Six vétérinaires exposent leur parcours - La Semaine Vétérinaire n° 1533 du 29/03/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1533 du 29/03/2013

Témoignages

Dossier

VALÉRIE MEUNIER, CLINIQUE VET ŒIL EN RÉGION PARISIENNE

Après 15 ans d’exercice comme consultant itinérant en ophtalmologie, Valérie Meunier a posé ses valises à Lognes (Seine-et-Marne) en 2009. Elle s’est associée avec Éric Dean, qui avait aussi développé la discipline et cherchait à évoluer en exercice exclusif. « Nous sommes partis avec nos clientèles spécialisées et tout le matériel médical et chirurgical nécessaire, se souvient Valérie Meunier. Notre activité a rapidement augmenté. L’ophtalmologie n’était pas développée à l’est de Paris. Et devoir se rendre dans la capitale freine de nombreux propriétaires. » De plus, la clinique Vet œil, idéalement placée, est facile d’accès depuis la francilienne et offre un large parking. L’exercice sédentaire a vu se développer les consultations d’urgence et les interventions lourdes (chirurgie intra-oculaire). Car la limite de l’exercice itinérant réside dans la disponibilité et l’équipement. « Transporter le matériel d’une clinique à l’autre commençait à me peser. »

Un véritable confort de travail

L’exercice exclusif permet de se concentrer sur sa spécialité. « L’ophtalmologie ne nécessite pas un stock important de médicaments ou de produits, contrairement à ce qu’un généraliste doit assumer. » Toutes les consultations s’effectuent sur rendez-vous. Les matinées sont consacrées à la chirurgie. Les hospitalisations se prolongent rarement au-delà de la journée. En revanche, chaque situation est souvent complexe : « Nous prévoyons une heure de consultation pour tout nouveau client. » L’association facilite d’ailleurs la discussion autour des cas. « Itinérante, je me sentais parfois seule devant la difficulté. Mais comparé au développement de la spécialité au sein d’une structure polydisciplinaire, j’apprécie de conserver une totale indépendance. »

Pour le moment, la clinique fonctionne à deux. « C’est apprécié des confrères et des clients, qui sont en contact avec un ophtalmologiste dès leur premier appel téléphonique. » Les échanges avec les référents sont systématiques. Ce sont eux qui effectuent les éventuels examens complémentaires requis, puis le suivi de l’animal. « Il est fondamental d’instaurer un contact étroit avec les confrères et de travailler en bonne coordination. C’est aussi un aspect agréable du travail en référé. Le lien avec les confrères est fort, entre comptes rendus, appels téléphoniques et réunions scientifiques que nous organisons. De leur côté, nous nous rendons compte qu’ils prennent soin de nous référer principalement des clients motivés. »

HÉLÈNE LERAY, EXERCICE EXCLUSIF EN OSTÉOPATHIE EN RÉGION NANTAISE

Hélène Leray caresse l’idée de se former en ostéopathie, après huit ans d’exercice canin traditionnel qui ne la motive plus. Elle juge son projet trop fou pour oser l’envisager sérieusement. Mais sa jeune agence bancaire, en quête d’emprunts à financer, l’encourage à monter un dossier, et la suit. Hélène Leray se forme, puis se lance comme consultante itinérante en 2010. Deux ans plus tard, elle ouvre son cabinet.

« À peine six mois plus tard, je travaillais à plein temps. La deuxième année est devenue difficile, avec une activité ininterrompue de 6 h à 23 h ! », souligne Hélène Leray. La création d’un cabinet lui permet de préserver sa vie privée et de gagner du temps de déplacement en faisant venir à elle chiens, chats… et veaux ! Car contre toute attente, l’ostéopathie bovine est la plus développée ; l’équine l’est beaucoup moins. « Disposer d’une salle de consultation équipée d’une table spécifique, très basse, a aussi amélioré mon confort de travail. Chez certains confrères, faute de place, il m’arrivait de manipuler dans un garage. Désormais, je ne les “encombre” plus ! »

