Les affections oculaires chez les rongeurs - La Semaine Vétérinaire n° 1557 du 25/10/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1557 du 25/10/2013

Formation

NAC

Auteur(s) : Julien Goin

Fonctions : assistant hospitalier au service “animaux d’espèces inhabituelles” d’Oniris (Nantes)

Chez les rongeurs, le globe oculaire, proéminent, est exposé au risque d’exophtalmie, de traumatisme et de sécheresse oculaire. La troisième paupière est généralement rudimentaire. Le cristallin, sphérique à subsphérique et de grande taille, occupe les deux tiers du globe oculaire. Un sinus veineux orbitaire, généralement bien développé, est présent.

Chez les myomorphes (rat, souris, hamster, gerbille), la glande de Harder fabrique un film lipidique qui contient des phéromones et des pigments porphyriques. Chez le cobaye, une glande lacrymale et une glande salivaire zygomatique volumineuses sont présentes. Chez le chinchilla, la pupille est étroite et verticale.

La perte de vision, totale ou partielle, est un motif de consultation rare, car les rongeurs peuvent facilement compenser ce handicap par leur odorat et leur toucher (vibrisses). Les affections oculaires chez ces espèces sont généralement infectieuses ou traumatiques (voir tableau).

BLÉPHARITES

Les blépharites relèvent du domaine de la dermatologie. Elles peuvent être secondaires à une dermatophytose (principalement à Trichophyton mentagrophytes, voir photo 1), une ectoparasitose (par exemple la gale notoédrique à Notoedres muris) ou un traumatisme (morsure entre congénères chez le hamster ou l’écureuil de Corée).

CONJONCTIVITES

Les conjonctivites et les kératoconjonctivites sont fréquentes (voir photo 2), et souvent associées à une infection bactérienne respiratoire (Bordetella bronchiseptica, Klebsiella pneumoniae, Mycoplasma pulmonis, Pasteurella multocida, P. pneumotropica, Pseudomonas aeruginosa et Streptococcus pneumoniae). Les conjonctivites à Chlamydophila psittaci affectent le cobaye et le chinchilla, surtout avant l’âge de deux mois, et évoluent généralement vers une guérison spontanée.

Les autres causes de conjonctivite sont les irritations chimiques (litière sale, parfumée ou à base de résineux dégageant des phénols irritants), mécaniques (litière ou foin poussiéreux, épillet, bains de sable trop fréquents chez le chinchilla), les traumatismes (morsures de congénères, notamment chez le hamster et l’écureuil de Corée). Des infections virales sont également possibles (virus Sendaï chez le rat et la souris, coronavirus de la sialodacryoadénite chez le rat), ainsi que les carences vitaminiques (hypovitaminose C chez le cobaye, hypovitaminose A chez le chinchilla).

ÉPIPHORA ET EXOPHTALMIE

L’épiphora et l’exophtalmie sont généralement secondaires à l’atteinte d’une racine dentaire : une élongation ou une abcédation entraînent la compression du canal naso-lacrymal ou la protrusion du globe oculaire (voir photos 3 et 4).

L’exophtalmie se complique fréquemment d’une kératite d’exposition, éventuellement associée à un ulcère cornéen, par défaut de recouvrement palpébral (voir photo 5). Elle peut également être consécutive à un traumatisme (combats entre congénères chez le hamster et l’écureuil de Corée), à une tumeur ou à une cardiopathie entraînant un défaut de retour veineux et une dilatation du sinus veineux orbitaire (rat). Lors d’atteinte sévère, le pronostic est mauvais, et l’énucléation souvent indiquée.

CHROMODACRYORRHÉE

La chromodacryorrhée est un écoulement anormal de larmes rouges, secondaire à l’hypersécrétion de pigments porphyriques par la glande de Harder lorsque celle-ci devient inflammatoire (voir photo 6). Elle concerne les myomorphes (souris, rat, hamster, gerbille) et est fréquemment confondue avec du sang par les propriétaires. Cet écoulement n’est pas spécifique et peut refléter un stress, une douleur, le vieillissement, des conditions d’élevage inadaptées, une affection oculaire ou respiratoire, etc.

Chez le rat, le coronavirus de la sialodacryoadénite est une cause possible. Ce virus à tropisme respiratoire entraîne une rhinotrachéo-bronchite, une sialoadénite, une dacryoadénite et une hypertrophie des nœuds lymphatiques mandibulaires, avec divers signes cliniques respiratoires (jetage, éternuements) et oculaires (kératoconjonctivite, uvéite, dégénérescence rétinienne, etc.). La guérison est spontanée en une semaine chez les animaux immunocompétents, mais des séquelles oculaires sont possibles.

KÉRATITES ET ULCÈRES CORNÉENS

Les ulcères cornéens sont généralement traumatiques (corps étranger, morsure de congénère, etc.). Une surinfection bactérienne est possible. Ils peuvent être mis en évidence par un test à la fluorescéine.

MÉTAPLASIE OSSEUSE DU RÉSEAU TRABÉCULAIRE

La métaplasie osseuse du réseau trabéculaire est décrite chez le cobaye. Elle se traduit par la présence d’un cercle blanc et opaque dans la chambre antérieure, en regard de l’angle irido-cornéen. Une vascularisation est parfois visible. Il s’agit souvent d’une découverte fortuite. Aucun traitement n’est nécessaire.

GLAUCOME

Le glaucome est une augmentation de la pression intra-oculaire, généralement secondaire à un défaut de résorption de l’humeur aqueuse (voir photo 7). Il peut être unilatéral ou bilatéral. En général, il s’accompagne d’une buphtalmie, d’une mydriase, d’une disparition du réflexe photomoteur, d’une atrophie du nerf optique et d’une perte de vision, difficilement objectivée par le propriétaire.

CATARACTE

La cataracte peut avoir une origine primaire (génétique, congénitale, héréditaire ou sénile) ou secondaire (diabète sucré, mais aussi séquelle d’uvéite antérieure chez le rat et la souris). Chez l’octodon, il s’agit de l’affection oculaire la plus fréquente (voir photo 8).

PANOPHTALMIE

La panophtalmie est une infection sévère du globe oculaire, généralement purulente. Surtout observée chez le hamster, elle est souvent consécutive à des combats entre congénères. Elle se traduit généralement par une abcédation du globe oculaire qui évolue vers la perforation (voir photo 9). Le pronostic est mauvais et le traitement repose sur l’énucléation.

TUMEURS

Des tumeurs oculaires sont décrites : masses palpébrales (souris, hamster), conjonctivales et cornéennes (lymphome chez le cobaye), de la glande de Harder (souris, rat), etc.

AUTRES AFFECTIONS

Plus rarement rencontrées, d’autres affections sont toutefois décrites : luxation de la glande de Harder (gerbille) ou de la glande lacrymale (cobaye, voir photo 10), dystrophies cornéennes calciques (rat, souris, cobaye) et lipidiques (rat, cobaye), dermoïde cornéen (cobaye), hyalose astéroïde (chinchilla), dégénérescence rétinienne (rat, souris), anophtalmie et micro-phtalmie (anomalies de développement notamment susceptibles d’affecter le cobaye, voir photo 11).

Le traitement des affections oculaires fera l’objet d’un article dans un prochain numéro.

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