Les bâtiments bovins de demain, économes en paille et producteurs d’énergie - La Semaine Vétérinaire n° 1565 du 20/12/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1565 du 20/12/2013

Formation

PRODUCTIONS ANIMALES/BOVINS

Auteur(s) : Stéphane Mille*, Jacques Capdeville Jean-Yves Blanchin**, Serge Trouillet***

Fonctions :
*Institut de l’élevage. Article tiré de la conférence présentée lors du Sommet de l’élevage à Clermont-Cournon, en octobre 2013.
**Institut de l’élevage. Article tiré de la conférence présentée lors du Sommet de l’élevage à Clermont-Cournon, en octobre 2013.

Tout projet de construction d’un bâtiment d’élevage nécessite d’avoir une vision claire de ce qui en est attendu. Au regard de l’investissement qu’il requiert, un accompagnement par des conseillers en bâtiments d’élevage est recommandé par l’Institut de l’élevage.

Michel Joly, membre du bureau de la Fédération nationale bovine (FNB), est avant tout éleveur et fier de l’être : « L’élevage ne se fait pas sans passion. Le bâtiment d’élevage est un peu la seconde maison de l’éleveur. C’est un élément de cœur. Hélas, il coûte cher; il pèse lourd sur nos annuités. Même avec les aides annoncées par le président de la République, il doit être économe à tout point de vue. » Économe dans sa fonctionnalité au quotidien, dans sa consommation d’énergie, pour le travail de l’éleveur ; tout cela au service du bien-être de l’animal, source de productivité pour l’exploitation. L’édification d’un bâtiment bovin ne peut, en conséquence, se concevoir aujourd’hui sans une approche globale du projet. L’écoconstruction est une réponse à cette démarche, la charte “Écobel”, l’outil qui permet de la conduire.

À travers plusieurs grilles, cette charte propose de valoriser chacun des choix techniques : l’insertion dans le site; les matériaux, les procédés, les ressources et les nuisances de construction; l’énergie, l’eau et les déchets d’activité ; enfin, le confort et la santé de l’éleveur et des animaux. « Elle permet d’accompagner les éleveurs dans leur réflexion. Leur rôle est prédominant tout au long du projet, dont la réalisation peut s’étaler sur plus de deux ans. En général, les chartes de qualité environnementale appliquées pour la construction hors secteur agricole mettent l’homme au centre de leur dispositif. Nous sommes ici dans une logique où l’éleveur et les animaux sont au cœur de la démarche », souligne Jean-Yves Blanchin, de l’Institut de l’élevage.

Réduire l’utilisation de la paille, de plus en plus onéreuse

Dans sa réflexion sur les économies à réaliser, l’éleveur songe assurément à limiter l’utilisation de la paille, un poste important dans ses charges. Il peut envisager de la remplacer, en partie ou en totalité, par d’autres matériaux. À partir de 90 € la tonne, sa substitution par de la sciure, des copeaux ou des plaquettes semble intéressante. Toutefois, pour être répandus en litière, ces matériaux doivent être très secs. Les plaquettes seront, le cas échéant, produites sur l’exploitation. Leurs formes plus ou moins grossières, comme celles des copeaux, conviennent pour servir de sous-couche, qu’il est possible de combiner ensuite avec de la sciure ou de la paille. Il reste que ces produits entrent dorénavant en concurrence avec une valorisation énergétique qui risque de prévaloir sur leur utilisation en litière.

L’économie de paille résulte également du choix du mode de logement. À l’aire paillée intégrale, nécessitant entre 8 et 12 kg de paille par vache (et son veau) et par jour, l’aire paillée associée à une aire d’exercice peut être préférée. « La consommation de paille s’en trouve réduite de moitié, et, du fait que cette aire d’exercice est raclée fréquemment, les déjections sont évacuées et l’aire paillée est gardée confortable et propre pour les animaux. Autre solution alternative : les logettes qui connaissent un regain d’intérêt. Selon le niveau de paillage, on choisira un système fumier ou lisier, avec raclage ou caillebotis, le lien entre paillage et confort n’étant pas si clairement établi avec des vaches allaitantes qu’avec des vaches laitières », observe Stéphane Mille, de l’Institut de l’élevage.

Prévoir de faire évoluer son bâtiment

La notion de coût est naturellement déterminante dans ces choix. Une étude menée en Pays-de-la-Loire, en 2010-2011, a établi une comparaison des dépenses totales annuelles entre les systèmes, par place et par an.

L’avantage revient à l’aire paillée associée à une aire d’exercice extérieure (annuité de remboursement d’emprunt de 265 € par vache et par an en tunnel, 325 € en traditionnel), puis à l’aire paillée avec une aire d’exercice couverte et un raclage lisier (355 €), puis à l’aire paillée intégrale (375 €), puis à l’aire paillée avec une aire d’exercice couverte et un raclage fumier (385 €), et enfin aux logettes (390 €).

