“Nos confrères qui subissent le chômage en gardent une blessure morale”

Guillaume Collignon, vétérinaire à Saint-Florentin (Yonne)

« J’ai expérimenté le salariat pendant cinq ans (avec une période de chômage forcé de quelques mois) avant de finalement m’associer en libéral, et voici ce que j’en retiens : en grande partie, les postes à pourvoir sont peu gratifiants (difficultés à conjuguer lien de subordination et indépendance du prescripteur, mauvaise ambiance, salaire misérable, absence de reconnaissance, précarité, etc.). Les postes de salariés réellement intéressants ne sont jamais vacants. Et quand c’est le cas, ils sont déjà réservés plusieurs générations à l’avance ! Nous avons, comme de nombreux confrères libéraux, éprouvé quelques difficultés pour recruter un remplaçant pour nos vacances. Pourquoi ? Pas parce que ce sont des fainéants, comme le prétendent à tort certains confrères. La plupart des salariés travaillent dur, s’investissent largement, et ont une conscience professionnelle pointue. Quand le poste proposé n’est pas aussi attractif que d’autres, il est plus difficile à pourvoir. Ceux qui subissent le chômage gardent une blessure morale d’autant plus importante que les suspicions de fainéantise vont bon train dans la profession, et sont rarement justifiées. Le chômage est un énorme choc, à plus forte raison pour des salariés habitués à travailler 50 heures par semaine, auxquelles s’ajoutent les gardes. Il est souvent vécu comme une humiliation par des jeunes qui ont fait des études brillantes et longues. Ne les accablons pas davantage ! Si les chiffres des suicides dans notre profession étaient connus, ils nous éclaireraient sur le mal-être de nos confrères chômeurs. »

Nicolas Müller, vétérinaire à Bournezeau (Vendée)

« Je rejoins ce qui est dit (en termes d’offre abondante d’emplois vétérinaires qui restent à pourvoir, NDLR). Pour notre part, notre structure propose un poste aux 35 heures en canine pure (nous sommes bien équipés), payé sur la base de la convention collective. Nous avons reçu très peu de réponses, et le reproche qui revient le plus souvent est notre éloignement de la civilisation (nous sommes situés à une heure de route de Nantes). Très peu de diplômés d’ENV ont postulé, contrairement à ceux de Belgique et d’Afrique du Nord. Bref, je ne comprends pas comment on peut payer le chômage à certains ! »

Sébastien Polin, vétérinaire à Montmirail (Marne)

« Ah ! les beaux discours de chacun… Personnellement, j’ai croisé suffisamment d’employeurs pour vous dire que nombre d’entre eux, “à côté de la plaque”, ne respectent pas la convention collective. Quant aux autres, ils la suivent tellement à la lettre qu’ils ne savent même pas rémunérer au juste prix un salarié de qualité, sans compter qu’il existe un certain nombre de personnes malhonnêtes dans notre profession. Les confrères les plus investis et consciencieux que j’ai pu rencontrer n’étaient pas forcément à leur compte. Désormais, beaucoup sont désabusés par la situation qu’ils peuvent vivre. Nombreuses sont les offres d’emploi qui ne méritent que ce qu’elles trouvent, car on a souvent le salarié que l’on mérite ! À tous de faire des efforts de patience, de compréhension, d’accueil, d’intégration en équipe, de rémunération et de formation, ce qui éviterait en plus des installations inconscientes et idiotes de vétérinaires isolés et désabusés par leurs “confrères”. Et même si vous avez eu une mauvaise expérience avec un salarié, évitez de généraliser. »

• 1 Voir La Semaine Vétérinaire n° 1546 du 28/6/2013 en page 16.