Décryptage du nouveau Code de déontologie - La Semaine Vétérinaire n° 1622 du 20/03/2015
La Semaine Vétérinaire n° 1622 du 20/03/2015

Dossier

Auteur(s) : Marine Neveux

Alors qu’il scelle le quotidien de notre exercice, le nouveau Code de déontologie vient de paraître au Journal officiel du 15 mars 2015. Le précédent datait de 2003. « Un code qui décoiffe » sur plusieurs points, comme l’avait annoncé Michel Baussier, président de l’Ordre des vétérinaires, lors de ses vœux en début d’année. Trois grands thèmes émergent : les lieux d’exercice, les conventions et les contrats, et la communication. Ce dernier point était attendu par les confrères. Décryptage.

Sans conteste, le nouveau Code de déontologie, paru au Journal officiel le 15 mars 2015, apporte des modifications majeures. Même si les évolutions sur la communication sont celles qui cristallisent le plus d’attentes (et d’inquiétudes) de la part des confrères, elles n’en constituent pas le thème majeur. D’autres notions sont tout aussi fondamentales pour la profession, tels les lieux d’exercice.

Le code a évolué progressivement « d’une déontologie autoprotectrice de la profession à une déontologie protectrice des usagers de la profession, explique l’Ordre, qui s’accompagne d’un accroissement de la qualité du service rendu, justifiant que la profession vétérinaire soit réglementée et réservée aux titulaires des qualifications et des titres nécessaires pour l’exercer ». Le décor est planté.

LES LIEUX D’EXERCICE

Les articles 51 à 57 du code visent à apporter une définition plus précise du lieu d’exercice de la profession vétérinaire, un point novateur et essentiel.

Le domicile professionnel administratif (DPA) « constitue, à défaut d’indication contraire du vétérinaire, l’adresse de correspondance pour le conseil régional de l’Ordre. Le DPA peut être confondu avec le domicile personnel. Il peut être le domicile professionnel d’exercice ou l’un d’eux lors de multiplicité de domiciles professionnels d’exercice ».

Chaque clinique vétérinaire déclare un DPA unique, qui est défini par le lieu retenu pour l’inscription au tableau de l’Ordre. Il s’agit, concrètement, de l’adresse à laquelle l’Ordre fait parvenir ses correspondances, sauf indication contraire.

Le domicile professionnel d’exercice (DPE), défini positivement par l’article 51, est « le lieu d’implantation de locaux professionnels où s’exerce la profession de vétérinaire, accessibles à tout moment par le ou les vétérinaires qui y exercent ». Le DPE fait l’objet d’une déclaration au conseil régional de l’Ordre. Tout vétérinaire inscrit à l’Ordre et en exercice détient au moins un domicile professionnel d’exercice.

« Un vétérinaire ou un groupe de vétérinaires ayant pour but l’exercice professionnel en commun peuvent avoir plusieurs domiciles professionnels d’exercice. »

Toute médecine foraine demeure donc proscrite, du fait de l’absence d’infrastructure ou de la mobilité de cette dernière.

Les domiciles assimilés à de simples boîtes aux lettres ne sont plus acceptés. Le domicile professionnel d’exercice et les obligations qui y sont associées bénéficient désormais d’une définition claire.

En outre, le bail ne doit contenir aucune clause contraire au principe d’indépendance du vétérinaire. Afin de garantir le respect de la définition de ces lieux, le domicile professionnel d’exercice fera l’objet d’une déclaration préalable auprès de l’Ordre. « Nous disposons aussi du levier du grossiste répartiteur, qui est tenu de vérifier que la livraison s’effectue bien dans des locaux professionnels, explique l’Ordre. Nous avons fait en sorte que DPA et DPE soient liés. » Si l’on considère le cas particulier du vétérinaire d’expertise, le DPA et le DPE constituent un même lieu.

ÉTABLISSEMENTS DE SOINS VÉTÉRINAIRES

Le code apporte des précisions sur les établissements de soins. « L’établissement situé au domicile professionnel d’exercice, où sont amenés les animaux pour y être soignés, est dénommé établissement de soins vétérinaires. »

> Les établissements de soins vétérinaires sont le cabinet vétérinaire, la clinique vétérinaire, le centre de vétérinaires spécialistes (notion nouvelle) et le centre hospitalier vétérinaire (CHV). Les cahiers des charges de ces différents établissements renvoient à la parution ultérieure d’arrêtés (voir encadré ci-contre).

Ces établissements de soins pourront répondre à un cahier des charges selon les espèces. Les conditions sont aussi créées pour disposer de CHV équins. Un arrêté relatif aux catégories d’établissement de soins vétérinaires va paraître. Sept modules d’activité pourront aussi y être rattachés.

> Les associations de protection animale doivent garantir les conditions minimales requises pour le cabinet vétérinaire.

> Le vétérinaire à domicile déclare un DPE mais n’exerce pas dans un établissement de soins.

