Bénéfices d’une alimentation carnée chez le furet - La Semaine Vétérinaire n° 1594 du 29/08/2014
La Semaine Vétérinaire n° 1594 du 29/08/2014

Formation

NAC

Auteur(s) : Adeline Linsart*, Géraldine Blanchard**

Fonctions :
*unité NAC du centre hospitalier
vétérinaire Saint-Martin,
à Saint-Martin-Bellevue
(Haute-Savoie)
**Animal nutrition expertise SARL,
à Antony (Hauts-de-Seine)

Le vétérinaire doit être à la fois averti et vigilant sur les techniques d’alimentation utilisées par les propriétaires de furets rencontrés en consultation. Il est impératif de demander en détail de quoi la nourriture du furet est constituée, et ce, à chaque visite.

L’alimentation carnée (également appelée Barf pour biologically appropriate raw food ou bones and raw food) a longtemps été décriée, tant par les praticiens que par le grand public. Considérée comme peu hygiénique, déséquilibrée et à l’origine d’une certaine forme d’agressivité chez le furet, elle était cantonnée au nourrissage des animaux d’élevage au sein de grandes fermes ou utilisée chez quelques passionnés. Ces dernières années, la fréquence accrue d’un certain nombre de maladies a conduit de nombreux praticiens à revenir au régime carné et à prescrire une alimentation plus proche des besoins nutritionnels réels (voir encadré 1).

BÉNÉFICES DE L’ALIMENTATION CARNÉE

Densité énergétique moindre et sensation de satiété

L’alimentation industrielle sèche est trois à quatre fois plus calorique en moyenne que celle carnée, humide (densité énergétique de 3 à 4 kcal/g versus 1 kcal/g). Le furet doit donc manger beaucoup lors qu’il consomme cette dernière, de l’ordre de 200 g de nourriture humide par kilo de poids corporel. Cette quantité n’est pas surprenante. Elle est parfaitement physiologique.

Diminution de l’exposition aux glucides simples et complexes

L’alimentation industrielle sèche classique apporte des glucides (amidon et fibres) en quantité excessive par rapport aux besoins nutritionnels du furet. En effet, les procédés industriels de fabrication nécessitent une teneur minimale en amidon, pour la tenue et la cohésion de la croquette. De fait, il n’existe pas d’aliment actuellement disponible sur le marché dont la teneur en extractif non azoté (ENA) soit inférieure à 15 % de matière sèche (MS). La moyenne avoisine plutôt 25 à 30 % de MS. L’excès de fibres contribue également à une digestibilité moindre de la ration et accélère le transit digestif.

Dans la nourriture carnée, la teneur en glucides (il s’agit de glycogène et de glucose, et non d’amidon) et en fibres (apportées par le son de blé) de la ration est négligeable (au total 1 à 3 % de MS), comme dans le régime alimentaire naturel du furet. Cette solution limite les irritations digestives et les sollicitations excessives du pancréas, qui expliqueraient la fréquence élevée des insulinomes chez les furets durant ces dernières années, bien que cela reste à démontrer.

Certains auteurs postulent également que les aliments industriels sont susceptibles de sensibiliser le tube digestif et de favoriser l’émergence des maladies digestives inflammatoires en raison de la présence de conservateurs, de colorants ou d’additifs. L’exposition à des sources de protéines variables est également incriminée dans les cas suspects d’allergie alimentaire. Toutefois, aucune information n’est disponible pour étayer ces allégations. Cette alimentation comportant des proportions de glucides inadéquates amène un changement d’écosystème bactérien, ce qui pourrait impacter la santé digestive.

Stimulation et enrichissement de l’environnement

L’alimentation carnée, en raison de sa faible densité énergétique, permet au furet d’éprouver progressivement une sensation de satiété, proche d’un comportement naturel, sans nécessiter une surconsommation calorique et sans apport excessif d’énergie par les glucides.

La distribution de proies entières est également très stimulante, puisqu’elle oblige le furet à déchiqueter, à prélever des morceaux avant de les ingérer, à mastiquer longuement, etc. Cela contribue à une consommation raisonnable et adaptée, l’animal ne ressentant pas le besoin de surconsommer l’aliment par ennui ou excès d’appétence (généré par l’enrobage de graisses des aliments industriels secs).

Le déchiquetage des tendons et des muscles est également considéré par certains auteurs comme une excellente méthode de prévention des affections bucco-dentaires, fréquentes chez les furets de plus de 3 ans (tartre, gingivite, halitose, etc.), bien que cela ne soit pas démontré à ce jour.

QUELLE ALIMENTATION CARNÉE PROPOSER ?

Trois méthodes existent : la distribution de proies entières non éviscérées (en général, des poussins de 1 jour), la préparation d’une ration ménagère et l’achat d’un Barf industriel. Les deux premières apportent des bénéfices tant pour la santé (couverture des besoins nutritionnels physiologiques) que pour l’équilibre mental du furet (quantité d’aliment consommée, teneur en eau, mastication). Ce mode d’alimentation devrait être systématiquement proposé aux furets, a minima en complément des croquettes (pour furet) si le propriétaire souhaite conserver ces dernières.

