Luxation de la hanche chez un lapin - La Semaine Vétérinaire n° 1545 du 21/06/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1545 du 21/06/2013

Formation

NAC

Auteur(s) : MARIANNE VERRY*, SAMUEL SAUVAGET**, EMMANUEL RISI***

Fonctions :
*praticien au CHV Atlantia à Nantes (Loire-Atlantique)
**praticien au CHV Atlantia à Nantes (Loire-Atlantique)
***praticien au CHV Atlantia à Nantes (Loire-Atlantique)

CAS CLINIQUE

Anamnèse

Un lapin nain femelle non stérilisé, âgé de six ans et demi, est présenté pour boiterie du membre postérieur droit depuis 24 heures. Aucun traumatisme n’a été observé par le propriétaire. L’état général est bon. Un ralentissement du transit et une baisse d’appétit sont néanmoins rapportés.

Examen clinique

À son arrivée, le lapin est alerte, normotherme (38,5 °C), non déshydraté et l’auscultation cardio-respiratoire est normale. Il ne s’est pas alimenté et n’a pas fait de fèces depuis 12 heures. À la palpation, l’abdomen est souple et non douloureux. Le membre postérieur droit est tenu en abduction et en rotation externe au repos. L’animal continue cependant de se déplacer en s’appuyant sur le postérieur droit, même si le poids du corps est nettement reporté sur le côté gauche.

Hypothèses diagnostiques et examens complémentaires

Une fracture, une luxation ou une contusion musculaire peuvent être suspectées. La position du membre au repos, en rotation externe et en abduction, oriente vers un trouble de l’articulation coxo-fémorale droite, et en particulier vers une luxation. La suspicion diagnostique est confirmée grâce à des radiographies de face et de profil du bassin, qui montrent une luxation cranio-dorsale de la hanche.

Traitement chirurgical

Une réduction chirurgicale de la luxation est préférée à un traitement conservateur. L’animal est opéré le lendemain de la consultation.

La douleur est gérée grâce au méloxicam (0,3 mg/kg, par voie sous-cutanée, une fois par jour) et à la buprénorphine (0,05 mg/kg, deux fois par jour). Une prémédication à base de kétamine (5 mg/kg, par voie intramusculaire), de médétomidine (50 µg/kg, voie intramusculaire) et de butorphanol (1 mg/kg, par voie sous-cutanée) est administrée. Un cathéter 24 G est posé à la veine céphalique droite. Le lapin est ensuite intubé grâce à une sonde trachéale de 2,5 mm et un relais anesthésique à 2 % d’isoflurane et 1 l/min d’oxygène est mis en place pendant toute la durée de l’intervention.

Une anesthésie péridurale est pratiquée (0,1 mg/kg de morphine et 1 mg/kg de lidocaïne, volume complété par 0,1 ml de NaCl à 0,9 %) à l’aide d’une aiguille 25 G, insérée entre la dernière vertèbre lombaire et la première vertèbre sacrée. Le membre postérieur droit est tondu, de la colonne vertébrale et de la ligne blanche jusqu’à l’extrémité distale du tarse, puis désinfecté à la chlorexidine. Le lapin est ensuite perfusé via le cathéter à un débit de 10 ml/kg/h, et installé au bloc opératoire en décubitus latéral gauche sur un tapis chauffant.

Une chaussette stérile est mise en place autour des doigts et le membre droit repose entièrement sur les champs opératoires stériles. Une incision cutanée de 3 cm de long est pratiquée, dans l’axe du fémur, centrée sur le grand trochanter. Le fascia qui unit les chefs rectus femoris et vastus lateralis du muscle quadriceps est incisé pour accéder à l’articulation coxo-fémorale. Grâce à un davier, le fût fémoral est tracté latéralement et caudalement pour rétablir la coaptation de l’articulation. Les résidus encore sains de la capsule articulaire sont suturés en profondeur au chef rectus femoris avec du fil tressé résorbable 4-0. Les deux chefs rectus femoris et vastus lateralis sont suturés superficiellement avec du fil tressé résorbable 4-0. Enfin, la peau est refermée par des points simples avec du fil monofilament non résorbable 4-0.