Par ailleurs, la notion de vétérinaire itinérant a disparu.

CONTRATS ET CONVENTIONS

La partie administrative n’est pas celle qui passionne le plus les vétérinaires en exercice, qu’il s’agisse des statuts de société, du règlement intérieur ou du pacte d’associés. Le code rappelle des principes simples. Un contrat doit être écrit, daté, signé et transmis au conseil régional de l’Ordre (CRO). Les contrats fournisseurs et les contrats de soins avec les clients sont, bien entendu, exclus du propos du code.

L’obligation de transmettre les contrats est ainsi renforcée et les baux professionnels sont ajoutés.

Un contrat est le droit des parties. Le rôle de l’Ordre, qui n’a pas légitimité à s’y opposer, est de l’analyser sous l’angle de la déontologie et de prévenir le vétérinaire s’il est en contradiction avec son code, avec clarté pour éviter toute ambiguïté entre le praticien et ce qu’il peut attendre de son CRO.

LA COMMUNICATION

La communication devient « libre, et ce quels qu’en soient le support et les modalités, sous réserve d’être conforme aux dispositions réglementant l’exercice de la profession, notamment celles du présent code et celles du Code de la santé publique ».

> Le principe de la communication est celui « d’une liberté modulée par le respect du public et de l’éthique d’une profession réglementée soumise à un ordre ». L’objectif est notamment que la profession vétérinaire bénéficie des mêmes moyens de communication que les professions paravétérinaires qui communiquent en toute liberté, alors que les confrères sont freinés lorsqu’ils tentent de faire connaître l’activité de leur clinique. Le principe suivi par ce nouveau code est donc celui d’une communication libre, loyale, fiable et vérifiable, car la relation avec le client est fondée sur la confiance.

> Le vétérinaire a un devoir d’information des clients en matière de prestations et de services proposés. « Il y a plus de liberté, mais la responsabilité est augmentée », précise l’Ordre. Ce point s’inscrit parfaitement dans la complémentarité des articles 22 et 24 de la directive n° 2006/123/CE, dite directive “services”. Le nouveau code ouvre donc des obligations de communication renforcée, telles que préciser qui travaille dans l’établissement de soins ou comment la permanence est organisée. La croix vétérinaire reste un incontournable.

Concrètement, il sera désormais possible de répondre positivement à un journaliste qui souhaite effectuer un reportage dans votre clinique, à condition que l’information publiée reste loyale et ne trompe en aucun cas le public.

Tous les supports de communication sont donc tolérés si l’information respecte les règles déontologiques.

Concernant les voitures, « seule l’apposition sur les véhicules professionnels d’un logotype reprenant exclusivement la croix vétérinaire est autorisée. Les vétérinaires qui assurent une permanence des soins 24 heures sur 24 peuvent compléter le logotype par la mention “Vétérinaire 24 h/24” ».

La communication impose également le respect du Code de la santé publique. Ainsi, les tarifs sur les médicaments ne peuvent pas être cités. « La communication ne peut pas encourager l’utilisation d’un médicament vétérinaire soumis à prescription. »

Enfin, les confrères sont libres de communiquer, sous forme non promotionnelle, sur la tarification de leurs actes.

LA FIN DE LA CLAUSE DE NON-CONCURRENCE

La fin de la clause déontologique de non-concurrence, annoncée dans le nouveau code, constitue un changement important pour les vétérinaires, qui y étaient parfois attachés. L’Ordre fait le constat que la jurisprudence a fait évoluer le code car, les juges raisonnant en termes de liberté, les clauses de non-concurrence étaient fragiles lorsqu’elles étaient remises en cause lors d’un litige en l’absence de clauses financières associées.

La clause de non-concurrence devient donc contractuelle. L’Ordre ne pourra plus s’opposer à un accord bilatéral, à condition qu’une telle clause soit insérée dans le contrat de travail et ne concerne qu’un seul domicile professionnel d’exercice. La clause de non-concurrence, pour être licite, ne doit cependant pas empêcher un confrère de travailler.

Cette évolution du code est « à visée pédagogique, souligne l’Ordre, afin que les vétérinaires en discutent avant la signature du contrat, et non pas lors de la séparation en se réfugiant derrière la déontologie ».

REFUSER DE PRODIGUER DES SOINS

Le refus de prodiguer des soins est une autre évolution importante du nouveau code. Cette clause existe déjà en médecine humaine. Bien entendu, il existe des exceptions, telles que la situation d’urgence vitale pour l’animal ou l’intervention afin de lui éviter des souffrances non justifiées. En dehors de ces cas, « le vétérinaire peut refuser de prodiguer ses soins pour tout autre motif légitime ».

LES GARDES

Le nouveau code permet au vétérinaire de déléguer à un confrère la permanence des soins, après l’établissement obligatoire d’une convention qui aura été validée par le CRO.

