Réflexions autour de la gestion et du traitement des trématodoses - La Semaine Vétérinaire n° 1601 du 17/10/2014
La Semaine Vétérinaire n° 1601 du 17/10/2014

Formation

PRODUCTIONS ANIMALES/RUMINANTS

Auteur(s) : Lorenza Richard

La commission parasitologie de la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV) se concerte actuellement pour établir des recommandations relatives à la gestion de la trématodose. Ces mises au point sont nécessaires, en raison de la mise en place de délais de sécurité relatifs à l’utilisation des douvicides en 2013 pour la sécurité du consommateur (voir tableau) et de l’établissement de délais d’attente lait et viande pour l’oxyclosanide en 2014. Le temps d’attente viande est ainsi de 14 jours pour les bovins et les ovins ; pour le lait, il s’élève à 4,5 jours chez les bovins et à 7 jours chez les ovins (Zanil Suspension®, MSD Intervet, et Douvistome®, Ceva Santé animale). Le délai d’attente lait atteint 7 jours et le délai viande 28 jours pour la paramphistomose.

Les premiers éléments de réflexion ont été délivrés lors des journées nationales des groupements techniques vétérinaires (GTV) en mai dernier1.

AMÉLIORER LE DIAGNOSTIC

L’une des possibilités envisagées par la commission est, d’abord, d’améliorer le diagnostic. « La sensibilisation de l’éleveur passe par la sérologie », explique Philippe Camuset, président de la commission parasitologie de la SNGTV. Le statut des élevages au regard de la fasciolose est sous-estimé, notamment lors de faible infestation, et 50 % environ des troupeaux infestés ne seraient pas détectés2. Le statut de chaque élevage devra sans doute être évalué à l’avenir, ce qui constitue une porte d’entrée importante pour les vétérinaires et leurs conseils en matière de gestion des trématodoses.

Toutefois, les kits Elisa manquent de sensibilité pour les bovins faiblement infestés (moins de 4 douves pour le test Elisa Pourquier de Idexx, par exemple), alors qu’ils représentent la majorité3. De plus, les sérologies individuelles ne permettent pas de conclure sur l’étendue des surfaces à risque. Pour compenser ce défaut de sensibilité, il est préférable d’effectuer des sérologies de mélange (sur 5 primipares et 5 multipares, ou 10 primipares d’une part et 10 multipares d’autre part en élevage laitier, et sur des lots par prés en élevage allaitant). Ces sérologies diagnostiques sont à réaliser de préférence 4 semaines après la rentrée à l’étable, et, en première année de pâture, 3 mois après la sortie à l’herbe, ainsi qu’à la rentrée si le premier résultat est négatif (les sérologies se négativent entre 2 et 6 mois après traitement).

La coproscopie n’est pas fiable pour diagnostiquer la grande douve, car la période prépatente est longue, la majorité des animaux sont faiblement infestés, la prolificité est faible et la libération de la bile irrégulière. La systématisation des analyses sur le lait de mélange ou de tank faciliterait l’évaluation des risques.

Pour la paramphistomose, les coproscopies de mélange ne permettent de déterminer ni la prévalence ni la dispersion de l’infestation. Les coproscopies individuelles doivent leur être préférées.

GESTION DES PÂTURES

Une seconde étape consiste à déterminer les gîtes à limnées et à définir quels animaux ont été en contact avec eux. Les zones de marais permettent aux métacercaires d’échapper au gel et les infestations sont importantes, de même dans les zones où les ragondins sont présents et contaminent les pâtures.

Il est préférable de réserver les parcelles à risque aux animaux en “premières années de pâture” et celles saines aux adultes. Toutefois, en élevage allaitant, la séparation des mères et des veaux sur les pâtures n’est pas envisageable. Si le risque d’infestation concerne tous les animaux, un traitement de l’ensemble du cheptel est à instaurer rapidement. Des mesures agronomiques correctives peuvent également être proposées, dans la mesure du possible. Toutefois, dans le cas où le risque existe sur l’ensemble des parcelles, seule une stratégie thérapeutique peut être envisagée. Lorsque ces mesures sont possibles, elles sont à réévaluer chaque année lors d’une visite d’élevage en parasitologie après la rentrée en étable.

TRAITEMENTS

Concernant la grande douve, pour les vaches laitières, deux traitements à 8 semaines d’intervalle avec 30 ml/100 kg avec stop-dose d’oxyclosanide sont recommandés en zone humide, le premier étant administré à l’entrée en stabulation. Dans les élevages laitiers, en première année de pâture, les traitements d’été peuvent être recommandés 6 à 8 semaines après la mise à l’herbe, puis toutes les 6 à 12 semaines selon les molécules, et avec des spécialités différentes pour limiter les résistances. « Les traitements au tarissement n’ont pas toujours de cohérence épidémiologique, mais ils sont les seuls à ne pas induire d’éviction de lait produit », poursuit notre confrère. Pour cette raison, la meilleure recommandation serait de traiter 8 semaines après la fin du contact parasitaire, et de nouveau 8 semaines après pour les vaches laitières hautes productrices, en respectant les temps d’attente. En élevage allaitant, il est conseillé de traiter les vaches avant le vêlage. S’il a lieu après la rentrée en stabulation, un traitement est conseillé dès que possible après ce moment. Si nécessaire, en fin de saison de pâture, les broutards et les mères sont traités au sevrage.

Pour la petite douve, qui représente 20 à 30 % des saisies hépatiques, un traitement au nétobimin 10 semaines après la mise à l’herbe est conseillé (utilisation de la cascade, avec des temps d’attente lait de 3 jours et viande de 6 jours).

Le traitement contre la paramphistomose est réalisé à l’oxyclosanide sans stop-dose, avec délai d’attente lait et viande maximal.

LE CAS DES OVINS

Chez les ovins, le kit ES Inra est utilisable. Toutefois le diagnostic est souvent nécropsique. Lors d’infestation conjointe par la grande et la petite douves, le nétobimin peut être recommandé à la posologie de 20 mg/kg. Pour Fasciola, trois traitements sont conseillés en élevage ovin allaitant (juin, septembre et décembre), au tarissement en élevage laitier, avec l’oxyclosanide ou le nétobimin. Chez les laitiers toujours, l’œstrose est traitée au tarissement avec la doramectine (temps d’attente lait de 2 mois).

Ces réflexions menées par la commission “parasitologie” visent à redonner au praticien sa place de conseiller. Les éleveurs traitent encore régulièrement sans connaître le statut de leur troupeau. Leur information se révèle indispensable pour une meilleure gestion de la santé des animaux. Pour toutes ces raisons, Philippe Camuset nous rappelle qu’« une prescription sur mesure est plus que jamais indispensable. »

  • 1 Article rédigé d’après les conférences présentées le 23 mai dernier à Reims, lors des journées nationales des GTV, par Philippe Camuset (président de la commission parasitologie de la SNGTV) et Thierry Jozan (MSD Santé animale).

  • 2 Legrand E., Périé P. Présentation des résultats de l’étude Douve-Paramphistome. Synergievet’mag. Décembre 2012:1-2.

  • 3 Chauvin A. Trématodoses des ruminants. Le Point vétérinaire 2012 ; numéro spécial 43:62-67.

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