Un cas d’ostéochondrodysplasie chez un scottish fold - La Semaine Vétérinaire n° 1609 du 12/12/2014
La Semaine Vétérinaire n° 1609 du 12/12/2014

Formation

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Javier Rincon*, Adrien Aertsens**, Guillaume Ragetly***

Fonctions :
*(DACVS, DECVS),
praticiens au CHV Frégis, Arcueil (Val-de-Marne)
**(DACVS, DECVS),
praticiens au CHV Frégis, Arcueil (Val-de-Marne)
***(DACVS, DECVS),
praticiens au CHV Frégis, Arcueil (Val-de-Marne)

Points forts

– L’ostéochondrodysplasie affecte tous les chats scottish fold, avec des symptômes plus ou moins marqués selon leur statut hétérozygote ou homozygote vis-à-vis de la mutation génétique concernée.

– Informer les propriétaires au plus tôt semble indispensable.

– Des clichés radiographiques sont à proposer dès l’apparition des premiers signes.

Les maladies de croissance osseuse et cartilagineuse sont rares. Elles peuvent être divisées en deux groupes :

→ les dysostoses se caractérisent par un développement anormal d’un seul os ou d’une partie de l’os ;

→ les ostéochondrodysplasies se distinguent par une ossification endochondrale ou intramembranaire anormale.

Race développée en Écosse dans les années 1960, le scottish fold résulte du croisement entre des chats de race “locale” et le british short hair. Il se caractérise principalement par ses oreilles pliées vers l’avant, conséquence d’un plissement des cartilages auriculaires dans les 3 à 4 premières semaines de vie. Des études de pedigree révèlent que le croisement de scottish fold entre eux est associé à l’ostéochondrodysplasie. Ces accouplements furent interdits en Angleterre, mais poursuivis aux États-Unis, avant d’être à nouveau initiés en Europe. Cet article a pour objectif de présenter cette maladie au travers d’un cas clinique.

CAS CLINIQUE

→ Un scottish fold mâle castré âgé de 4 ans, vacciné et vermifugé, est présenté en consultation en raison de difficultés locomotrices et de douleurs articulaires depuis une semaine. Son propriétaire a noté la présence de gonflements articulaires.

→ À l’examen clinique, une démarche réticente, une manipulation très douloureuse des coudes et des tarses, ainsi qu’un épanchement majeur au niveau de ces articulations et des carpes sont mis en évidence.

→ L’examen radiographique révèle une ankylose des tarses secondaire à une prolifération osseuse périarticulaire exubérante, lisse et nette, des articulations tibio-tarsiennes, intertarsiennes et tarso-métatarsiennes, associée à un gonflement articulaire.

→ Le diagnostic différentiel inclut une polyarthrite (d’origine infectieuse ou à médiation immune) ou une maladie congénitale (ostéochondrodysplasie). Un bilan sanguin et des ponctions articulaires sont effectués. L’immunosérologie pour les virus de l’immunodéficience et de la leucémie félines (FeLV/ FIV) est négative, ainsi que les polymerase chain reaction (PCR) pour la recherche de Borrelia, de calicivirus, de coronavirus, d’Ehrlichia, d’Anaplasma, d’hémobartonelle et de Leishmania. La cytologie du liquide synovial fait suspecter une arthropathie dégénérative (absence de germe et de cellules inflammatoires). Par exclusion, une ostéochondrodysplasie est diagnostiquée.

→ Un traitement à base de corticoïdes est instauré à 1 mg/kg/jour pour la prise en charge de l’inflammation et de la douleur. Un régime alimentaire spécifique pour le soutien articulaire et une complémentation avec de la glucosamine et de la chondroïtine sulfate sont également prescrits. La démarche s’améliore en 48 heures. Les anti-inflammatoires stéroïdiens (AIS) sont diminués progressivement sur une période de 15 jours.