Cette évolution a pour objectif d’éviter que certains confrères ne cessent de travailler le vendredi, par exemple, et ne se déchargent de leur permanence de soins sur d’autres confrères, sans que cela ait au préalable été établi par consentement mutuel ou convention…

Un important travail est aussi en cours au niveau de la base logicielle de l’Ordre et de son site internet pour que soient affichés les vétérinaires ayant un service de garde valide. « C’est un axe fort de notre politique », souligne l’Ordre.

En outre, la transparence et une bonne communication sont de mise. Le vétérinaire est tenu d’informer le public de la façon dont s’effectue la surveillance des animaux. Lorsque c’est le cas, il doit donc également signaler l’absence de personnel de garde à la clinique.

LE VÉTÉRINAIRE N’EST PAS UN COMMERÇANT

« Le vétérinaire ne peut pratiquer sa profession comme un commerce. » L’esprit du texte est important. Ne s’agissant pas d’un commerce, le vétérinaire n’est pas autorisé à utiliser des moyens promotionnels classiques de commerce. Certaines activités accessoires sont autorisées dans le prolongement de l’acte. Ainsi, « la délivrance des aliments pour animaux visant des objectifs nutritionnels particuliers et, d’une façon générale, des produits, matériels et services en rapport avec l’exercice de la médecine et de la chirurgie des animaux, est autorisée en tant qu’elle constitue une activité accessoire à l’exercice de la médecine et de la chirurgie des animaux ».

En revanche, « tout courtage en matière de commerce d’animaux et toute intermédiation d’assurance sont interdits aux vétérinaires exerçant la médecine et la chirurgie des animaux ».

L’ANTIBIORÉSISTANCE

Le vétérinaire, qui doit prendre en compte les conséquences de sa prescription, « veille à une utilisation prudente et raisonnée des agents antimicrobiens et antiparasitaires afin de limiter le risque d’apparition d’une résistance ». Le nouveau Code de déontologie a donc inclus l’antibiorésistance comme « une grande cause déontologique » et un devoir pour les vétérinaires. Cela ajoute une notion pédagogique supplémentaire au plan Éco­Antibio et aux règlements européens.

LE RESPECT DES ANIMAUX

« Le vétérinaire respecte les animaux. » Le nouveau code souhaite apporter une meilleure prise en compte de la santé et de la protection animales, comme s’y était engagé son président, Michel Baussier, dès le début de son mandat à la présidence de l’institution ordinale.

À l’heure où le débat sociétal sur la nature sensible de l’animal monte en puissance, le Code de déontologie réaffirme la place du vétérinaire face au respect de l’animal et à la prise en charge de sa douleur.

LE RESPECT DE L’ENVIRONNEMENT

Le vétérinaire est un acteur de la biodiversité et du développement durable, et le code précise qu’il « prend en compte les conséquences de son activité professionnelle sur l’environnement ».

Le Code de déontologie de 2015 marque ainsi un tournant pour la décennie à venir. Certains points resteront sans doute à résoudre. L’Ordre souhaite notamment revoir dès à présent « l’architecture pour une meilleure compréhension et pour gagner en lisibilité ». De plus, un « travail est à entreprendre sur la déontologie de la personne morale ».

D’AUTRES ARRÊTÉS SONT ATTENDUS

Bien entendu, un Code de déontologie fixe un cadre et apporte une architecture. D’autres arrêtés à paraître affineront certaines mesures et apporteront une souplesse à des notions professionnelles qui évoluent au fil des années.

Un arrêté devrait ainsi créer une catégorie de centres de vétérinaires spécialistes, permettant de distinguer les établissements de soins par espèces, de déverrouiller certaines contraintes (par exemple, les auxiliaires spécialisés vétérinaires dédiés exclusivement à la pratique canine ; à la place, il sera possible de parler de « personnes qualifiées »). Ces centres de spécialistes devront comporter au moins deux vétérinaires spécialistes en équivalent temps plein (ETP).

L’appellation de cabinet médico-chirurgical pourrait aussi émerger, de même que celle de cabinet vétérinaire en ostéopathie si l’exercice est exclusif.

Il deviendrait également possible de revendiquer des modules, portant par exemple sur les soins intensifs (indissociables du module 24 h/24) ou encore la chirurgie générale, le 24 h/24 (avec la présence obligatoire d’un vétérinaire sur site), le service de garde (où les modalités de continuité du service de garde devront être explicites), l’hospitalisation, l’imagerie médicale, etc.

EN BREF

La conciliation et la médiation sont précisées dans ce nouveau code. « Si un désaccord professionnel survient entre des confrères, ceux-ci doivent d’abord chercher une conciliation. En cas d’échec de la conciliation, ils sollicitent une médiation ordinale auprès du président du conseil régional de l’Ordre. »

La signature électronique du vétérinaire certifié n’existe plus.

Le vétérinaire remplaçant est ainsi défini : « Le vétérinaire qui remplace un confrère assure le service de la clientèle de ce confrère ».

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