Un cas de yersiniose chez un ara chloroptère - La Semaine Vétérinaire n° 1532 du 22/03/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1532 du 22/03/2013

Formation

NAC

Auteur(s) : Daphné Rochel*, Emmanuel Risi**

Fonctions :
*praticiens au CHV Atlantia à Nantes (Loire-Atlantique).

CAS CLINIQUE

Un ara chloroptère femelle de deux ans est présenté pour un abattement (anorexie, pelage ébouriffé, disparition du vol et du chant). Il vit avec quatre autres aras, dont deux mâles. L’animal est le dernier arrivé dans l’élevage, quatre mois plus tôt. Le propriétaire a remarqué des tentatives d’accouplement et des conflits, quatre jours auparavant, qui marquent le début de l’abattement.

À la suite d’une première visite chez un vétérinaire, un traitement antibiotique (érythromycine, tétracycline et sulfadiméthoxine) a été mis en place. Face à l’absence de réponse au traitement, l’oiseau est finalement référé.

Examen clinique

L’examen clinique ne révèle qu’un abattement (l’animal ne se défend pas). Il est anesthésié au masque (débit d’oxygène de 1,5 l/min, moyenne d’isoflurane à 2,5 %) afin de réaliser des clichés radiographiques, une prise de sang et de lui poser un cathéter dans la veine jugulaire droite (voir photo 1).

Les radiographies montrent une splénomégalie et une hépatomégalie. Les résultats biochimiques sanguins soulignent une élévation de l’activité des transaminases (alanine aminotransférase et aspartate aminotransférase), de la créatininémie, une hypoprotéinémie marquée et une hypocalcémie (voir tableau).

Traitement

L’ara est hospitalisé et un traitement empirique est mis en place. Une fluidothérapie est instaurée et de la doxycycline (25 mg/kg par voie orale, deux fois par jour), du méloxicam (0,5 mg/kg par voie orale ou intramusculaire, deux fois par jour) et de l’itraconazole (10 mg/kg par voie orale, deux fois par jour, en prévention de l’aspergillose) sont administrés. Cependant, l’oiseau meurt quelques heures plus tard.

Autopsie

Son autopsie révèle une hépatomégalie associée à de multiples nodules miliaires blancs en surface et en profondeur du foie, ainsi qu’une splénomégalie (voir photo 2). Le diagnostic différentiel de ces nodules inclut la yersiniose, la tuberculose et la salmonellose. Les autres aras sont donc traités avec de l’enrofloxacine (Baytril® 2,5 %, 1,5 à 2 ml pour 100 ml d’eau de boisson).

En outre, une histologie et une analyse bactériologique avec un antibiogramme sont mises en œuvre et concourent au diagnostic de yersiniose. La souche de Yersinia pseudotuberculosis en cause dans ce cas est notamment sensible à l’enrofloxacine. Le traitement des autres animaux est donc poursuivi, bien que l’observance ne soit pas certaine. Les oiseaux ont en effet remarqué un changement dans l’eau de boisson, et ils en consomment moins que d’habitude.

LA YERSINIOSE

Épidémiologie

La yersiniose (ou pseudotuberculose, ou rodentiose) est une infection du tube digestif, du foie et de l’appareil respiratoire due à une bactérie de type coccobacille Gram négatif Yersinia enterocolitica ou Yersinia pseudotuberculosis, voire Yersinia intermedia. Sa réplication dans l’environnement se déroule à basse température. Les infections apparaissent donc surtout en automne et en hiver, parfois au printemps. Les espèces réceptives sont nombreuses : canaris, petits oiseaux exotiques, toucans, perruches ondulées, canards, pinsons, mainates, etc. Les perroquets sont plus rarement atteints, mais leurs conditions de vie peuvent favoriser la contamination.

La transmission a lieu par l’intermédiaire du sol ou des aliments et de l’eau souillés, par les excréments d’oiseaux porteurs sains ou malades (sauvages ou captifs), voire par les rongeurs. L’incubation dure de deux à cinq jours. La maladie est extrêmement contagieuse, d’où son évolution fréquente en épizootie.

Symptômes

La yersiniose se présente sous trois formes qui aboutissent à la mort de l’animal, mais se distinguent par leur durée d’évo-lution : suraiguë (de 24 à 36 heures), aiguë (une semaine), chronique (deux semaines). Dans tous les cas, l’oiseau montre des signes peu spécifiques : une anorexie, un abattement et une posture en boule. En cas de forme chronique, il devient cachectique, et certains symptômes sont davantage observés chez une espèce que chez les autres : la dyspnée apparaît surtout chez les canaris tandis que les paralysies touchent plutôt les toucans.

Diagnostic

Le diagnostic de certitude ne s’établit que par la bactériologie, sur fèces ou sur prélèvements d’organes. Cependant, l’autopsie permet d’orienter le diagnostic devant des lésions telles que de nombreux nodules blanc jaunâtre sous forme miliaire dans le foie et/ou dans la rate (qui apparaissent congestionnés), voire au sein d’autres organes. Une hépatomégalie ou une splénomégalie parfois accompagnées d’ascite, une pneumonie, une entérite catarrhale, une inflammation des séreuses ou une ostéomyélite peuvent aussi orienter la suspicion.

Traitement

Une fois la maladie déclarée, le traitement est inefficace en raison de la rapidité de l’évolution lors de forme aiguë, et de l’isolement des bactéries dans des granulomes qui les rendent inaccessibles aux antibiotiques pour la forme chronique.

Prévention

Les mesures prophylactiques à mettre en œuvre en cas de yersiniose sont sanitaires (isolement des animaux sains, euthanasie des malades et destruction de leurs cadavres, désinfection des cages, lutte contre les rongeurs et mesures d’évitement des oiseaux sauvages) et médicales (antibiothérapie). L’enrofloxacine est un bon choix en première intention, mais il est aussi important de se référer à l’antibiogramme.

En outre, comme la yersiniose est une zoonose, il existe un risque de transmission à l’homme par les voies orale (ingestion d’aliments souillés par les excréments d’oiseaux malades), cutanée et conjonctivale.

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