Quel est votre avis sur la visite sanitaire avicole ?

Elle confirmera le bon niveau de 95 % des éleveurs

Julien Flori, vétérinaire à Châteaubourg (Ille-et-Vilaine), Chêne Vert Conseil

Cette visite valorise le vétérinaire sanitaire. En cela, il s’agit d’une bonne idée. Elle renforce l’intérêt du contrôle sanitaire en élevage, supérieur à celui des inspections à l’abattoir. En outre, sa conception a été bien pensée. Le document me semble bien fait : il est complet, tout en allant à l’essentiel sans se perdre dans les détails. Il est bien calibré par rapport à son objectif.

Localement, son organisation se révèle toutefois plus complexe et inégale selon les régions. Elle se heurte à une méconnaissance de la filière avicole par les services vétérinaires. À ce jour, nous attendons leurs instructions pour nous lancer, à commencer par la liste des élevages à visiter et les modalités de transmission des données… La machine n’est pas bien huilée. Cette nouvelle intervention n’affole pas les éleveurs ; elle ne les enthousiasme pas non plus ! Les points qu’elle aborde sont régulièrement discutés. Et ils respectent déjà largement les règles de biosécurité, pour la plupart d’entre eux.

Finalement, elle permettra de confirmer la bonne qualité de leur travail, et de déceler les quelque 5 % qui ne sont pas encore au niveau. Pour nous, ces visites vont générer un surplus de travail, car le nombre de bâtiments à visiter est élevé. Si le questionnaire se remplit en une quinzaine de minutes, l’intervention globale nécessitera bien plus de temps. En contrepartie, elle représente la source d’une nouvelle rémunération.

Engager les vétérinaires du terrain est constructif

Sophie Lagadec-Pelle, vétérinaire chez Univet Santé Élevage à Loudéac (Côtes-d’Armor)

Cette visite est conçue dans un objectif de maîtrise de la qualité des viandes, en complément des inspections en abattoirs. Elle pourrait générer une crainte légitime chez les éleveurs, car elle représente une nouvelle contrainte administrative et ressemble à un contrôle. Mais elle s’inscrit dans une démarche de progrès, déjà habituelle dans la filière volailles. Une bonne communication sur ses objectifs et les formalités administratives qui l’accompagnent sera nécessaire pour rassurer les éleveurs. Une procédure de transmission aisée des documents reste à mettre en place, avec l’aide probable des organisations de production.

La grille est complète et en adéquation avec les particularités de la filière. Le questionnaire de la visite sera communiqué au service d’inspection des abattoirs destinataires, sans les parties “commentaires et conseils”. Confier cette visite aux vétérinaires sanitaires me semble être la meilleure solution, car nous connaissons bien les élevages et les risques associés. Impliquer les vétérinaires de terrain permet la réalisation de visites constructives, qui s’inscrivent dans une démarche de sensibilisation. Cette intervention sera une nouvelle occasion d’échanger sur des thématiques régulièrement abordées en élevage (l’utilisation du sas sanitaire, la décontamination, la lutte contre l’antibiorésistance, etc.) et de poursuivre la démarche de progrès en cours dans le secteur avicole.

Un projet ambitieux qui pâtit de sa mise en route

Laurent Deffreix, praticien à Amou (Landes), groupe Bio’vet Santé animale, adhérent au réseau Cristal

Sur le fond, la visite sanitaire est positive. Elle injecte de l’argent dans la filière. Mais c’est un projet ambitieux, associé à un questionnaire qui vise l’exhaustivité. Sa mise en œuvre pose question. L’évaluation, fondée sur des cases à cocher, écarte toute prise en compte des caractéristiques individuelles du site. Je m’interroge sur l’interprétation des résultats. En plein air ou en bâtiment, la barrière sanitaire se raisonne différemment ! Je crains les prises de décisions hâtives, inadaptées à l’outil de production et incohérentes avec les dispositions imposées par l’aval des filières.

Cette nouvelle visite est aussi contraignante. Les productions standard sont bien médicalisées, et il sera aisé de la coupler à une autre intervention. Le vétérinaire intervient moins régulièrement en production Label, d’où une plus grande difficulté pour la planifier.

L’idéal sera d’associer bilan et visite sanitaires. Mais nous n’avons pas commencé, car l’administration peine à recenser les élevages. Leur liste a pourtant été établie par les DSV locales lors de la crise de l’influenza aviaire. Le document reçu par les éleveurs demande en outre une série de renseignements sur leur vétérinaire (nom, lieu d’exercice, date de naissance, etc.). C’est inadapté à une structure comme la nôtre, qui compte trois cliniques et 14 praticiens. La mise en route est hésitante. Mais cela me rappelle celle des contrôles de salmonelles, d’abord confus, mais qui fonctionnent bien désormais.