Le salariat, un statut pas toujours définitif - La Semaine Vétérinaire n° 1632 du 29/05/2015
La Semaine Vétérinaire n° 1632 du 29/05/2015

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Auteur(s) : Isabelle Diquéro

Il existe souvent un fossé entre la carrière rêvée et la réalité de la pratique vétérinaire. L’un des remèdes est le salariat, un moyen d’acquérir de l’expérience et/ou un tremplin vers l’association. Un statut plutôt prisé par les jeunes.

En janvier 2014, 5 116 vétérinaires déclaraient exercer avec un statut de salarié (versus 5 599 en janvier 2013). Si, depuis 15 ans, ce statut n’a cessé de progresser (avec une hausse de 5 à 6 % par an), il devrait s’atténuer. Selon les calculs réalisés par l’Ordre national des vétérinaires1, la projection à 10 ans semble confirmer une persistance de la tendance mais à un rythme moins soutenu de 1,6 % par an. En 2022, les vétérinaires salariés devraient représenter 30 % des inscrits au tableau, soit 6 553 vétérinaires (contre 34 % en 2012). Le vétérinaire salarié type est une vétérinaire plutôt jeune (environ 34 ans). Et pour cause, si la profession se féminise (la parité devrait être atteinte entre 2017 et 2018), le statut de salarié est souvent l’option préférée des jeunes diplômés.

Un statut plus facile à appréhender

« Quand on rentre à l’école, on se projette à la tête d’une clinique. On ne peut pas dire que le salariat soit un objectif », explique Claire, salariée à temps partiel dans deux cliniques canines. Pendant nos études, nous ne sommes pas vraiment formés aux différents statuts existants dans la profession et il faut avouer que tout ce qui n’est pas au cœur de la pratique nous paraît lointain. Aussi, une fois le diplôme en poche, le statut de salarié semble le plus adapté, parce que le plus facile à intégrer. » Une position que partage une autre consœur, Alice, salariée à temps plein dans une clinique en zone rurale. « Comme je devais rembourser le prêt que j’avais souscrit pour mes études, il fallait impérativement que je puisse trouver un CDI rapidement, confie-t-elle. Outre l’aspect financier de l’association, je ne me voyais pas gérer tout l’aspect administratif, en plus de la prise de fonctions dans une clinique. Le salariat offre une certaine tranquillité d’esprit. » Toutefois, il convient de rester vigilant lors de la signature de son contrat de travail. Quelles en sont les modalités et sur quelle base de rémunération s’est-on mis d’accord ? « Il faut quand même apprendre à lire sa fiche de paie, prévient Alice. Sinon, vous pourrez être exposé à certaines déconvenues financières qui, si elles ne sont pas compensées par l’intérêt du poste, peuvent vite démotiver. »

Un temps de formation utile

Séduisant par son accessibilité, le salariat attire également par l’encadrement qu’il impose. « Commencer comme salarié donne moins l’impression de se jeter dans la gueule du loup, s’amuse Claire. Cela permet d’acquérir de l’expérience et de faire ses armes face à la clientèle. » Un apprentissage, sans la pression d’un associé ou d’un entrepreneur. « Le rythme professionnel est bien loin de celui de l’école. Le salariat offre la possibilité de s’adapter aux clients, aux difficultés de la facturation, de la communication sans, en plus, subir la pression du résultat », assure Alice. Les employeurs vétérinaires qui recrutent les salariés ont plutôt tendance à avoir la fibre de la transmission. « Je n’avais pas pratiqué d’équine depuis l’école, raconte Alice. La vétérinaire a pris le temps de remettre mes connaissances à niveau. En chirurgie, non seulement elle me montre le bon geste, mais elle suit mon travail. En cas de souci, une radio peu lisible par exemple, le dialogue est toujours possible. » Sans oublier l’exigence de celui qui transmet son savoir : « L’un des vétérinaires avec lesquels je travaille m’a dit qu’il voulait que je finisse meilleure que lui ! », révèle Claire.

Une capacité à gérer du temps partiel

Pour autant, il faut veiller à ne pas se laisser aller. Pour cette jeune vétérinaire, on ne s’impose pas sans travail : « Un effort est nécessaire pour prendre sa place, pour se présenter et se convaincre et convaincre les clients que nous n’avons pas moins de légitimité dans nos décisions que les autres vétérinaires. Surtout lorsque, comme moi, vous évoluez à temps partiel dans une petite équipe et que vous êtes souvent perçue comme la remplaçante et non pas comme une collaboratrice à part entière. » Certains petits détails comptent beaucoup pour cette praticienne : « Le fait que votre nom soit imprimé sur les ordonnances de la clinique et qu’il figure sur le tableau de présentation de l’équipe destiné à la clientèle vous donne une légitimité. Le salariat ne s’assimile pas à un statut de “vétérinaire fantôme” ».

Une indépendance atténuée

Un salaire fixe, des vacances, un quota horaire dans un métier où on ne compte pas ses heures…autant d’avantages qui permettent d’envisager un équilibre possible entre la vie professionnelle et la vie personnelle. Un confort qui a un prix. « Si le salariat facilite les choses à la sortie de l’école, explique Alice, la subordination qu’il impose implicitement n’est pas toujours simple à vivre. À l’école, nous sommes très indépendants. Là, il faut accepter de ne pas décider de certains aspects. Ce qui peut être frustrant. Face à un cas, on ne retient pas toujours l’option pour laquelle on aurait spontanément opté. Les choix de la clinique sont à prendre en compte et nous devons respecter les axes de communication fixés en interne. » « En tant que salariés, nous n’avons pas complètement les mains libres, confirme Claire. Nous ne sommes pas toujours très à l’aise pour accorder une facilité de paiement ou faire un petit geste commercial. De temps en temps, il faut apprendre à différer sa réponse pour ne pas commettre d’erreur. » Enfin, s’il est rassurant, le salariat n’est pas toujours aussi confortable que cela pour organiser son emploi du temps personnel. Des compromis sont à faire. « Ce statut donne l’illusion d’avoir du temps, constate Alice. Quand je suis passée au forfait jour, j’ai fait une croix sur les cours de sport. »

Un tremplin vers l’association

Plus qu’un choix, le salariat est une solution pratique et constitue régulièrement un temps de transition vers l’association. « Pour moi, le salariat était la forme d’exercice la plus adaptée à ma situation personnelle au moment où je suis entrée en activité, explique Claire. Pourtant, à terme, je compte bien m’associer ». Un point de vue partagé par Alice. « Même si j’hésite régulièrement entre le statut de salarié et celui d’associé en pesant le pour et le contre, je compte bien m’associer un jour ou l’autre. En revanche, je n’imagine pas une association sans passer par le stade du salariat. Le moment venu, je me donnerai deux ans pour observer le fonctionnement de la clinique avant de franchir le pas ». Un autre confrère, Vincent, est resté quatre ans salarié de la clinique dans laquelle il est devenu associé. « Cela m’a permis d’apprendre les méthodes de travail de mes collègues et de me faire connaître auprès de la clientèle et des confrères référents. Je n’ai donc eu aucune mauvaise surprise après la signature. » Une étape à laquelle certains choisissent d’ajouter une phase de transition complémentaire, celle de collaborateur libéral. « Transiter par le statut de collaborateur permet de dédramatiser les difficultés de l’exercice libéral. L’étape de l’association lors d’une création paraît alors moins fastidieuse », explique Philippe.

  • 1 Revue de l’Ordre national des vétérinaires n° 50, août 2013.

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