« Au bout de quinze ans, la charge financière de l’investissement laisse la place au seul fonctionnement et, là, les logettes sont intéressantes, notamment en système lisier avec caillebotis. Il faut y réfléchir. L’idée n’est pas forcément d’investir directement dans de telles logettes. On peut commencer par une aire paillée intégrale en prévoyant de faire évoluer son bâtiment, tout en veillant à une complémentarité entre les autres structures de l’exploitation », explique Stéphane Mille. Pour les bâtiments d’engraissement des jeunes bovins, les systèmes à pente paillée, avec couloir de raclage, sont maintenant plus développés que les aires paillées intégrales. L’investissement, pour ces dernières, est moindre, mais pas leurs coûts de fonctionnement. Leurs besoins en paille sont plus importants et, si les aires paillées intégrales réclament a priori moins de travail, cela redevient plus favorable sur les pentes paillées avec un racleur automatique. Par ailleurs, la présence d’un couloir de raclage facilite la circulation des lots d’animaux, notamment en lien avec la zone de contention.

Privilégier les structuresà basse consommation d’énergie

La réduction de la consommation d’énergie est une autre priorité. Il s’agit d’inscrire son projet de construction dans une logique de bâtiment à énergie positive, c’est-à-dire qui produit plus d’énergie qu’il n’en consomme. D’abord, en consommant peu. Certes, l’élevage des ruminants ne nécessite ni chauffage des locaux, ni ventilation dynamique, sauf pour les ateliers de veaux de boucherie. Mais si, en production de viande, la consommation d’énergie électrique est moindre qu’en élevage laitier, il convient, de manière générale, d’optimiser l’exposition du bâtiment, son organisation générale, le choix des équipements, des matériels et des engins, qui doivent être adaptés au mieux à l’utilisation requise.

Mieux encore, non seulement tous les moyens permettant de limiter au minimum la consommation d’énergie sont mis en œuvre, mais aucun autre qui conduirait à en récupérer n’est négligé. Ainsi en est-il, par exemple, de la chaleur sous une litière de stabulation. On peut la valoriser, grâce à la pose de capteurs sous la litière, par une pompe à chaleur qui remplacera le chauffage au fioul de toute l’exploitation et permettra, par l’eau chaude produite, de mettre hors gel d’autres bâtiments. Cette solution présente également l’avantage de réduire la température de la litière, ce qui est bénéfique sur le plan sanitaire. « Le coût d’un tel investissement est élevé, de l’ordre de 30 000 € pour un exemple de mise en service en 2010 ; mais avec 40 % de subventions, le temps de retour sur investissement ne dépasse pas dix ans », précise Jacques Capdeville, de l’Institut de l’élevage.

Produire de l’énergie sans négliger la vocation première du bâtiment

Un bâtiment d’élevage peut enfin servir de support à la production d’énergie. Celle qui est d’origine photovoltaïque est bien connue. La démarche est intéressante à condition de garder sa vocation première au bâtiment d’élevage. Il convient de laisser le bâtiment respirer, le soleil entrer. On assurera la parfaite étanchéité de la couverture, on éloignera les animaux des onduleurs et on limitera à 20°, voire à 25° au maximum, la pente du toit. Le tarif du rachat de l’électricité a énormément baissé ; il est aujourd’hui de 18,85 centimes d’euro le kWh (+ 10 % si les panneaux sont de fabrication européenne). Mais les coûts d’investissement ont diminué dans les mêmes proportions. Aussi les temps de retour sur investissement sont-ils équivalents aujourd’hui à ce qu’ils pouvaient être il y a cinq ans, c’est-à-dire une douzaine d’années.

Une exploitation d’élevage peut également produire de l’énergie grâce au biogaz, qui permet de fertiliser les cultures, par la valorisation du digestat, et de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Sont concernés essentiellement, en France, des élevages laitiers, mixtes et porcins. L’intérêt de la méthanisation dépend en effet conjointement des substrats méthanogènes mobilisables localement (déchets verts, résidus de produits végétaux, déchets de l’industrie agroalimentaire ou de collectivités, etc.), ce qui est plus difficile en élevage bovin viande, ainsi que de la valorisation de la chaleur (elle représente 60 à 70 % de l’énergie contenue dans le biogaz). « Pour une puissance électrique d’environ 150 kW, correspondant à 750 unités gros bétail (UGB) en bâtiment toute l’année, le retour sur investissement (1 million d’euros) est d’environ huit ans. Des évolutions sont attendues sur la petite méthanisation à la ferme (inférieure à 60 kW), à condition de réduire les coûts d’investissement  », conclut Jacques Capdeville.

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