REGARDS DE FEMMES VÉTÉRINAIRES EN ÉGYPTE

L’index de l’inégalité de genre (Gender inequality index ou GII) de 2012, qui reflète la santé sexuelle et procréative des femmes, leur pouvoir politique et l’accès à l’éducation secondaire et supérieure, plaçait l’Égypte, avec un score de 0,59, à la 126^e place sur 148 pays. Aujourd’hui, la contribution des femmes sur le marché professionnel n’atteint que 23,7 %¹.

La position de certaines d’entre elles, qui ont acquis dans le pays des places décisionnelles dans les administrations gouvernementales du domaine de la santé animale, semble néanmoins échapper à l’inégalité de genre. Comme l’indique Soheir Hassan Abdelkader, secrétaire générale de l’Organisation gouvernementale des services vétérinaires : « Je ne souffre pas de ma position de femme dans mon travail. J’ai commencé ma carrière dans le gouvernorat de Fayoum en pratique rurale, où il était étrange de voir une femme travailler avec les buffles. Mais après un an, je n’avais plus à convaincre ou à justifier que j’étais à ma place. Mon travail a suffi à cela. J’ai managé très jeune l’unité de prévention des maladies au gouvernorat de Fayoum. Mon poste actuel est rarement attribué à des personnes de moins de 55 ans, qu’il s’agisse d’hommes ou de femmes. Je peux donc affirmer qu’être une femme n’a pas été un handicap pour moi. »

Travail et vie de famille

Des freins sont toutefois prégnants dans le pays. La mise en œuvre de projets qui minimisent les différences sociales et de genre conduit parfois à renforcer les stéréotypes². La lutte pour l’égalité homme-femme s’avère complexe, d’autant que l’image de l’émancipation de cette dernière reste associée à une certaine vision de l’Occident. Le niveau d’éducation tend à mieux intégrer les jeunes Égyptiennes sur le marché du travail, mais le mariage est parfois associé à un désengagement dans leur vie professionnelle.

Il en résulte une forte attirance des travailleuses pour les administrations gouvernementales, qu’elles jugent souvent plus en adéquation avec leur vie familiale³ que le secteur privé. « Il y a beaucoup de femmes qui travaillent à l’Organisation gouvernementale des services vétérinaires, confirme Heba Sohby, vétérinaire et épidémiologiste. C’est un bon compromis pour celles qui ont une vie de famille à mener. Le métier de vétérinaire rural est un challenge pour les femmes. Néanmoins, procéder régulièrement à des visites sur le terrain est la condition essentielle pour faire rigoureusement ce métier de réflexion sur les maladies d’élevage. Je ne me sens pas en déséquilibre par rapport à mes collègues masculins. Je n’ai pas de problème de positionnement par rapport à eux ou de sentiment d’infériorité. Il existe une certaine parité du point de vue de nos échanges. »

Une porte ouverte aux changements

Certaines recommandations seraient à même d’établir un cadre de travail plus propice aux femmes et à les sortir de la voie prioritaire d’une carrière dans le secteur public. Rania Kashif, vétérinaire, MSc (maîtrise) et PhD (doctorat) en chirurgie de la colonne vertébrale, associée chez Vets in Practice au Caire, évoque son parcours : « Les débuts sont parfois difficiles, mais je n’ai jamais cessé d’apprendre. Mes connaissances et mon attitude m’ont permis de créer cette place respectable que j’ai acquise aujourd’hui. Même si j’ai dû occasionnellement gérer des problèmes de comportements inappropriés chez certains hommes. »

La nette féminisation des études vétérinaires n’est pas encore représentative du milieu professionnel. Jusqu’à récemment, les femmes vétérinaires ont majoritairement été impliquées dans l’industrie pharmaceutique et plus encore dans les administrations. L’expansion de la médecine canine a été une porte ouverte aux changements. Dans ce contexte, les femmes peuvent s’épanouir dans un traitement plus égalitaire avec leurs collègues masculins. La possibilité pour elles de posséder, seules ou en association, leur propre clinique représente également une opportunité de développer un esprit d’entreprenariat.

La progression du secteur de la santé canine semble être un terrain propice à l’émancipation des femmes vétérinaires autant professionnellement que personnellement.

• 1 United Nations, 2013. The rise of the South : human progress in a diverse world, Human development report 2013.

• 2 Herrera L., 2003. Participation in school upgrading : gender, class and (in) action in Egypt, International Journal of Educational Development 23.187-199.

• 3 Sieverding M., 2011. Survey of young people in Egypt, policy brief series, female disadvantage in the Egyptian labor market, a youth perspective, SYPE policy brief 4.