« Notre filière est récente et petite, et notre spécialité n’est pas suffisamment reconnue »

Je souhaitais voyager et m’engager dans le développement d’une activité innovante et en lien avec la recherche. J’ai effectué ma thèse à l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer), et passé des certificats d’études spécialisées (CES) de médecine pour la partie laboratoire. Après avoir travaillé à l’étranger, je me suis installé en France en activité aquacole libérale en 2000. J’ai créé la société d’exercice libérale à responsabilité limitée Vet’eau en 2007, qui a intégré le groupe Chêne vert en 2009.

Notre activité se concentre essentiellement autour des élevages de poissons en eau de mer et en eau douce, des poissons d’ornements (aquariums publics) et de quelques écloseries de coquillages. Elle se répartit pour moitié en France, où nos clients sont principalement des élevages aquacoles, et pour moitié à l’étranger, où nous intervenons en tant que consultants sur des sites de production, des projets de développement ou pour des agences nationales ou internationales.

La directive sanitaire européenne 2006/88 oblige désormais les élevages à avoir un suivi vétérinaire, intégrant l’agrément zoosanitaire, le bilan sanitaire et le protocole de soin, ce qui génère du travail. Notre mandat sanitaire est national, ce qui nous permet de suivre une clientèle dispersée dans toute la France. Notre activité est principalement axée sur la prévention, la biosécurité et l’analyse de risque, la mise en place de programme de prophylaxie sanitaire et médicale. La majeure partie des analyses sont effectuées sur place, dans notre laboratoire ou ceux du groupe. Cela nous permet de formuler des diagnostics rapides et, notamment, de mettre en place un schéma de certification sanitaire des lots d’alevins sortant des écloseries marines. Enfin, nous participons à des programmes de recherche et assurons des formations pour différents instituts français et étrangers. Notre activité est intéressante, mais impose de fréquents et longs déplacements. De plus, les aspects administratifs deviennent de plus en plus prépondérants et lourds à gérer. Notre filière est en effet soumise à différentes législations sur le sanitaire, l’environnement, la loi sur l’eau.

« Nous ne sommes pas encore considérés comme des référents »

Le problème est que notre spécialité n’est pas reconnue par un diplôme officiel, européen notamment. Il n’existe pas, en France, de formation diplômante actuellement. La seule formation à l’ichtyopathologie est assurée par l’université de Stirling (Écosse). Avec quelques confrères européens, nous réfléchissons actuellement à une reconnaissance de notre spécialité, via la création d’un collège européen.

Nous sommes peu de confrères exerçant exclusivement en libéral, dans ce domaine en France et notre activité est peu connue par le grand public et de nos autres confrères. Il est rare que nous soyons contactés pour des cas référés, ce qui est dommage. Au mieux, nous le sommes pour des conseils.

Cette situation pose également le problème du maillage sanitaire national aquacole. Doit-il être assuré par des vétérinaires aquacoles spécialisés ? Si oui, sur quelle base notre spécialité est-elle reconnue dans la mesure où il n’existe pas en France de formation diplômante ? Ou le maillage doit-il être assuré par des vétérinaires non spécialisés mais de proximité, avec les biais que cela peut éventuellement induire ?