Une radiographie de contrôle, effectuée sous anesthésie générale, montre une tête fémorale située de nouveau en position physiologique dans l’acétabulum. Le lapin est alors réveillé, puis extubé.

Suivi postopératoire

Pendant la phase de réveil, l’animal est placé dans une couveuse maintenue entre 28 et 30 °C. Dès son réveil complet, il tient de nouveau son membre postérieur droit en position physiologique.

Un traitement antibiotique à base d’enrofloxacine (10 mg/kg, deux fois par jour, par voie sous-cutanée puis per os) est mis en place pendant les dix jours qui suivent l’intervention chirurgicale. La douleur est gérée pendant les cinq premiers jours postopératoires grâce à la buprénorphine (0,05 mg/kg, par voie sous-cutanée, deux fois par jour, puis à la demande) et au méloxicam (0,3 mg/kg, une fois par jour).

La reprise du transit est permise par des gavages (15 à 20 ml, Recovery Supreme Food®, trois fois pas jour à la seringue) et par l’administration de métoclopramide (0,5 mg/kg, par voie sous-cutanée, deux fois par jour). Une restriction d’activité stricte est respectée pendant les cinq jours d’hospitalisation et les manipulations du lapin lors des soins sont effectuées avec précaution.

À l’issue de cette phase, le transit intestinal est normal. L’animal est rendu à son propriétaire, auquel il est demandé de poursuivre l’administration d’enrofloxacine et de méloxicam per os pendant cinq jours, et d’appliquer une restriction stricte d’activité jusqu’au contrôle, deux semaines plus tard.

Lors de cette dernière visite, l’état général du lapin est bon, son transit et son examen clinique sont normaux. La radiographie de contrôle montre la bonne coaptation de la hanche droite. L’animal se déplace sans gêne particulière. Une semaine supplémentaire de restriction d’activité est prescrite, avant un retour à un mode de vie normal.

DISCUSSION

Face à une boiterie, la radiographie reste l’examen complémentaire de choix en première intention. Selon une étude1, la luxation coxo-fémorale représente environ 4 % des traumatismes orthopédiques (fractures ou luxations) chez le lapin. En termes de fréquence, elle arrive donc loin derrière la fracture du fémur (27 %) ou encore du tibia (17 %). La luxation la plus fréquente chez le lapin est celle du tarse, qui ne représente pourtant que 6 % des traumatismes. Le traitement conservateur, lors de luxation, n’est pas recommandé, car le taux de récidive est plus élevé qu’avec une réduction chirurgicale et il est difficile de mettre en place un bandage permettant une contention efficace de l’articulation de la hanche. Dans notre cas, après l’intervention chirurgicale, il n’a d’ailleurs pas été envisagé de réaliser un bandage le temps de la cicatrisation. Le respect d’une restriction stricte d’activité, quitte à confiner le lapin dans une cage les premiers jours, est donc primordial. Le traitement chirurgical, tel qu’il a été réalisé par un abord latéral, est rendu difficile par les volumineux chefs du muscle quadriceps qui obligent à réaliser la suture de la capsule articulaire au muscle dans un plan profond. Si la tête du fémur vient à se nécroser ou si la réduction de la luxation n’est pas stable, une résection de la tête et du col du fémur peut être réalisée. Les résultats de cette technique sont satisfaisants chez le lapin.

Chez les lapereaux, un syndrome splay leg est décrit, surtout quand les surfaces sur lesquelles ils se déplacent sont lisses et glissantes. Des signes radiographiques sont alors observés, allant d’un aplatissement de la tête fémorale à une subluxation de la hanche ou à une luxation de la patelle. Dépistée précocement, cette anomalie peut être corrigée au moyen d’attelles qui entravent l’articulation dans une position anatomique plus appropriée.

Les luxations du carpe ou du tarse peuvent être traitées via une arthrodèse au moyen d’une plaque ou d’un fixateur externe transarticulaire. Celles du coude, les plus rares, sont réduites et stabilisées avec succès au moyen d’un fixateur interne et d’une attelle pendant trois semaines (suivies de trois semaines supplémentaires avec l’attelle uniquement).

  • 1 Quesenberry K.E., Carpenter J.W. eds, Ferrets, rabbits and rodents : clinical medicine and surgery. Third ed. St Louis : Saunders Elsevier ; 2012 : 477.

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