Distribution de proies entières non éviscérées

Ce choix nécessite un congélateur dédié pour y stocker le lot de poussins acheté. Idéalement, ceux-ci sont congelés un par un (afin de permettre un abaissement rapide de la température corporelle, qui limite les proliférations bactériennes) et décongelés au réfrigérateur. L’impact psychologique pour les propriétaires constitue souvent un frein à ce mode de nourrissage. Afin d’éviter des diarrhées d’origine infectieuse, le respect de la chaîne du froid est essentiel. Les poussins doivent également provenir d’élevages indemnes de salmonelles. Le risque occlusif, souvent cité par les détracteurs de ce régime carné, n’est pas rencontré en pratique. Les fèces sont de qualité variable (visualisation normale des phanères non digérés). L’équilibre nutritionnel au long terme n’est pas démontré. Il est impératif que le furet consomme l’intégralité du poussin, y compris la tête et les viscères.

Ration ménagère

La ration ménagère est une excellente méthode si la recette (viande + huile de colza + complément minéral et vitaminique + son de blé), l’hygiène dans la fabrication et la chaîne du froid sont parfaitement respectées (voir encadré 2). Cependant, après quelques mois, les propriétaires deviennent souvent moins scrupuleux dans la réalisation de la ration et des incidents sont observés. Il importe de bien expliquer que chaque ingrédient à la même importance pour le furet. Le mieux est de conseiller au client de préparer le mélange, de le congeler dans un bac à glaçons, de décongeler ceux-ci au réfrigérateur en 24 heures, et de distribuer les portions-repas une par une dans la journée pour atteindre la quantité quotidienne (une à trois portions le matin, puis le midi ou au retour à la maison, et en soirée).

Pour permettre au furet de mastiquer, la distribution d’un petit morceau de cou de poulet (sans la peau) est recommandée une fois par semaine, en plus de la ration ménagère.

Régime carné industriel

Pratique et peu coûteux, le Barf industriel bénéficie d’une bonne réputation sur les forums de passionnés. Il est pourtant composé d’aliments bas de gamme qui contiennent des protéines animales de faible valeur nutritionnelle (excès de collagène notamment). Ces produits (Dogador®, Poher®, Prodia®, etc.) sont également carencés en acides gras essentiels. De plus, ils présentent des teneurs excessives en minéraux (os broyés) et des matières grasses de mauvaise qualité. Ils sont à déconseiller et ne peuvent être utilisés dans le cadre d’une ration équilibrée. En effet, leur composition variable ne permet pas de les complémenter de manière fiable.

1 – RÉGIME ALIMENTAIRE NATUREL DU FURET

→ Le furet est un prédateur carnivore strict. Son régime alimentaire naturel le conduit à chasser et à consommer de nombreuses petites proies, que ce soit des mammifères (lapereaux, rongeurs, etc.), des oiseaux (oisillons, œufs, etc.) ou des amphibiens et des invertébrés selon la disponibilité.

→ Comme chez tous les carnivores, l’ingestion d’une proie entière avec la peau apporte le lest non digestible (de la fibre en petite quantité). Les furets ne sont exposés à des produits végétaux que par le biais du contenu du tube digestif des proies consommées. La proportion d’éléments végétaux est donc négligeable, de l’ordre de 1 à 3 % de MS dans l’alimentation naturelle du furet. Les furets ne mangent pas de baies ou de végétaux à l’état sauvage, contrairement à d’autres mustélidés.

2 – EXEMPLE DE RATIONS MÉNAGÈRES À 200 CALORIES (Cal ou kcal)

Ces rations peuvent être divisées en trois repas quotidiens surveillés. Tous les ingrédients doivent être respectés et ajoutés.

→ Recette “bœuf maigre”

– 110 g de steak haché de bœuf à 5 % de matières grasses ;

– 5 ml d’huile de colza ± 0,5 ml (une gélule ouverte sur un petit repas) d’huile de poisson ;

– 3 g (trois quarts de dosette) de Vit’i5 Little Ca® (poudre, 10 % de calcium, vitamines et oligo-éléments, pas de phosphore), à malaxer avec la portion journalière de viande et le son de blé ;

– 1 à 2 g (volume de 2,5 à 5 ml) de son de blé (en paillette).

→ Recette “poulet-saumon”

– 60 g de viande de poulet ou de dinde ;

– 50 g de filet de saumon (sans arêtes, ni peau ni tête) ;

– 2,5 ml d’huile de colza ;

– 4 g (soit une dosette de 5 ml) de Vit’i5 Little Ca® (poudre, 10 % de calcium, vitamines et oligo-éléments, pas de phosphore), à malaxer avec la portion journalière de viande ;

– 1 à 2 g (volume de 2,5 à 5 ml) de son de blé.

Formations e-Learning

Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

En savoir plus

Boutique

L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire

Agenda des formations

Calendrier des formations pour les vétérinaires et auxiliaires vétérinaires

Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.

En savoir plus


Inscrivez-vous gratuitement à nos Newsletters

Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.

Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire

Retrouvez-nous sur
Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr