Luminothérapie

Une école abandonnée est aménagée en hôpital provisoire pour accueillir des militaires atteints d’une mystérieuse maladie du sommeil. Chaque jour, Jenjira vient tenir compagnie à Itt, bel endormi auquel personne ne rend visite. Grâce à l’aide d’une jeune médium, Jenjira va peu à peu tisser avec lui une trame de songes et de mythes vaporeux par lesquels elle entrevoit les rapports secrets des soldats malades avec le site. L’hôpital se dédouble alors, devient le siège d’interférences entre les vivants et les esprits, l’aujourd’hui mélancolique et un glorieux passé enfoui. À l’image : le réalisme le plus transparent ; aux conversations : la sonde du rêve, des croyances, de l’invisible. Naturelle ou artificielle, baignant les êtres comme une écume, la lumière semble, elle, faire le lien entre la matière et l’esprit. Les vertus thérapeutiques qu’on lui prête auprès des malades valent pour le spectateur. S’il adhère au dépaysement alangui que propose le film, il ne peut que s’émerveiller.

Découvert avec Blissfully Yours (2002) et Tropical Malady (2004), couronné par une courageuse Palme d’or pour Oncle Boonmee (2010), le Thaïlandais Apichatpong Weerasethakul reste méconnu. La puissance de son cinéma force pourtant l’admiration. À la fois audacieux, limpide et doux, celui-ci esquive les formes narratives habituelles et mêle, sans hiérarchie, culture savante et populaire pour nouer l’observation éblouie du présent à un questionnement fictionnalisé des mythes et légendes de son pays.

Cemetery of Splendour d’Apichatpong Weerasethakul avec Jenjira Pongpas Widner, Banlop Lomnoi, Jarinpattra Rueangram, Thaïlande-France-Royaume-Uni-Allemagne-Malaisie, 2 h 02, sortie le 2 septembre.