Moins de collaboration avec les allopathes

Pour les animaux de compagnie, Hélène Leray refusait les visites à domicile du temps de son activité itinérante. Elle privilégiait ainsi l’approche globale du cas, ayant accès à l’ensemble de son dossier, et souhaitait favoriser l’interaction avec le vétérinaire traitant. « Cultiver la complémentarité des médecines est plus difficile aujourd’hui. Nombre de consultations sont spontanées, le bouche-à-oreille y faisant beaucoup. Dans ce cadre, j’ai renoncé à envoyer un compte rendu au vétérinaire traitant, car je me suis aperçue que, la plupart du temps, il n’était pas lu. Je le réserve aux cas véritablement référés. Malgré la distance, j’ai en effet conservé des liens forts, favorisant la collaboration des médecines, avec les vétérinaires chez qui j’intervenais régulièrement. »

La pratique de l’ostéopathie exige peu de matériel et bénéficie d’une bonne rentabilité. La location du bâtiment représente la plus lourde charge. « J’ai sous-estimé l’investissement en mobilier et en matériel informatique et ai sans doute été gourmande sur la surface du local. Mais mon chiffre d’affaires est en augmentation et je vais pouvoir rapidement dégager de nouveau un salaire. »

LAURENT COUTURIER, CENTRE DE RÉFÉRÉS EN IMAGERIE ET NEUROLOGIE À CAGNES-SUR-MER

Azurvet est un centre de référés en imagerie, neurologie et neurochirurgie situé dans les Alpes-Maritimes. Les quatre associés (Delphine Rault, Eddy Cauvin, Laurent Couturier et Jérôme Couturier) sont tous des spécialistes européens diplômés. Ils emploient quatre auxiliaires et encadrent un résident en imagerie médicale1. À son ouverture en 2007, le centre était exclusivement dédié à l’imagerie avec un équipement d’emblée très complet : scanner multicoupe, radiologie numérique, appareils d’échographie fixe et portable pour l’itinérance. Il s’est élargi avec l’arrivée de Jérôme Couturier, en 2009, à la neurologie et à la neurochirurgie. « Le service de neurologie et son panel médical et chirurgical ont rapidement augmenté notre activité, déjà en croissance régulière, explique Laurent Couturier. Avant de proposer ce service, un sondage auprès de nos référents avait confirmé un besoin dans ce domaine. Car notre objectif est un développement progressif, en réponse à la demande régionale, et en complémentarité avec l’activité des cliniques voisines et de nos référents. » Les habitudes et les compétences de ces derniers sont connues de l’équipe : « Par exemple, nous ne proposons jamais de neurochirurgie si le confrère référent peut et souhaite la garder. »

L’évolution d’Azurvet à long terme se fera vers un centre de référés regroupant d’autres services, mais toujours selon l’attente des référents. « Dans l’absolu, des compétences sur place en médecine et en chirurgie seraient utiles. Mais une enquête a révélé un besoin en cancérologie, en radiothérapie et en imagerie par résonance magnétique (IRM). Nous y réfléchissons activement, mais cela implique de déménager dans des locaux appropriés au développement de notre plateau technique et de recruter un spécialiste dans la discipline pour proposer un service de pointe à nos clients. »

Des liens interactifs

Azurvet souhaite un fonctionnement parfaitement transparent, sans surprise technique ou financière pour le référent ou son client, qui n’est reçu que sur prescription de son vétérinaire traitant. Tout examen non prévu requiert l’information et l’accord de ce dernier. Les résultats lui sont transmis par téléphone et par courriel, et sont expliqués au propriétaire. L’historique des cas, les images et les comptes rendus sont archivés sur le site internet du centre, et disponibles pour le référent via un accès personnel sécurisé. Le site propose également des cas cliniques, en complément des deux soirées annuelles de conférences qui attirent jusqu’à une centaine de confrères à chaque édition.

