Internet : l’allié des vétérinaires - La Semaine Vétérinaire n° 1603 du 31/10/2014
La Semaine Vétérinaire n° 1603 du 31/10/2014

Entreprise

Auteur(s) : Alison Chatard*, Marine Hugonnard**

Fonctions :
*DMV, ancienne étudiante 5A Chev VetAgro Sup campus vétérinaire de Lyon
**DMV PhD, maître de conférences unité pathologie médicale des animaux de compagnie

Internet est aujourd’hui le média le plus consulté pour la recherche d’informations médicales : près de 75 % des propriétaires d’animaux de compagnie en font l’usage. Néanmoins, pour plus de 90 % des clients, le vétérinaire reste la source la plus fiable.

Docteur Google est une entité à part entière qui s’invite à la consultation. Que faut-il penser de ce nouveau média ? Est-ce un allié ou, au contraire, un ennemi du vétérinaire ? Une enquête réalisée auprès des clients de VetAgro Sup (voir encadré) venant en consultation au centre hospitaliser d’enseignement vétérinaire animaux de compagnie (Chevac) tente de répondre à cette question.

Lorsque l’animal est blessé ou malade, 40 % des propriétaires ont pour premier réflexe de consulter Internet. La plupart sont des utilisateurs occasionnels (moins d’une fois par an ou moins d’une fois par mois). Seuls 17 % disent s’informer en ligne plus d’une fois par mois. L’utilisation d’Internet ne semble pas réservée à un profil particulier : tous les clients sont des “internautes santé” potentiels. La consultation en ligne par les propriétaires d’animaux de compagnie est un phénomène important que les vétérinaires ne peuvent ignorer. La plupart du temps, les internautes recherchent des informations sur une maladie (51,1 %), un symptôme (51,1 %) ou une race (50 %). Viennent ensuite les recherches sur la nutrition et le bien-être (48,9 %) et le comportement de l’animal de compagnie (43,5 %). Enfin, de manière plus anecdotique, les clients souhaitent des informations sur des traitements (29,1 %) et la médecine douce (19,2 %). Seuls 6,6 % consultent le Web pour rechercher une interaction avec d’autres propriétaires (forum de discussion).

LE VÉTÉRINAIRE, LA SOURCE D’INFORMATION LA PLUS FIABLE

Ce phénomène est-il à redouter ? Cette crainte semble infondée. Bien au contraire, Internet se révèle même être un allié. En effet, la plupart des propriétaires qui s’informent via le Web, avant un rendez-vous chez le vétérinaire, se sentent plus à l’aise lors de la consultation : ils posent davantage de questions, ont une meilleure compréhension des données médicales et se sentent plus impliqués dans les choix des soins concernant leur animal de compagnie. Internet devient ainsi un atout majeur pour la communication et l’observance du traitement. Un propriétaire plus enclin à poser des questions et déjà informé sur le sujet est davantage apte à comprendre le professionnel de santé et se sent plus impliqué dans le projet de soin de son animal. Il est donc possible de penser qu’un animal au “maître internaute” a des chances d’être mieux soigné. Certains vétérinaires se sentent défiés lorsqu’un propriétaire évoque ses recherches en ligne. Ce sentiment n’est pas justifié : la première cause est la simple curiosité et non le doute ou le désaccord avec le vétérinaire (qui arrive en dernière position des motivations exprimées). Aux yeux de plus de 90 % des clients, le vétérinaire reste la source d’information la plus fiable.

Enfin, une minorité de propriétaires (5,5 %) pensent qu’Internet a un effet néfaste sur la relation praticien/client, tandis que près de 40 % estiment que l’effet est positif. Loin d’être un sujet tabou, les recherches sur Internet sont assumées par les clients : près de deux “internautes santé” sur trois en parlent avec leur vétérinaire lors de la consultation.

L’EFFET ANXIOGÈNE DES RECHERCHES EN LIGNE

Cependant, dire que les recherches sur Internet n’ont qu’un effet positif serait réducteur. Même si le sentiment le plus répandu lors de la consultation d’informations médicales en ligne est le soulagement, Internet est susceptible de générer un effet anxiogène sur un pourcentage significatif de propriétaires : près de 60 % se sentent parfois ou souvent submergés et perturbés par les informations trouvées et plus d’un tiers sont parfois ou souvent apeurés.

De plus, selon 61 % des vétérinaires, la mention de recherches sur Internet par les clients augmente le temps de consultation et se révèle donc chronophage. Un bon point toutefois : les propriétaires s’orientent surtout vers des sites médicaux spécialisés ou de cliniques vétérinaires plutôt que vers des forums de discussion ou des blogs, où les informations ne sont pas véhiculées par des professionnels. La majorité des propriétaires cherchent à vérifier la véracité des renseignements trouvés et la plupart le font auprès de leur vétérinaire.