→ Lors du contrôle à 2 semaines, l’animal se montre plus actif et moins douloureux. Quelques jours après l’arrêt des corticoïdes, la boiterie réapparaît. Un traitement à base de méloxicam est donc instauré pour 1 semaine et permet un retour à une démarche normale. Dès son interruption, la boiterie ressurgit. Un traitement à long terme à dose minimale efficace est par conséquent mis en place.

DISCUSSION

La présence du phénotype “folded ears” chez le scottish fold est due à l’expression du gène Fd, qui provoque un développement anormal du cartilage des oreilles et des articulations distales des membres, plus marqué dans celles des tarses, des métatarses et des phalanges, ainsi que dans la queue. Le cartilage atteint engendre une friction entre les os et, par conséquent, une dégénérescence prématurée et accélérée de l’articulation.

Les anomalies des cartilages peuvent être identifiées dès l’âge de 7 semaines. Elles sont néanmoins radiologiquement et cliniquement évidentes après 6 mois environ. Des irrégularités de la taille et de la forme des tarses, des carpes, des métacarpes, des métatarses, des phalanges et de la région caudale de la colonne vertébrale sont observées, associées à une diminution de l’espace articulaire et à une prolifération osseuse périarticulaire exubérante.

La transmission du phénotype “folded ears” est à dominance autosomale. Les animaux homozygotes (Fd/Fd) présentent une ostéochondrodysplasie sévère. Cependant, ceux hétérozygotes (Fd/fd) développent la maladie avec des symptômes de gravité moindre et d’apparition plus tardive.

Dans le cas présenté, compte tenu des signes cliniques et radiographiques, et de l’âge de l’animal, il s’agit probablement d’un chat hétérozygote. Le traitement est palliatif et vise à limiter la douleur afin d’améliorer la qualité de vie. Plusieurs options sont possibles. Une prise en charge médicale, à l’aide d’anti-inflammatoires et d’antalgiques, peut être testée, comme dans le cas présenté. Les molécules les plus fréquemment utilisées sont des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ou stéroïdiens. Des traitements à long terme à base de méloxicam se sont révélés efficaces avec peu d’effets secondaires.

Une radiothérapie palliative a aussi montré son efficacité dans la littérature pour la diminution de l’exostose tarsale et des signes d’inflammation, avec un contrôle des signes cliniques à long terme (plus de 2 ans de survie). Cependant, ces traitements sont à évaluer pour chaque animal, puisque les chats hétérozygotes souffrent de symptômes moins sévères. En outre, une prise en charge médicale peut se révéler suffisante.

D’autres publications rapportent les effets bénéfiques d’arthrodèses. Ces deux options semblent envisageables lorsque les signes cliniques sont limités à une atteinte d’une ou de quelques articulations uniquement, ce qui n’est pas souvent le cas. Lors d’arthrodèse, une plaque d’ostéosynthèse est placée avec une angulation de 135º (position physiologique de l’articulation) entre le tibia et les os métatarsiens, empêchant le mouvement de ces articulations. Mais cette solution est rarement proposée, compte tenu du caractère multicentrique de la maladie et des conséquences sur la locomotion d’arthrodèses multiples.

Bibliographie

  • → Chang J., Jung J., Oh S. et coll. Osteochondrodysplasia in three scottish fold cats. j vet sci 2007, 3, 307-309.
  • → Malik R., Allan G.S., Howlett C.R.et coll. Osteochondrodysplasia in scottish fold cats. Aust Vet J 1999, 77, 85-92.
  • → Hubler M., Volkert M., Kaser-Hotz B., Arnold S. Palliative irradiation of scottish fold osteochondrodysplasia. Vet Radiol Ultrasound 2004, 45, 582-585.
  • → Takanosu M., Takanosu T., Suzuki H., Suzuki K. Incomplete dominant osteochondrodysplasia in heterozygous scottish fold cats. j small anim pract 2008, 49, 197-199.
  • → Mathews K.G., Koblik P.D., Knoeckel M.J. et coll. Resolution of lameness associated with scottish fold osteodystrophy following bilateral ostectomies and pantarsal arthrodeses: a case report. j anim hosp assoc 1995, 31, 280-288.
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