FRÉDÉRIC VLAEMYNCK, STRUCTURE CADUVET POUR LES NAC DANS LE NORD

C’est l’histoire de trois étudiants nantais passionnés de petits mammifères, d’oiseaux, de reptiles et autres animaux exotiques. Leur projet professionnel est logiquement tourné vers la médecine et la chirurgie des NAC. « Notre vision était très concrète. L’un de nous a même consacré sa thèse d’exercice à l’étude de l’implantation d’une clinique vétérinaire pour les nouveaux animaux de compagnie en région lilloise, se souvient Frédéric Vlaemynck, associé de CaduVet avec Cyril Chovet et Émilie Tessier. Nous avons consacré nos premières années d’exercice à rassembler le capital requis, car un tel projet, à trois, représente un budget conséquent. » La clinique du Caducée ouvre en 2007. Mais pour obtenir immédiatement un niveau d’activité suffisant, elle accueille aussi les carnivores domestiques.

« Les NAC ont rapidement dominé notre clientèle et représentent aujourd’hui 80 % de notre activité. Toutefois, le complément assuré par les chiens et les chats reste indispensable. » Pour se développer, les associés ont créé la société CaduVet et ouvert un cabinet satellite pour les NAC à Arras, en mai dernier. « L’ouverture dans la région de deux autres sites est à l’étude. Nous y travaillerons aussi exclusivement pour les NAC. »

Une exclusivité de centaines d’espèces

Ce fonctionnement est un choix réfléchi. « Au sein d’une polyclinique, le service NAC bénéficierait d’un plateau technique plus important, mais resterait minoritaire. Nous souhaitions également être les seuls maîtres à bord. »

Contrairement à l’exclusivité d’une discipline vétérinaire, cette exclusivité d’espèces impose l’équipement habituel d’une clinique vétérinaire canine (nécessaire aux examens microscopiques ou biologiques, par exemple), complété des outils spécifiques aux NAC. « Le matériel de fibroscopie ou de chirurgie élaborée est centralisé à Lille, où nous transférons les animaux si besoin. Et nous référons certains examens d’imagerie médicale. »

Chacun des associés a développé un domaine d’activité propre : médecine, chirurgie ou marketing et gestion. Ils travaillent avec deux collaborateurs libéraux et salarient de jeunes diplômés qui souhaitent acquérir une expérience dans le domaine des espèces exotiques. « Nous travaillons beaucoup en référé et nous entretenons de bonnes relations avec nos référents, que nous conseillons aussi régulièrement par téléphone à propos des cas qu’ils reçoivent. Mais de nombreux propriétaires consultent spontanément. Nous essayons par ailleurs de développer les visites à domicile. »

WILLIAM BORDEAU, CABINET VETDERM À MAISONS-ALFORT

« L’un de mes avantages sur les grands centres de référés pluridisciplinaires, c’est ma disponibilité et la proximité que j’entretiens avec les clients et les vétérinaires référents. » William Bordeau se consacre depuis toujours à la dermatologie vétérinaire, d’abord comme chargé de consultations puis comme vacataire à l’école vétérinaire d’Alfort. Après une courte période d’activité itinérante, devenue impossible en raison du trafic francilien, il opte pour l’exercice sédentaire en 2003. « Je me suis d’abord adossé à la clinique généraliste de mon épouse, pour des raisons matérielles. Mais l’évolution à la hausse de mon activité – toujours exclusive dans ma discipline – m’a amené à déménager et à ouvrir mon cabinet en 2007. »

Cet aboutissement est celui d’un parcours éprouvant, complexifié par les particularités de la spécialisation vétérinaire en France, à son manque d’ouverture et de lisibilité. « En l’absence d’exemples de succès de structures équivalentes, il fallait oser ! » Et la récompense est une réussite personnelle plus que financière. « Mon travail est un véritable plaisir et je ne compte pas mon temps. Mais la rentabilité du cabinet reste limitée. Dans ce modèle de fonctionnement, le rythme d’activité est fortement lié à la personne et au niveau de confiance entretenu avec les confrères référents. »