UN SENS CRITIQUE DES CLIENTS FORT RELATIF

Il importe de souligner que la confiance des propriétaires en Internet n’est pas absolue. Rares sont ceux qui ont toujours foi en les informations trouvées en ligne. Néanmoins, ce sens critique est à nuancer. En effet, près de la moitié des personnes interrogées ne vérifient jamais la dernière actualisation du site consulté et la plupart des recherches s’effectuent selon le référencement des sites sur les moteurs de recherche. Ceci est d’autant moins satisfaisant que les sites dédiés à la santé animale ne sont pas de bons élèves : des études sur le sujet indiquent qu’ils sont soit peu fiables, soit incomplets, voire qu’ils contiennent des informations erronées, soit peu compréhensibles par le grand public1.

Enfin, la majorité des personnes interrogées ne connaissent aucun label d’accréditation. Par un effet “boule de neige”, ces derniers ne sont pas convoités par les créateurs de site internet.

L’AVIS DU PROFESSIONNEL PRISÉ

Tout d’abord, il faut garder en tête que le propriétaire qui se déplace jusqu’au cabinet désire avoir l’avis du professionnel de santé.

D’ailleurs, une étude en médecine humaine révèle que la consultation d’informations de santé en ligne favorise la prise de rendez-vous : elle génère chez les internautes le désir de rencontrer un professionnel de santé pour se soigner et comprendre ce qu’ils ont lu en ligne2. Internet est donc un outil qui permet à certains clients, qui ne se seraient peut-être pas déplacés de prime abord, de pousser la porte du cabinet. Ensuite, il convient de guider le propriétaire semblant être un “internaute santé” vers des sites de qualité afin d’orienter ses recherches. Il est impossible d’empêcher les clients de se renseigner sur Internet, autant les diriger vers des sites jugés fiables par le praticien.

L’étape ultime consiste à créer son propre site internet. Cela requiert du temps, non seulement pour le concevoir mais surtout pour le faire vivre. Cependant, comme 75 % des propriétaires sont des “internautes santé”, cela permet de penser qu’il s’agit d’un bon investissement, puisqu’il intéresse une partie de la clientèle.

LE MÉDIA EN LIGNE, UN PARTENAIRE

Internet est donc un phénomène incontournable. Il est un partenaire du vétérinaire et non un concurrent : il favorise la prise de rendez-vous et aide à l’adhésion au projet de soins. Les propriétaires sont, quant à eux, conscients des limites de la Toile : ils n’ont pas une confiance absolue en ce média et cherchent à vérifier les informations trouvées. Le Web peut être une cause d’anxiété chez un nombre non négligeable de clients, les sites médicaux sont de qualité inégale et/ou peu compréhensibles par le grand public. Dans ce contexte, le rôle du vétérinaire est essentiel pour rassurer les propriétaires et les rediriger vers des sites qui délivrent une information validée, actualisée et compréhensible. Il est également susceptible de choisir de créer le sien.

  • 1 Hofmeister E.H., Watson V., Snyder L.B., Love E.J. (2008). Validity and client use of information from the World Wide Web regarding veterinary anesthesia in dogs. Journal of the American Veterinary Medical Association, 233, (12), 1860-4. Jehn C.T., Perzak D.E., Cook J.L., Johnston S.A., Todhunter R.J., Budsberg S.C. (2003). Usefulness, completeness, and accuracy of Web sites providing information on osteoarthritis in dogs. Journal of the American Veterinary Medical Association, 223, (9), 1272-5. Taggart R., Wardlaw J., Horstman C.L., Mason D.R., Sidaway B., Havas K. (2010). An analysis of the quality of canine cranial cruciate ligament disease information available on the Internet. Veterinary Surgery, 39, (3), 278-83.

  • 2 Lee C.J. (2008). Does the Internet displace health professionals? Journal of Health Communication, 13, (5), 450-64.

MÉTHODOLOGIE

L’étude a été menée dans le cadre de la thèse de doctorat vétérinaire d’Alison Chatard. 239 propriétaires ont répondu au questionnaire, qui aborde trois grands thèmes :

> l’utilisation d’Internet par les propriétaires d’animaux de compagnie (profil des utilisateurs, informations recherchées, sites préférés) ;

> la perception des données trouvées en ligne par les clients (fiabilité et émotions engendrées) ;

> l’influence d’Internet (sur une consultation et la relation vétérinaire/propriétaire).

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