La phéromonothérapie vétérinaire fête ses 20 ans - La Semaine Vétérinaire n° 1623 du 27/03/2015
La Semaine Vétérinaire n° 1623 du 27/03/2015

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PHARMA

Auteur(s) : Valentine Chamard

Alors que les traitements à base de phéromones faciales ont trouvé leur place chez le chat et les apaisines maternelles chez le chien, la recherche concernant ces molécules laisse entrevoir des applications prometteuses.

Quelque 15 millions de chiens et chats ont déjà reçu un traitement à base de phéromones. Pourtant, ce succès n’était pas acquis lors de leur lancement, a rappelé Ceva à l’occasion d’une conférence de presse organisée le 12 mars. C’est en 1995, alors que le comportement est une discipline encore en manque de reconnaissance et que les phéromones ont des applications limitées, que le laboratoire se lance un défi en initiant un partenariat avec l’Institut de recherche en sémiochimie et éthologie appliquée (Irsea). Naîtront de cette collaboration Feliway© (1996) et Adaptil© (anciennement DAP, en 2001), deux spécialités désormais incontournables en comportement animal.

Comment agissent les phéromones

Tous les êtres vivants émettent des composés volatils, dont des substances sémiochimiques. Celles-ci transportent une information, pour laquelle il n’y a pas de phénomène d’apprentissage, chaque espèce acquérant au cours de l’évolution la capacité de détecter les substances importantes pour elle. « Les odeurs sont ainsi moins intéressantes d’un point de vue pharmacologique, car leur effet est variable, selon par exemple le vécu de chaque individu, contrairement aux phéromones, dont l’action est prévisible », souligne notre confrère Patrick Pageat, directeur de l’Irsea. Ces messages sont captés chez les vertébrés par les organes voméro-nasaux. Les phéromones entraînent la libération de neuro-hormones (ACTH1 et cortisol pour les phéromones d’alarme, ocytocine pour les apaisines maternelles). Ces dernières modifient la filtration des informations sensorielles et les relations entre le cortex et le système limbique (action au niveau de l’amygdale).

Des molécules ancrées dans les pratiques

Gestion de la malpropreté, des griffades inappropriées, de l’agression envers les congénères ou l’homme, les applications des phéromones faciales (Feliway©) dans les troubles du comportement du chat sont nombreuses. « Elles permettent également d’apporter du bien-être dans la prise en charge globale d’une maladie », souligne Muriel Alnot-Perronin, comportementaliste, praticienne à Paris. Leur utilisation en hospitalisation s’accompagne d’une augmentation de la prise alimentaire et d’une activité plus importante. Chez le chien, les apaisines maternelles (Adaptil©) contribuent à atténuer la peur (donc les agressions associées) et les problèmes liés à la séparation. Utilisées à l’adoption des chiots, elles permettent de diminuer 90 % des troubles ultérieurs et favorisent les apprentissages. Outre leurs effets, ces substances présentent de nombreux avantages. Ce sont des copies de substances naturelles, elles ont une action ciblée sur une espèce donnée, agissent rapidement, quel que soit l’âge, sont dénuées d’effets secondaires (pas d’absorption sanguine), avec une association possible avec d’autres traitements.

Des applications inédites à venir

L’Irsea mène de nombreux travaux de recherche. Les messages sémiochimiques peuvent désormais être identifiés et copiés. « Aujourd’hui, nous connaissons l’alphabet, à nous maintenant de créer de nouveaux messages qui n’existent pas dans la nature », déclare Patrick Pageat, s’appuyant sur l’exemple des chats qui, après un conflit, ne peuvent se réconcilier mais y parviendraient grâce au développement de phéromones. « Il s’ouvre une opportunité de communication entre l’homme et le monde vivant, et ce dans une approche non invasive et respectueuse de l’environnement », conclut notre confrère. Outre les traitements, de nouvelles voies s’ouvrent dans la compréhension de certains troubles comportementaux et dans le diagnostic (via un dosage des phéromones, indiqué dans un contexte d’agressivité, qui devrait bientôt être disponible).

  • 1 Adrénocorticotrophine.

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