline, 16 mg/kg/j pendant 10 jours, et une résine échangeuse d’ions qui capte les toxines clostridiennes (2 g de cholestyramine1 dans 20 ml d’eau, donner 10 ml/kg/j à distance des autres traitements, pendant 3 à 5 jours) ;

– Lawsonia intracellularis : chloramphénicol 30 mg/kg per os (PO) pendant 7 à 14 jours.

Il n’existe, en revanche, pas de traitement réellement efficace lors de cryptosporidiose ou de maladie de Tyzzer (Clostridium piliforme).

• De soutien

Dans tous les cas, un traitement non spécifique est mis en place. L’alimentation se compose de foin uniquement (si le lapin a de bonnes dents !) et d’eau additionnée de prébiotiques (Rongeur Digest®) pendant 3 jours (alimentation à taux de fibres élevé pour vidanger le cæcum et ainsi éviter l’entérotoxémie). Une injection de maropitant de 0,1 ml/kg/j par voie sous-cutanée (SC) est réalisée pour son action analgésique viscérale. En cas de diarrhée profuse uniquement, du lopéramide est prescrit à la dose de 0,1 mg/kg toutes les 12 heures. Si l’état du lapin est stable, le traitement peut être initié au terme de la consultation et un contrôle est prévu 24 à 48 heures plus tard. En revanche, tout lapereau ou lapin adulte en mauvais état général est hospitalisé, réchauffé et mis sous perfusion. Un gavage est recommandé si l’anorexie persiste après 24 à 48 heures de réhydratation. En outre, un traitement antibiotique basé sur l’analyse des selles en cas de dysbiose bactérienne (coloration de Gram) et la cholestyramine préviennent le risque d’entérotoxémie. L’analgésie est gérée à l’aide de métamizole2 (0,1 ml/kg toutes les 6 heures SC), de buprénorphine (30 µg/kg toutes les 6 heures SC), ou bien à l’aide d’une perfusion continue associant fentanyl, lidocaïne et kétamine en cas de colique importante. Il convient d’éviter les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), tout du moins à forte dose et sur une longue durée. En cas d’atteinte gastrique concomitante, un pansement gastrique et un traitement antiacide sont prescrits.

  • 1 Questran®, pharmacopée humaine.

  • 2 Calmagine®, pharmacopée vétérinaire.

  • 1 Si une hyperthermie est présente, penser plutôt à des bactéries à Gram négatif (E. coli, salmonelles). En cas d’hypothermie, penser plutôt à des bactéries à Gram positif (Clostridium).

DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL

– Diarrhée de stress ;

– Alimentation pauvre en fibres, trop riche en protéines ou aberrations alimentaires.

Ces deux premières causes peuvent favoriser les suivantes :

– parasitaire : coccidies, nématodes, Cryptosporidium parvum ;

– entérotoxémie à Clostridium ou E. coli ;

– origine bactérienne1 : Clostridium (perfringens/spiriforme/piliforme), salmonelles, colibacilles, Lawsonia intracellularis ;

– antibiothérapie inadaptée ou trop longue ;

– origine virale : rotavirus, coronavirus ;

– intoxication (plomb, vitamine D) ;

– hypercalcémie.

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