Un avenir incertain

L’équilibre reste fragile. Car l’activité d’une structure monodisciplinaire est aussi impactée par la conjoncture économique et sociale. « Je travaille à 75 % en référé. La baisse d’activité des cliniques généralistes observée ces dernières années, liée au contexte morose actuel, se répercute sur la mienne. » Et les perspectives futures sont pessimistes. « L’achat par Internet du petfood, y compris les aliments diététiques, se généralise. C’est compréhensible. J’envisage difficilement d’augmenter mon tarif de consultation, car en dermatologie, elle aboutit souvent à la prescription de traitements longs et onéreux. Or, le panier moyen du propriétaire n’est pas extensible. La probable perte de la délivrance des médicaments par les vétérinaires obligera un important remaniement, mais sans doute dans un contexte de moindre médicalisation des animaux, faute de moyens. »

En complément de sa pratique clinique, William Bordeau a développé d’autres activités, comme le consulting avec les laboratoires pharmaceutiques et la formation via Internet avec Dermavet. Ces activités complémentaires lui assurent un complément de revenus.

NICOLAS GIRARD, CENTRE VÉTÉRINAIRE VETDENTIS EN RÉGION NIÇOISE

Nicolas Girard a ouvert son centre de référés en stomatologie et dentisterie vétérinaire l’année dernière. Son choix a été guidé par l’envie d’exercer sa spécialité en exclusivité, « pour aller au bout des possibilités de soins actuelles ». Après plusieurs semaines de formation pratique à l’étranger, son titre de spécialiste européen en stomatologie et dentisterie est la conséquence d’un concours de circonstances favorables. « L’opportunité de suivre un résidanat alterne en France pendant quatre ans s’est présentée à moi : j’ai hésité, j’ai foncé et au final, tout mon avenir professionnel s’est transformé. » Après une période dédiée au développement d’un service spécialisé dans une structure multidisciplinaire et dans sa propre clinique généraliste, Nicolas Girard a opté pour un modèle totalement déconnecté du circuit vétérinaire classique. « Je suis allé à l’extrême de ce qu’on pouvait faire, avec une structure exclusivement dédiée à ma discipline et qui fonctionne à 100 % en référé. Mon souhait initial était plutôt de m’adosser à des spécialités complémentaires, mais cela ne s’est pas fait. »

Une rentabilité timide

Nicolas Girard s’épanouit professionnellement dans ce mode de fonctionnement, même si la rentabilité peine à s’installer. L’investissement initial pour l’équipement de la clinique est élevé et le rythme d’activité reste insuffisant à ce jour pour l’amortir. « En France, créer sa clientèle, pour un vétérinaire spécialiste, n’est pas une évidence. Le concept de continuité des soins généraliste-spécialiste est toujours un peu laborieux. Je dépense beaucoup de temps et d’énergie pour valoriser ce que j’apporte (soirées d’informations, site web, articles, conférences, cours, consulting, etc.). C’est indispensable, même si les retombées sont souvent faibles, regrette notre confrère. Le modèle sédentaire est toutefois plus satisfaisant que l’exercice itinérant. Il permet d’offrir une meilleure sécurité des soins à l’animal et améliore le pronostic. »

La dentisterie est en outre une spécialité souvent méconnue du vétérinaire omnipraticien. « Elle comprend la stomatologie et la chirurgie maxillo-faciale, qui représentent 60 % de mes interventions. »

L’exercice exclusif écarte toute appréhension quant au risque de détournement de clientèle : « Je reste volontairement peu visible, sans signalétique vétérinaire extérieure, afin d’éviter les consultations spontanées et de renforcer la relation de confiance avec mes consœurs et confrères référents. »

  • 1 Programme approuvé par l’European College of Veterinary Diagnostic Imaging (ECVDI).

Pour en savoir plus

Les six structures interrogées disposent chacune d’un site web qui présente leur activité et comporte, pour certaines, une partie sécurisée destinée aux clients :

Vetoeil.fr

Helene.leray.vetosteopathe.com

Azurvet.fr

Caduvet.fr

Vetderm.fr

Vetdentis.com

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