L’électrophorèse des protéines chez les carnivores - La Semaine Vétérinaire n° 1527 du 15/02/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1527 du 15/02/2013

Formation

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Mélanie Ammersbach*, Hugues Beaufrère**

Fonctions :
*département de pathologie clinique, université de Guelph, Ontario (Canada).
**diplomate ABVP (avian) et ECZM (avian), université de Guelph, Ontario (Canada).

POINTS FORTS

– L’électrophorèse, en séparant les protéines, permet de mettre en évidence des anomalies dans leur concentration.

– L’indication principale de cet examen chez le chien est la suspicion d’un myélome.

PRINCIPE

L’électrophorèse consiste en la séparation d’analytes sur la base de leur charge électrique, de leur taille et de leur forme moléculaire, par l’application d’un potentiel électrique au travers d’un milieu conductif. Le temps de migration le long du gel d’électrophorèse est fonction de la charge totale de la protéine, de sa forme et de sa masse moléculaire.

ÉCHANTILLON

L’électrophorèse des protéines est classiquement effectuée à partir du sérum plutôt que du plasma, car l’abondance du fibrinogène dans ce dernier, migrant dans les fractions β-γ, gêne l’interprétation de l’électrophorégramme. L’électrophorèse des protéines est également souvent pratiquée sur des échantillons d’urine, dans les cas de suspicion de gammapathies monoclonales.

INDICATIONS

L’application principale de l’électrophorèse des protéines, particulièrement chez les carnivores domestiques, réside dans la détection ou l’exclusion de la production d’immunoglobulines (anticorps) par une population cellulaire monoclonale (cancéreuse par exemple), représentée principalement par les plasmocytes (myélome multiple) et des lymphocytes B (lymphomes, voir encadré). La production d’un type unique d’immunoglobuline se manifeste sur l’électrophorèse par un pic pointu et élevé dans la fraction γ (ou occasionnellement entre la fraction β et γ).

INTERPRÉTATION

→ Les myélomes multiples constituent la cause la plus fréquente de gammapathie monoclonale chez le chien. Les immunoglobulines anormales ou la protéine M produites peuvent être des anticorps complets (les IgG et IgA sont les plus fréquentes, mais il existe aussi des IgM) ou uniquement des chaînes légères ou lourdes d’une molécule d’anticorps (protéines de Bence-Jones). Lors de maladie due à la production de chaînes légères, il est commun de constater un large pic monoclonal dans l’urine, mais pas dans le sérum, ce dernier pouvant même présenter une hypogammaglobulinémie. Quand l’immunoglobuline monoclonale est de type A, deux pics proches l’un de l’autre sont parfois observés puisque l’IgA est un dimère et qu’une partie des molécules peut se dissocier pendant l’électrophorèse, entraînant des propriétés de migration légèrement différentes.

→ Une gammapathie oligoclonale est rare et définie par un pic étroit, mais toutefois plus large que le pic d’albumine. Elle peut être confondue avec des pics monoclonaux et se rencontre chez des animaux qui souffrent généralement de réactions inflammatoires ou de processus infectieux chroniques tels que le virus de l’immunodéficience féline, l’ehrlichiose canine chronique, une pyodermite chronique ou une péritonite infectieuse féline. Ils peuvent faussement orienter le clinicien sur une piste lymphoproliférative. Des tests complémentaires appropriés pour exclure les maladies transmises par les tiques, les parasites, et les affections virales chroniques doivent être réalisés, et une immunofixation ou une immuno-électrophorèse peut être effectuée.

→ Une gammapathie polyclonale se caractérise par la présence de pics larges dans les fractions γ ou β-γ. Ces dysprotéinémies sont fréquemment associées à une stimulation antigénique souvent de plus d’une à trois semaines (infectieuse, néoplasique, auto-immune, parasitaire, etc.). Ce type de réaction est relativement non spécifique et des tests approfondis sont requis pour en explorer l’origine.

→ Si des électrophorégrammes standard ne permettent pas de conclure (gammapathie oligoclonale, superposition avec une gammapathie polyclonale, maladie des chaînes légères) ou si le clinicien souhaite identifier un type précis d’immunoglobulines produites, une immunofixation ou une immuno-électrophorèse peuvent être effectuées. Sont utilisés des anticorps spécifiques d’espèces dirigés contre les différentes classes, sous-classes ou chaînes légères d’immunoglobulines d’un échantillon protéique séparé par électrophorèse.

Les résultats d’une électrophorèse des protéines doivent être interprétés en regard des signes cliniques et des autres tests hématologiques suggérant une réponse inflammatoire ou un processus cancéreux.

PRINCIPALES ANOMALIES DÉTECTABLES PAR ÉLECTROPHORÈSE

Cet examen permet d’étudier :

→ une hypergammaglobulinémie : principalement afin de différencier une élévation due à une inflammation de celle liée à une gammapathie monoclonale secondaire à un cancer (lymphome, myélome multiple).

1. L’élévation de plusieurs types de globulines et d’immunoglobulines (gammapathie polyclonale) indique une inflammation d’origine infectieuse ou non (maladie auto-immune, certains cancers, etc.).

2. Une gammapathie monoclonale révèle un myélome multiple.

3. Une gammapathie biclonale (peu commune) peut être causée par un myélome multiple produisant des IgA et certaines maladies chroniques.

4. Une gammapathie oligoclonale (peu commune) désigne certaines maladies chroniques.

→ une normoglobulinémie : en cas de suspicion d’un myélome multiple, même en l’absence d’anomalies de la concentration des globulines, il est recommandé d’effectuer une électrophorèse sur le sérum (en effet, un pic monoclonal peut être objectivé lors de cet examen). Il convient aussi d’effectuer une électrophorèse des protéines sur un échantillon d’urine, surtout si une protéinurie est présente. En effet, une partie des immunoglobulines produites peut être concentrée dans l’urine et ne pas se trouver en quantité élevée dans le sérum.

→ une hypogammaglobulinémie (peu commune) : – immunodéficience sévère combinée chez certaines espèces canines (bassets, cardigan welsh corgis, jack russell) ;

– agammaglobulinémie (chez les mâles, liée au chromosome X) ;

– parfois, les hypoplasies lymphoïdes, comme celles rencontrées lors d’une chimiothérapie ou de processus infectieux, peuvent entraîner une diminution des globulines ;

– si ces maladies sont suspectées, il convient d’effectuer d’autres tests pour quantifier les immunoglobulines, souvent moins onéreux et plus rapides.

DIAGNOSTIC D’UN MYÉLOME MULTIPLE

Le diagnostic de myélome multiple repose sur la présence d’au moins deux critères parmi les suivants : une gammapathie monoclonale, la présence de protéines de Bence-Jones dans l’urine, plus de 10 % de plasmocytes néoplasiques dans la moelle osseuse, une lésion lytique d’un os.

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